Baba Jan est une figure populaire de tout premier plan au Gilgit Baltistan, territoire himalayen rattaché au Pakistan. Il a été emprisonné pour avoir soutenu des villageois victimes de la formation d’un lac artificiel, en 2010, à la suite d’une catastrophe écologique dans le bassin de la Hunza. Pour cela, en 2014, il a été une première fois condamné à la prison à perpétuité de fait ; puis une seconde fois pour avoir organisé une grève des détenus, par-delà les divisions religieuses, pour que leurs droits réglementaires (qualité de la nourriture, accès aux soins…) soient respectés.
La popularité de Baba Jan s’est vue confirmée quand il s’est présenté aux élections dans la vallée de la Hunza, ce qui lui a valu d’être précipitamment condamné pour qu’il ne soit plus éligible. La justice la plus élémentaire lui a été déniée. Un rapport d’enquête judiciaire sur les incidents qui lui ont valu son inculpation n’a jamais été publié (il est probable qu’il l’innocente). Il a été torturé et sa vie a été menacée. Avec son co-détenu Iftikhar Hussain, il est devenu un symbole de résistance.
Le Gilgit Baltistan est devenu le point d’entrée de la Chine au Pakistan où elle construit un « corridor » et un port stratégique, Gwadar, qui lui donne accès à l’océan Indien. L’ordre doit régner, or Baba Jan dénonce l’emprise chinoise sur le territoire. Raison de plus pour ne pas le libérer.
La santé de Baba Jan s’est dernièrement beaucoup dégradée. Il a de fortes douleurs à la poitrine et devrait passer un examen médical approfondi pour fonder un diagnostic. Or, les hôpitaux du Gilgit Balistan n’ont pas les moyens de l’assurer. Baba Jan, sa famille, ses amis et camarades (il est membre du Awami Workers Party) demandent qu’il soit d’urgence transféré dans un hôpital d’Islamabad, ce que les autorités refusent de faire jusqu’à maintenant. Des manifestations ont eu lieu à Gilgit et dans diverses villes du Pakistan. D’autres sont en préparation.
Un appel à la solidarité internationale a été lancé. Une pétition est en ligne sur Change.org [1], elle doit recueillir le maximum de signatures. Des personnalités et parlementaires se mobilisent aussi en Europe, notamment.
D’importantes campagnes de solidarité envers Baba Jan et ses codétenus ont déjà été menées dans le passé. Nous n’avons pas pu obtenir sa libération, mais nous avons peut-être évité son assassinat qui serait devenu un scandale international – et six de ses codétenus ont été libérés. Le pouvoir pakistanais pensait que ce qui se passait dans le territoire « reculé » du Gilgit-Baltistan resterait ignoré en dehors de ses frontières. Il a été particulièrement choqué quand le sort fait à Baba Jan a été mentionné dans une résolution du Parlement européen !
Il doit savoir que si la santé de Baba Jan est gravement atteinte faute de soins en temps et en heure, il en sera tenu pour responsable !
Pierre Rousset