Un million de personnes ont manifesté, dimanche 9 juin à Hong Kong, pour protester contre un projet du gouvernement local d’autoriser les extraditions vers la Chine continentale. (France Info)
Dans une chaleur étouffante, les manifestants ont défilé dans les rues étroites de l’île principale, formant un cortège bruyant et brandissant des pancartes rouges « No extradition ».
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Ce projet des autorités hongkongaises pro-Pékin risque, selon les manifestants, de placer la population à la merci du système judiciaire chinois, accusé d’être opaque et politisé. Il a suscité une vague de critiques de la part de juristes, des milieux financiers et de diplomates occidentaux inquiets pour leurs ressortissants.
« La voix du peuple n’est pas écoutée », a dénoncé Ivan Wong, un étudiant de 18 ans. « Cette loi n’affectera pas seulement la réputation de Hong Kong en tant que centre financier international, mais aussi notre système judiciaire. Cela a des conséquences pour mon avenir ».
Le législateur James To, ancien combattant du Parti démocratique, s’en est pris à la cheffe de l’exécutif hongkongais, Carrie Lam. « Elle doit retirer le projet de loi et démissionner », a-t-il déclaré devant une foule dense réunie devant le Parlement et le siège du gouvernement.
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Plus d’un million de personnes selon les organisateurs ont manifesté dimanche à Hong Kong pour protester contre un projet du gouvernement local d’autoriser des extraditions vers la Chine continentale. (Libération)
Manifestations monstres « pour sauver ce qu’il reste d’autonomie à Hong Kong »
« Hong Kong ne cèdera jamais ! Nous choisissons l’état de droit, les droits de l’Homme et les libertés ! » Les grattes-ciel renvoient en écho la clameur de la foule massée ce dimanche sur la pelouse du parc Victoria, au cœur de l’île. Aux alentours, dans les grosses artères routières, les couloirs de métro, les trottoirs, une vague blanche déferle. Des manifestants par milliers, T-shirt blanc et bouteilles d’eau, convergent en début d’après-midi dans la touffeur subtropicale. Leur cible, le Parlement, et sur toutes les lèvres, une même revendication : le retrait d’un projet d’extradition vers la Chine qui porte en lui « l’arrêt de mort » des libertés de l’ex-colonie britannique.
A 14h30, devant l’affluence, la police ordonne une demi-heure plus tôt que prévu au cortège de s’ébranler. Dans ses rangs, des étudiants, des syndicats, des enseignants, des ONG, des catholiques, des artistes, des familles et énormément de jeunes, venus dire « Non à la légalisation des enlèvements de Hongkongais vers la Chine », « Non à la tactique de l’intimidation et de la peur permanente » et non aux autorités locales « pantins » du gouvernement central.
« C’est un moment crucial, jamais Hong Kong n’a été à ce point menacé », s’inquiète Ronny, étudiant de 25 ans.
Si le texte sur l’extradition est voté, « n’importe qui habitant ici ou transitant par ici peut être amené en Chine pour y être jugé. Les Chinois peuvent inventer n’importe quel crime contre vous. C’est vraiment terrifiant », explique l’étudiant.
Les Hongkongais pensaient pouvoir être protégés sur leur territoire grâce au principe « un pays, deux systèmes », qui leur garantit un large degré d’autonomie depuis la rétrocession à en 1997 et ce, en théorie, jusqu’en 2047. Mais les coups du butoir contre ces libertés se font de plus en plus violents. L’extradition vers la Chine continentale ébranlerait définitivement les fondations même de cette autonomie.
Meurtre
Tout est parti du meurtre sordide d’une Hongkongaise commis à Taiwan en février 2018. Le principal suspect, un Hongkongais, ne peut être extradé à Taiwan et ne peut pas non plus être jugé pour meurtre depuis Hong Kong du fait de la législation actuelle. Le gouvernement a sauté sur ce prétexte pour dégainer en février son projet si controversé qu’il entend faire adopter au pas de charge, si possible dès mercredi prochain, lors de l’examen du texte en seconde lecture au Parlement.
Le texte prévoit des extraditions, au cas par cas, vers les juridictions avec lesquelles Hong Kong n’a pas signé d’accord, dont la Chine continentale. Cela permettrait, selon le gouvernement de pallier un « vide juridique » et d’éviter que Hong Kong ne soit un « sanctuaire d’officiels chinois corrompus » et « un repaire de criminels ».
