Présentation
Le communiqué publié le samedi 12 octobre par l’Alliance des socialistes du Moyen Orient et d’Afrique du Nord dénonce l’intervention et l’occupation militaire de l’armée turque et appelle à la solidarité Internationale.
Quelques changements depuis la date de publication : Plus de 130,000 civils ont fui les régions bombardées et menacées par l’invasion turque, tandis qu’environ 60 civils ont été tués depuis le début de l’agression militaire. Des exactions de groupes réactionnaires syriens à la solde d’Ankara ont déjà eu lieu contre des civils dans les zones conquises depuis le début des opérations.
Surtout, face à la menace d’un nouveau massacre, les Forces Démocratique Syriennes ont conclu un accord avec le régime despotique de la famille Assad à Damas, soutenu par Moscou, « pour permettre le déploiement de l’armée syrienne près de la frontière turque, afin de faire face à l’agression turque et empêcher qu’elle se poursuive, » selon leurs dirigeants. Comme l’a déclaré Mazloum Abdi, commandant en chef des FDS, « Nous savons que nous devrons faire des compromis douloureux avec Moscou et Bachar al-Assad si nous décidons de travailler avec eux. Mais si nous devons choisir entre les compromis et le génocide de notre peuple, nous choisirons certainement la vie pour notre peuple », tout en déclarant n’avoir pas confiance dans les promesses des dirigeants syriens et russes…
Joseph Daher
Non à l’invasion et l’occupation du Nord Est de la Syrie par l’armée turque
Après l’annonce du retrait des troupes des Etats-Unis du Nord-Est de la Syrie, le gouvernement autoritaire et réactionnaire d’Ankara, après avoir bombardé les régions et villes frontalières, a lancé le mercredi 9 octobre le début de son opération militaire terrestre dans le nord-est de la Syrie, région contrôlée par les Forces Démocratiques Syriennes (FDS), alliance militaire de combattants kurdes, arabes et assyriens, dominée par les forces kurdes des Unités de protection du peuple (YPG), branche militaire du mouvement kurde du Parti de l’Union Démocratique (connu sous l’acronyme kurde du PYD), considérées par Ankara comme une organisation « terroriste » en raison de ses liens avec le Parti des Travailleurs du Kurdistan (PKK).
Plus de 100 000 civils ont déjà fui les zones bombardées et menacées par l’invasion turque. 200 000 autres sont menacés de déplacement.
L’offensive de l’armée turque est menée en coopération avec des combattants syriens de ladite « Armée nationale syrienne (ANS) », une coalition de groupes réactionnaires et fondamentalistes islamiques, financée et entraînée par la Turquie, qui a déjà commis de nombreuses violations des droits humains, notamment dans la région d’Afrin, occupée par l’armée turque.
Cette opération militaire est la troisième incursion de l’armée turque en Syrie, depuis 2016 : la première, en août 2016, a été intitulée « Bouclier de l’Euphrate » ; la seconde, en janvier 2018, dénommée « Branche d’olivier », a abouti à l’occupation de la région d’Afrin en mars de la même année, entraînant le déplacement forcé de plus de 150 000 personnes, en grandes majorité des Kurdes, et de nombreuses violations des droits humains qui sont toujours en cours.
L’agression militaire s’inscrit dans la continuité de la guerre menée par le gouvernement d’Ankara contre les mouvements de libération kurde et leurs représentant·e·s en Turquie, notamment du Parti démocratique des peuples (connu sous le nom de HDP), et dans les pays voisins.
Un autre objectif du gouvernement turc est de transférer de force des réfugié·e·s syriens de Turquie vers les régions situées au nord-est syrien en expulsant de là les populations kurdes. Durant l’été 2019, le gouvernement turc a accéléré ses campagnes d’expulsion forcée de réfugié·e·s syriens. Des milliers d’entre eux-elles ont été déportés en masse ou renvoyés de force sur le territoire syrien depuis la mi-juillet. Le président turc Recep Tayyip Erdogan a d’ailleurs menacé « d’envoyer » des millions de réfugié·e·s syriens de Turquie vers Europe en réponse aux critiques européennes contre son offensive. Ankara instrumentalise une nouvelle fois les réfugié·e·s syriens comme une marchandise politique dans ses relations avec l’Union Européenne, qui est de son côté coupable de maintenir sa politique meurtrière de fermeture des frontières.
L’objectif de la Turquie est d’établir une zone de contrôle le long de sa frontière afin de pouvoir gérer les flux de personnes déplacées, de rapatrier de force les réfugié·e·s se trouvant en Turquie et d’attaquer les forces kurdes du PYD et les FDS afin d’écraser toute forme d’autodétermination kurde à proximité de ses frontières.
L’invasion turque du nord est de la Syrie renforcera également très probablement la résurgence des divers groupes djihadistes, notamment du soi-disant « État islamique ». Le 11 octobre, des militants de l’EI se sont échappés d’une prison gérée par les FDS. Le groupe djihadiste a revendiqué le même jour l’explosion d’une attaque à la bombe dans la ville de Qamichli.
L’Alliance des socialistes du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord condamne également le rôle de la Coalition nationale des forces de la révolution et de l’opposition syriennes (appelée Etilaf), composée principalement de groupes et de personnalités libérales, conservateurs et de mouvements fondamentalistes islamiques, ainsi que d’autres groupes réactionnaires syriens, tels que les Frères musulmans, dans leur soutien aux à l’opération militaire turque contre les régions du nord-est. Ils poursuivent leur discours et politique chauvine et raciste contre les Kurdes en Syrie.
Nous exprimons notre solidarité avec les civils du nord-est de la Syrie et du reste du pays. La population d’Idlib, dans le nord de la Syrie, continue en effet de subir les bombardements aveugles du régime d’Assad, du gouvernement russe et du gouvernement états-unien.
Nous condamnons cette nouvelle opération militaire et cette occupation des forces turques dans le nord-est de la Syrie, menée avec la complicité de l’administration Trump. Nous soutenons la résistance populaire et progressiste, à la fois militaire et civile, à l’invasion turque du Nord Est de la Syrie.
Nous dénonçons également les interventions et la présence d’autres forces étrangères en Syrie (Iran, Russie et Etats-Unis). Toutes ses puissances internationales impérialistes et régionales sont des ennemis de la libération et de l’émancipation des peuples de la région...
L’Alliance des socialistes du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord réitère son soutien à l’auto-détermination du peuple kurde en Syrie, et dans les autres pays de la région.
Nous rappelons également notre opposition à la dictature du régime syrien du clan Assad et aux mouvements fondamentalistes islamiques, qui constituent les deux principaux camps de la contre-révolution en Syrie.
Face à ces offensives contre-révolutionnaires continues et destructrices, la meilleure défense est la solidarité internationale et internationaliste. Nous soutenons les populations en Syrie et ailleurs dans le monde qui luttent pour leur autodétermination. Le combat est universel !
Alliance des socialistes du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord
12/10/2019