Le gouvernement espagnol a adopté pour le secteur du bâtiment un nouveau code technique stipulant notamment que les besoins en eau chaude sanitaire de toutes les constructions, neuves ou rénovées, devront être couverts par l’énergie solaire dans une proportion de 30 à 70%. Voté en mars dernier, le nouveau code entre en application dès ce mois d’octobre. Le recours au solaire thermique dans la construction est déjà obligatoire dans certains pays extra-européens (Israël par exemple), mais aucun gouvernement de l’UE n’avait encore franchi le pas.
Outre le recours minimum au solaire comme source d’énergie thermique, le nouveau code impose une série de critères de base en matière de demande générale d’énergie, de performance des installations thermiques et d’efficacité énergétique des dispositifs d’éclairage. De plus, des dispositions sont prises afin de garantir une contribution minimale des systèmes photovoltaïques à la consommation d’électricité. C’est ainsi que l’installation de panneaux photovoltaïques (utilisant la propriété des semi-conducteurs de générer du courant électrique à partir de l’énergie lumineuse) devient obligatoire sur les centres commerciaux, les bâtiments industriels, les hôtels et les hôpitaux dont la surface bâtie est supérieure à 3.000 m2.
L’Institut Espagnol pour la Diversification Energétique (IDAE) estime que ces décisions auront pour effet de réduire de 30 à 40% la consommation énergétique du secteur du bâtiment, et de 40 à 55% les émissions correspondantes de gaz à effet de serre dans le secteur de la production d’énergie. Tous ces efforts s’inscrivent dans le cadre du Plan Energie Renouvelable adopté par Madrid et qui court jusqu’en 2010. A terme, cinq millions de mètres carrés de panneaux solaires thermiques seraient installés, tandis que la capacité des systèmes photovoltaïques passerait de 143 à 400 MW.
Mieux vaut tard que jamais, dira-t-on. Certainement… Mais on peut s’interroger sur les raisons qui expliquent que l’Espagne ait mis si longtemps à découvrir… le soleil ! Le pays subit depuis plusieurs années une sécheresse croissante, le potentiel hydroélectrique est menacé, l’approvisionnement en eau est un sujet de tensions économiques et sociales, le Sud est en voie de désertification… Faut-il vraiment la conjonction d’une hausse durable des prix du pétrole et d’une menace climatique de plus en plus palpable pour que le gouvernement d’un pays développé, disposant de ressources humaines et économiques importantes, se décide enfin à prendre les (premières) mesures qui s’imposent ? Quant au rythme d’introduction de ces mesures, faut-il vraiment qu’il soit subordonné à la rentabilité des entreprises, à la compétitivité ? Comme si la loi du profit était aussi « naturelle » que la gravitation universelle ? Plutôt que cette politique de gribouille, ne serait-il pas temps de réhabiliter les notions de planification économique et d’initiative publique, de service public, dans l’intérêt général ? L’énergie, après tout, est un patrimoine collectif…
Valables pour l’Etat espagnol, ces questions se posent a fortiori dans le cas des autres pays européens, car ceux-ci n’ont même pas commencé à agir sérieusement. On pense spontanément à l’Italie, à la Grèce, au Sud de la France, au Portugal, parce qu’il s’agit de régions bien ensoleillées. Mais le rayonnement solaire est présent partout. Les pays d’Europe où la capacité de production d’électricité photovoltaïque est la plus utilisée sont d’ailleurs… le Grand Duché de Luxembourg et l’Allemagne. Viennent ensuite – loin derrière – les Pays-Bas, l’Autriche et l’Espagne. Et nos régions dans tout cela ? La Wallonie compte à peine 20.000 m2 de panneaux solaires (thermiques pour la plupart). N’en déplaise au ministre André Antoine, il n’y a vraiment pas de quoi se gonfler comme un dindon écologiste...