solidaritéS tient également à apporter son soutien à Marjo Blanchet, membre du mouvement pris à parti suite à un débat à l’émission Forum sur les ondes de La Première au sujet de l’institutionnalisation préoccupante des associations LGBTIQ, et se joint pleinement à ses propos.
Ville et Canton peuvent faire bien mieux
S’il est vrai que, comme les associations LGBT l’ont affirmé en condamnant l’action, la Ville et le Canton de Genève soutiennent un certain nombre d’initiatives en faveur des personnes LGBT, cela ne suffit pas ! Et cela n’est en tout cas pas une raison suffisante pour condamner un acte que solidaritéS estime légitime.
Les actions publiques entreprises en faveur des LGBTIQ aujourd’hui sont clairement insuffisantes. Elles se cantonnent souvent au soutien des droits des gays et des lesbiennes, oubliant les droits des personnes transgenres, des bisexuel-le-s ou encore des intersexes. De plus, si la Ville et le Canton font leurs, au niveau politique, des revendications qui sont d’ores et déjà largement soutenues (mariage pour tou-te-s, congé maternité pour parents gays, ...), ces institutions ont plus de peine à prendre des positions courageuses ou ambitieuses dans d’autres domaines.
Passer à la vitesse supérieure
Il reste en effet beaucoup de travail avant que Ville et Canton puissent se targuer d’être exemplaires en matière de politiques LGBTIQ. Concernant la lutte contre les discriminations, le suicide et le mal-être chez les jeunes LGBTIQ, il a fallu se battre pour faire accepter un projet de loi EàG visant à imposer de la prévention dans tous les établissements scolaires. On peut aussi citer l’absence de politique volontariste en matière de santé sexuelle des personnes LGBTIQ (projet EàG en cours de traitement), l’absence des personnes transgenres dans l’article constitutionnel sur l’égalité (projet EàG en cours de traitement), les politiques trop timides en faveur des migrant-e-s LGBTIQ ou encore l’impunité - voire la justification - des agressions LGBTIphobes dont certains policiers se sont récemment rendus coupables.
Les personnes LGBTIQ sont en droit d’attendre que la Ville et le Canton fassent plus que de subventionner des associations ou des projets, totalement indispensables mais aujourd’hui encore insuffisants, ou dessinent des arcs-en-ciel sur les trottoirs. Il est temps de passer à la vitesse supérieure et de mettre sur pied de véritables politiques publiques globales, de l’école au travail, en passant par les clubs de sport, la rue, les institutions et les prisons, en faveur des personnes LGBTIQ. Une dizaine de projets déposés par EàG au Grand Conseil représentent un premier pas dans ce sens mais la route est encore très longue.
De bien cruels Réformateurs
Par ailleurs, il faut également rappeler ici que les Réformateurs que les institutions ont décidé de mettre à l’honneur au Parc des Bastions ont mis en place, perpétué et cautionné des politiques d’une violence extrême envers les personnes homosexuelles. En effet, que ce soit au temps de Calvin, de De Bèze, des hommes et des femmes ayant eu des relations sexuelles avec des personnes de même sexe ont été noyées, pendues ou encore brûlées aux côtés de prétendues sorcières et d’humanistes.
A l’époque déjà, des voix s’élevaient afin de dénoncer de telles pratiques. Si l’on peut certes contextualiser historiquement les violences barbares, dont les autorités politiques et religieuses genevoises se sont rendues coupables au XVIe siècle, on est par contre en droit de s’attendre à ce que l’action de la semaine dernière suscite au moins une réflexion au sujet de la manière dont la Genève de 2019 souhaite se souvenir de ces actes de cruauté et de leurs auteurs, dans les livres d’histoire comme dans l’espace public.
Peindre Genève aux couleurs de l’arc-en-ciel
Pour toutes ces raisons, et parce que c’est en grande partie par la lutte que les droits des personnes LGBTIQ ont été péniblement acquis durant les dernières décennies, des actions telles que celle du Mur des Réformateurs ne peuvent être sommairement condamnées. Les quelques pots de peinture déversés ne sont rien face aux souffrances que subissent bon nombre de personnes LGBTIQ au quotidien à Genève. Ils ne sont rien non plus face à l’atrocité de la mort que ces illustres notables ont réservé aux personnes homosexuelles ou « déviantes » de l’époque.
solidaritéS combat au quotidien, dans la rue, sur les lieux de travail et dans les institutions, les discriminations et les violences pratiquées en raison de l’orientation sexuelle, de l’identité de genre, du sexe, de la « race » ou du statut social des personnes. C’est pourquoi nous tenons à affirmer notre solidarité à l’ensemble des mouvements sociaux et des militant·e·s individuel-le-s qui poursuivent ces mêmes objectifs, au besoin en recourant à des actions symboliques ou à la désobéissance civile non violente.
solidaritéS