« Assez de vos p… de mensonges », rétorquaient dimanche des affiches de manifestants. Le gouvernement assure que l’appartenance religieuse, les opinions politiques ne seront pas un motif d’extradition, et que les libertés académiques, de la presse, les libertés d’expression ou de réunion seront préservées. Le gouvernement a même allégé sa copie pour exempter une série de crimes de col-blancs comme l’exigeaient les milieux d’affaires.
Mais la mobilisation monstre de dimanche montre l’ampleur des réticences : les organisateurs parlent d’un peu plus d’un million de manifestants, la police de 240 000.
Pétitions
Depuis des semaines, la défiance s’est organisée. Les pétitions tous azimuts se sont multipliées, des milliers d’avocats ont manifesté, des banderoles ont été déployées à flanc de montagne et sur les bords des routes. Même les milieux d’affaires et la communauté internationale ont rejoint le concert des critiques, Chris Patten en tête. Le dernier gouverneur britannique de Hong Kong a ainsi estimé jeudi que le projet d’extradition vers la Chine serait un « coup terrible » porté à l’état de droit, à la stabilité et la sécurité de Hong Kong, ainsi qu’à la réputation de place financière de l’ex-colonie britannique.
Longtemps les Hongkongais ont redouté l’application de l’article 23 qui proscrit la « trahison », la « sécession », « la subversion à l’encontre du gouvernement central ». Mais « aujourd’hui le projet d’extradition est largement pire », commentait dimanche le magnat de la presse Jimmy Lai, « car on sera jugé en Chine continentale où il n’y a pas d’état de droit et où les lois qui sont façonnées au gré des besoins du parti communiste ».
« Si le texte passe, il sera extrêmement risqué de faire affaire en Chine, y compris pour les étrangers. Au moindre désaccord, ils pourront fabriquer des accusations de toute pièce pour mieux piéger les gens et servir les plans du régime », accuse encore ce héraut du mouvement prodémocratie.
Le régime chinois utilisera-t-il cette arme ? « Impossible d’être optimiste avec le parti communiste chinois. Ils feront juste pire que ce qu’on imagine », redoute Jimmy Lai.
« Dernière ligne à défendre »
Vers 16h la tête du cortège atteint le Parlement, là même où avaient éclaté en 2014 les manifestations gigantesques en faveur d’élections libres. « L’atmosphère aujourd’hui ressemble aux prémices du mouvement des Parapluies » de 2014, estime la chanteuse Denise Ho, l’une des figures de cette mobilisation. Mais la fracture de la société est plus forte encore. « On est vraiment aujourd’hui sur notre dernière position, sur la dernière ligne à défendre pour sauver ce qu’il reste d’autonomie à Hong Kong », poursuit l’artiste.
La foule n’avait pas fait plier Pékin en 2014 mais elle avait fait reculer le gouvernement local en 2003 et son projet d’article 23. « Nous espérons que la rue aura raison cette fois », dit Denise Ho.
Rosa Brostra correspondante à Hongkong
Malgré l’opposition dans la rue, Hong Kong maintient son projet de loi autorisant les extraditions vers la Chine (France Info)
Une manifestation monstre a réuni dimanche plusieurs centaines de milliers de personnes contre ce texte.
La rue ne fait pas plier les autorités de Hong Kong. Le gouvernement pro-Pékin de l’ex-colonie britannique a annoncé, lundi 10 juin, qu’il ne comptait pas retirer le projet de loi qui permettra les extraditions vers la Chine. « C’est une loi très importante qui va permettre de faire triompher la justice et assurera que Hong Kong respecte ses obligations internationales en matière de criminalité transfrontalière et transnationale », a déclaré aux journalistes la cheffe de l’exécutif local Carrie Lam.
Les autorités hongkongaises tentent de faire adopter un texte très controversé qui doit permettre les extraditions vers toutes les juridictions avec lesquelles aucun accord bilatéral n’existe, y compris la Chine continentale. Ce projet de loi a suscité une levée de boucliers de toute une partie de la société hongkongaise qui dénonce le caractère opaque et politisé de la justice chinoise.
Une impressionnante foule a manifesté dimanche dans les rues de l’ex-colonie britannique en dépit de la moiteur subtropicale étouffante. Les organisateurs ont revendiqué un million de manifestants, la police en a décompté 240 000, ce qui en ferait la deuxième manifestation la plus importante depuis la rétrocession en 1997. Une mobilisation exceptionnelle qui constitue un énorme défi à pour Carrie Lam, qui n’est pas élue mais nommée.
