La moitié des femmes reste à la maison pour garder leur enfant, et seulement 10 % des enfants sont accueillis en crèche faute de place. Une majorité écra sante de femmes se retrouvent seules devant « leur » problème de garde. On voudrait nous faire croire qu’il s’agit d’un problème personnel et culpabiliser les femmes, mais il s’agit là d’un problème de société, la garde des enfants concernant toute la société.
Rappelons que 80 % du travail domestique est effectué par les femmes, 54 % des chômeurs sont des femmes, 85 % des salariés à temps partiel sont des salariées. Ce temps partiel imposé, dont la majorité des femmes ne veut pas, apparaît comme une réponse immédiate pour gérer la double journée de travail. Également, avec l’appât de l’allocation parentale d’éducation, on constate, pour la première fois depuis 40 ans, un retour des femmes à la maison, alors que six sur dix souhaiteraient retravailler. Les gouvernements ont toujours privilégié la multiplication des aides individuelles. Ils en tirent deux avantages : la baisse des chiffres du chômage (les femmes restant à la maison), l’absence de crèches à construire et financer.
N’oublions pas la récente mesure du ministre de la Famille, qui remet en cause le congé maternité et propose de reporter deux semaines du congé prénatal sur le congé postnatal, afin de simplifier les problèmes de structures, au risque de mettre en cause la santé de la mère et de l’enfant. Le ministre promet 40 000 places, mais il en manque entre 1 et 2 millions ! Dans le même temps, le budget de la Caisse nationale d’allocations familiales (Cnaf) est sérieusement revu à la baisse.
Depuis 2003, les caisses d’allocations familiales (CAF) doivent aussi payer les crè ches privées. De même, l’école maternelle est sacrément menacée. Actuellement, il y a plus de suppressions de classe en maternelle qu’en primaire. Le taux de scolarisation des 2 à 3 ans est passé de 36 % à 21 % en dix ans. La volonté d’alignement de la France sur les autres pays d’Europe introduirait une régression énorme : reculer l’âge de la scolarisation obligatoire à 6 ans au lieu de 5 amènerait la disparition des petites et moyennes sections des écoles maternelles.
Un grand service public de la petite enfance, un regroupement des modes de garde dans un seul et même service sont une nécessité pour les femmes, pour les tout petits, pour la société. La mixité du personnel doit être un impératif, car nous aspirons à une société égalitaire, où les individus des deux sexes contribuent à égalité aux tâches domestiques.
Cela implique des actes concrets pour un plan de construction de crèches, la création de postes dans tous les corps de métiers, dans le cadre de la fonction publique, pour le fonctionnement et, par là même, des choix financiers concrets, avec les mêmes droits dans tous les quartiers et les régions. La décentralisation actuelle nie ce droit à l’égalité, en laissant l’initiative aux collecti vités territoriales, qui y répondent en fonction de leurs richesses et de leurs choix politiques. Le redéploiement des aides individuelles dans un budget collectif, la contribution des entreprises et, surtout, une autre répartition des richesses peuvent servir au financement. Une seule solution : la mobilisation pour un grand service public national de la petite enfance, qui serait un dispositif décisif pour l’autonomie des femmes, leur indépendance et leur émancipation, pour marcher vers la société égalitaire à laquelle nous aspirons. Il y a urgence sociale !
• CNDF, « Pour un véritable service public de la petite enfance », 01 43 56 36 44.