Ces dernières années, le Front national tenait un discours centré sur le tout-sécuritaire et dénonçant l’immigration. Cette idéologie ayant largement contaminé la vie politique, le FN privilégie désormais une offensive sur le terrain social. Sa posture s’appuie sur une critique des politiques libérales menées par les gouvernements qui se sont succédé depuis plus de vingt ans. Le chômage, la précarité, la remise en cause de la protection sociale et des services publics, la stigmatisation de fractions entières de la population, les attaques sans précédent contre les droits individuels et collectifs des salariés : tout cela engendre un désespoir massif. Quand Nicolas Sarkozy propose le programme du Medef et que Ségolène Royal ne propose que l’accompagnement social du libéralisme, des millions d’hommes et de femmes en viennent à croire qu’un Le Pen améliorera leur situation. Mais ils se trompent. Loin de défendre « les petits contre les gros », le programme du FN aggrave les inégalités, favorise les plus riches et désigne des boucs émissaires.
Loin d’être anecdotique, le FN est le seul parti qui propose d’inscrire une forme d’apartheid dans la Constitution. La « préférence nationale », présentée comme réponse au fantasmatique « problème de l’immigration », apparaît comme l’outil principal pour réaffecter les finances d’un État réduit à ses fonctions régaliennes et répondre aux besoins sociaux, qu’il s’agisse de l’emploi, du logement, de la protection sociale... Selon cette théorie de l’exclusion, il est « normal » qu’on donne priorité aux Français dans tous les domaines. Or, la « redistribution sociale » du FN ne se ferait qu’au bénéfice d’une infime partie de la population.
Le FN entend réduire l’impôt sur les grandes fortunes, celui sur les sociétés et les prélèvements sur les plus-values boursières. Il veut supprimer les droits de succession et, à terme, l’impôt sur le revenu qui, par sa progressivité, est l’impôt le moins inégalitaire. Logiquement, le FN veut intensifier la politique d’exonération des « charges sociales » patronales pour, prétendument, favoriser l’embauche. Il reprend ainsi cette idée libérale selon laquelle la baisse du coût du travail favoriserait l’emploi. C’est oublier qu’aujourd’hui les entreprises qui font des profits licencient pour en faire davantage.
Le FN entend pousser encore plus loin les logiques libérales respon sables du désastre actuel. Ses propositions visent à donner les pleins pouvoirs aux patrons et à détruire l’ensemble du droit du travail : le temps de travail serait allongé ; l’âge légal de la retraite serait repoussé à 65 ans ; les droits du salarié au moment de l’embauche et lors du licenciement seraient déréglementés ; les syndicats seraient remplacés par des organisations professionnelles, où salariés et employeurs se « réconcilieraient » ; le droit de grève deviendrait quasiment impossible ; les femmes seraient poussées hors de l’entreprise pour être réduites au seul rôle de mère et d’épouse - un « statut social de la mère de famille » serait créé et un « revenu parental d’éducation » serait mis en place.
Le FN entend subordonner la protection sociale à la nationalité de ses bénéficiaires et « favoriser l’exercice libéral de la médecine » : la couverture maladie universelle (CMU) et l’aide médicale d’État (AME) seraient remises en cause ; cha que salarié devrait obligatoirement recourir à des organismes privés en matière de retraites et de maladie ; la nomenclature des actes médicaux serait supprimée ; le prix des médicaments libéré ; le RMI supprimé...
Faire reculer Le Pen et le Front national est une nécessité vitale. La mobilisation la plus large et la plus unitaire représente l’arme la plus efficace pour empêcher sa banalisation. Faire reculer le FN, c’est également faire émerger une gauche de combat, anticapitaliste, défendant en toute occasion les mesures d’urgence correspondant aux besoins insatisfaits du plus grand nombre. Une gauche qui veuille faire passer les intérêts de tous les travailleurs avant les profits.
Tract LCR du 26/02/07
Le Pen : les mensonges et impostures de l’extrême-droite !
Le Pen présentait ce week-end, à Lille, son programme électoral. Soucieux, sans doute, de ne pas laisser le terrain de la démagogie populiste à son rival Sarkozy, il a prétendu vouloir défendre « les petits, les obscurs, les sans-grade, travailleurs pauvres ou retraités ». S’il n’a pas cru utile, lui, de se revendiquer de Jaurés, il a dénoncé « un capitalisme prédateur », « cette mondialisation menée à marche forcée sous tous les gouvernements » et fait l’éloge de ceux qui « arrachèrent de haute lutte les droits essentiels du travailleur aux patrons de droit divin ». Aveuglé par son cynisme, il oublie de dire que les travailleurs du Nord, bien souvent immigrés ou fils d’immigrés, l’ensemble des travailleurs de ce pays, d’Allemagne, d’Europe ou d’autres pays ont conquis leurs droits en se battant non seulement contre le patronat mais aussi contre l’extrême-droite qui fut toujours du côté des classes dominantes. Le Pen appartient à cette famille politique de l’extrême-droite fasciste qui dénonçait les 40 heures à l’époque du Front populaire, avant de tomber dans les bras de Pétain et d’Hitler.
Le milliardaire au service des possédants
Et, dans les faits, son programme est sans ambiguïté : « la relance économique et le retour à la croissance par la suppression des contraintes qui pèsent sur les entreprises, particulièrement les PME. » Il se veut le candidat de la « libération du travail de l’étatisme, du fiscalisme et du réglementarisme », c’est-à-dire le libéralisme, sans retenue, de Sarkozy et du Medef. Ce défenseur du peuple n’a pas un mot pour les salaires, contre les licenciements, pour les droits des travailleurs. Sa réponse au chômage, c’est la fin de « l’étatisme et du réglementarisme », c’est-à-dire la liberté de licencier. Pour le pouvoir d’achat, tout comme Sarkozy, il faut travailler plus... La retraite, il la veut à 65 ans, au plus tôt, avec la possibilité de travailler bien au-delà... Pour l’Education nationale, il vante « les mérites de la sélection », veut « la suppression de 20 000 personnels administratifs et techniques ».
Flatter la peur et la haine
Tout ce qu’il a à vendre aux classes populaires, c’est la démagogie xénophobe et raciste comme exutoire à la révolte et au désespoir, le poison de la division, du nationalisme. La solution à tous les maux serait « l’arrêt de l’immigration avec l’application du principe de préférence nationale » ! Ce mythe stupide et démagogique n’a qu’un but : dresser une partie des classes populaires contre une autre, dévoyer la révolte contre les plus faibles, les plus démunis. Si une telle politique devait être réellement mise en œuvre, cette folle démagogie signifierait transformer le pays en prison pour ses propres citoyens. Ce serait un régime policier, tourné contre ceux-là même que Le Pen prétend protéger, une régression aux conséquences dramatiques. La réponse aux ravages de la mondialisation financière n’est pas dans un repli sur soi qui non seulement ne protégerait les travailleurs de rien mais au contraire se retournerait contre eux.
Droits sociaux et démocratie
C’est ensemble, par-delà les vieilles frontières héritées du passé, au mépris de ceux qui voudraient les diviser au nom « de la préférence nationale » que les travailleurs français, allemands, anglais ou espagnols pourront refuser d’être sacrifiés au nom des intérêts des actionnaires d’Airbus et d’EADS. La réponse au capitalisme prédateur et aux menaces de l’extrême-droite, c’est la lutte pour les salaires, l’interdiction des licenciements, la défense des services publics, c’est-à-dire la remise en cause du pouvoir des milliardaires, de leur mainmise sur l’économie pour imposer le partage des richesses.