Les rues des plus grandes villes du monde désertes : cela restera parmi les images les plus frappantes de la pandémie de Covid-19. Pour limiter la propagation du virus, les gouvernements du monde entier ont décrété des confinements. À Lagos, la ville la plus peuplée du continent africain et principal foyer d’infection du pays, les autorités tentent de faire de même. La menace épidémique de ce virus hautement contagieux, dans une ville où vivent plus de 20 millions de personnes sur une superficie égale à celle d’Indianapolis – qui, elle compte 850 000 habitants – a de quoi inquiéter. Mais le confinement de Lagos s’annonce comme une tâche digne des travaux d’Hercule.

Lagos, c’est avant tout une activité incessante et un climat d’effervescence. Lagos, c’est une ville où le culot et l’ingéniosité sont rois, où les gens doivent apprendre à survivre. Ici, le quotidien rime avec système D, tout est à la limite de la légalité. Il n’est pas rare de voir des voitures rouler du mauvais côté de la route pour échapper aux immenses bouchons de la ville. . Parfois, des tentes surgissent sur la route et bloquent la circulation pour une fête improvisée avec plusieurs centaines d’invités. Pour les habitants de Lagos, il s’agit moins d’actes illégaux que d’ingénieuses trouvailles.

Une ville sans frontière, des habitants incalculables

Au-delà des différences de culture et de comportement, les autorités seront également confrontées à l’influence de la religion – la communauté chrétienne du Nigeria est la plus importante d’Afrique. La ville de Lagos abrite certaines des plus grandes méga-églises du pays, qui rassemblent des millions de fidèles tous les dimanches. Certains signes laissent déjà entrevoir des tensions entre les autorités politiques et les chefs religieux : “Nous pensons que nous n’en arriverons jamais à une situation où il faudrait fermer les églises et suspendre tous les offices”, a déclaré le porte-parole de la Christian Association of Nigeria à Lagos. Les mêmes questions se posent pour la communauté musulmane – la cinquième la plus importante du monde – à propos des prières du vendredi dans les mosquées.

Pour faire respecter le confinement de la population, bon nombre de gouvernements ont pris des mesures pour compenser la perte de salaires des travailleurs, en suspendant le paiement de certains impôts ou en proposant des aides financières. Mais là encore, comment mettre cela en œuvre à Lagos ? À cause des défaillances du système administratif, nul ne sait combien de personnes vivent dans cette ville dont les banlieues tentaculaires débordent sur les régions voisines. Sans compter qu’il faut aussi avoir les moyens d’offrir ces aides à 21 millions de personnes. Si l’on se fie aux événements récents, il y a de quoi être pessimiste. Après une tragique explosion au gaz mi-mars [qui a fait 19 morts, des dizaines de blessés et a ravagé un quartier entier], les autorités ont ouvert un fonds de soutien aux victimes afin de payer leurs factures de santé et de les aider à trouver un autre logement. Pour l’alimenter, c’est aux habitants qu’il a été demandé de faire un don.

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Yomi Kazeem

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