La province de Bulacan, proche de la capitale des Philippines (Manille), est devenue selon l’organisation Amnesty International, le “plus sanglant champ de la mort” dans la guerre contre la drogue mise en œuvre par le gouvernement du président Rodrigo Duterte, note The Philippines Daily Inquirer.
Selon l’organisation, Bulacan connaît une augmentation du nombre de tués depuis un an. Une augmentation qui, selon l’association des droits de l’homme, pourrait être liée au transfert d’un certain nombre d’officiers de police impliqués dans des assassinats dans la capitale.
Des pauvres et des marginalisés pris pour cibles
Amnesty International a enquêté à Bulacan sur 20 affaires de drogues dans lesquelles 27 personnes ont été tuées. L’enquête indique que la majorité des personnes tuées sont pauvres ou marginalisées.
Amnesty International relève que le nouveau chef de la police provinciale est Chito Bersaluna. En août 2017, il était responsable du district de Manille, où a été tué un adolescent de 17 ans, Kian delos Santos.
Dans cette affaire, des enregistrements vidéo avaient permis de contredire la version de la police, qui plaidait la légitime défense. La vidéo montrait que l’adolescent avait été exécuté froidement. Trois policiers subalternes ont été jugés et condamnés à une peine de prison à perpétuité. Chito Bersaluna n’a eu, déplore Amnesty International, qu’une simple sanction administrative.
La sénatrice Leila de Lima a d’ailleurs demandé que le Sénat ouvre une enquête sur “l’augmentation soudaine du nombre de suspects tués dans des opérations de police contre la drogue”, dans la région de Central Luzon, où est située la province de Bulacan, précise le quotidien philippin.
Selon les données de la police, 542 suspects ont été tués dans les 7 provinces de la région de Central Luzon, ce qui, aux yeux de la sénatrice, fait de la région le “nouvel épicentre des assassinats”.
À titre de comparaison, la sénatrice fait observer que ce bilan est près de deux fois plus lourd que celui des 285 personnes tuées dans la capitale l’année dernière.
À quand une enquête des Nations unies ?
Amnesty International demande que les Nations unies et le Conseil des droits de l’homme se saisissent du dossier de la guerre contre la drogue conduite aux Philippines depuis la prise de fonction du président Rodrigo Duterte en juin 2016.
Selon les autorités, plus de 6 500 personnes ont été tuées dans les opérations de lutte contre le trafic de stupéfiants. Un chiffre sous-estimé selon les organisations de droits de l’homme et les enquêtes conduites par plusieurs journalistes, qui évaluent à plus de 20 000 le nombre de personnes tuées dans des opérations policières.
Courrier International
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