Mais dans sa première prise de parole depuis cette manifestation, la cheffe de l’exécutif a promis que « l’examen en seconde lecture du projet de loi reprendra le 12 juin ». Carrie Lam a rejeté les affirmations selon lesquelles elle ne tiendrait pas compte de l’opinion, en soulignant que son gouvernement avait déjà fait de nombreuses concessions pour assurer que les libertés uniques de Hong Kong soient protégées et que le texte soit conforme aux exigences internationales en matière de protection des droits de l’homme.
VIDEO de la manifestation (LeHuffPost, avec Reuters et AFP)
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PHOTOS : les images de la manifestation historique de défense des libertés face à Pékin (Le Monde)
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Hongkong a vécu, dimanche, l’une de ses manifestations les plus importantes depuis sa rétrocession à Pékin, en 1997 : des centaines de milliers de personnes – 1,03 million selon l’un des organisateurs, 240 000 selon la police – ont marché contre un projet du gouvernement local d’autoriser des extraditions vers la Chine continentale.
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Dans une chaleur étouffante, les manifestants ont, pendant plus de sept heures, défilé dans les rues étroites de l’île principale pour dire leur hostilité au projet des autorités hongkongaises pro-Pékin.
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« Non à l’extradition », pouvait-on lire sur des pancartes rouges. Selon ses détracteurs, le projet de loi d’extradition placera la population à la merci d’un système judiciaire chinois opaque et politisé.
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Des militants ont entrepris un sit-in devant le Parlement, alors qu’à la nuit tombée, les manifestants continuaient d’affluer.
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Alors que la marche s’était déroulée sans incident, des heurts ont éclaté peu après minuit. Des manifestants ont jeté des bouteilles et se sont servis de barrières métalliques contre la police qui, avec bâtons et gaz poivre, tentait de chasser un petit groupe cherchant à rester devant la Conseil législatif, le Parlement local.
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Il s’agit de la plus grande manifestation de Hongkong depuis la rétrocession de l’ancienne colonie britannique à la Chine en 1997. Jusqu’à présent, la plus forte mobilisation avait eu lieu en 2003 lorsque le cap du demi-million de participants avait été atteint.
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Dimanche soir, le gouvernement de Hongkong a indiqué que le texte serait soumis comme prévu en session plénière du Parlement mercredi 12.
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Hong Kong maintient le projet de loi autorisant les extraditions vers la Chine (AFP)
Le gouvernement pro-Pékin de Hong Kong a annoncé lundi qu’il ne comptait pas retirer un projet de loi très controversé qui permettra les extraditions vers la Chine, au lendemain d’une manifestation monstre contre ce texte dans l’ex-colonie britannique.
« C’est une loi très importante qui va permettre de faire triompher la justice et assurera que Hong Kong respecte ses obligations internationales en matière de criminalité transfrontalière et transnationale », a déclaré aux journalistes la cheffe de l’exécutif hongkongais, Carrie Lam.
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Les autorités hongkongaises tentent de faire adopter un texte très controversé qui doit permettre les extraditions vers toutes les juridictions avec lesquelles aucun accord bilatéral n’existe, y compris la Chine continentale.
Ce projet de loi a suscité une levée de boucliers de toute une partie de la société hongkongaise qui dénonce le caractère opaque et politisé de la justice chinoise.
Dimanche, une impressionnante foule a manifesté dans les rues de l’ex-colonie britannique en dépit de la moiteur subtropicale étouffante.
Les organisateurs ont revendiqué un million de manifestants, la police en a décompté 240.000, ce qui en ferait la deuxième manifestation la plus importante depuis la rétrocession en 1997.
Cette marche, avec sa mobilisation exceptionnelle, a constitué un énorme défi à Mme Lam, qui n’est pas élue mais nommée.
Mais, dans sa première prise de parole depuis cette manifestation, la cheffe de l’exécutif a dit ne pas projeter de modifier la substance du texte, et encore moins de le retirer.
« L’examen en seconde lecture du projet de loi reprendra le 12 juin », a-t-elle dit.
Elle a rejeté les affirmations selon lesquelles elle ne tiendrait pas compte de l’opinion publique, en soulignant que son gouvernement avait déjà fait de nombreuses concessions pour assurer que les libertés uniques de Hong Kong soient protégées et que le texte soit conforme aux exigences internationales en matière de protection des droits de l’Homme.
« Mon équipe et moi n’avons pas ignoré les opinions exprimées au sujet de ce texte de loi très important », a-t-elle dit à la presse. « Nous avons écouté avec beaucoup d’attention. »