La multiplication des hommages envers les infirmiers et les médecins noirs et asiatiques le laissaient penser. Un rapport officiel est venu le confirmer, mardi 2 juin. Les personnes issues de minorités ethniques sont frappées de manière disproportionnée par le Covid-19, en Angleterre.
Dans les détails, “les personnes d’origine bangladaise risquaient deux fois plus de succomber au Covid-19 que les Britanniques blancs, tandis que ce risque était de 10 à 50 % plus élevé pour les personnes d’origine chinoise, indienne, pakistanaise et les personnes noires d’origine antillaise ou d’autres pays”, souligne le rapport de Public Health England, relayé par le Financial Times. Les conclusions, précise le journal financier, ont été atteintes après la prise en compte des facteurs d’âge, de sexe, de dénuement et de lieu de vie. “L’un des premiers clichés qui a été véhiculé pendant la crise a été l’idée que le virus ‘ne faisait pas de distinction entre les individus’, rappelle The Guardian. À la lecture de ce rapport, il incombe aux autorités de méditer sur ce sujet et d’agir, car en réalité, les distinctions sont nombreuses.”
Une forte présence dans le secteur médical
Les facteurs explicatifs de ce déséquilibre sont multiples et complexes, admet le journal classé à gauche. Le premier réside dans la plus grande exposition de ces populations au virus. Au cours du confinement, nombre d’entre elles ont continué à travailler, souvent en contact avec le grand public. “32 % des Africains noirs et 26 % des Antillais en âge de travailler sont employés dans des secteurs essentiels, contre 21 % des Britanniques blancs”, souligne le site UnHerd. La proportion est encore plus élevée dans le secteur médical, note The Daily Telegraph : “Les personnes noires, asiatiques et issues de minorités ethniques ne représentent que 13 % de la population en Angleterre et au pays de Galles, mais 44 % des médecins de la NHS et 24 % des infirmières. Et parmi les 169 soignants décédés du Covid-19, 63 % étaient issus des minorités.”
Ensuite, les minorités sont surreprésentées dans les grands centres urbains, comme Londres et Birmingham, particulièrement frappés par l’épidémie. “Des foyers surpeuplés exacerbent la propagation de la maladie, en famille comme en colocation, ajoute UnHerd. Au Royaume-Uni, moins de 2 % des Britanniques blancs vivent dans des logements où il y a plus d’habitants que de pièces, mais ce chiffre est de 16 %, 18 % et 30 % respectivement au sein des populations de Noirs, de Pakistanais et de Bangladais.” En conclusion, le rapport note que “le virus a reproduit des inégalités existantes en matière de santé et les a parfois accentuées”. Problème, regrette le Financial Times, aucune piste n’est donnée pour remédier à la situation.
L’âge, facteur déterminant
De son côté, The Daily Telegraph préfère nuancer. “La principale disparité identifiée est celle de l’âge, car les personnes âgées d’au moins 80 ans risquent 70 fois plus de mourir si elles contractent le Covid-19 que les personnes de 40 ans ou moins, souligne le quotidien conservateur. Et bizarrement, le rapport exclut de son calcul les comorbidités et l’obésité, ce qui, selon d’autres études, réduit l’écart entre groupes ethniques. Cette nuance est essentielle si l’on veut que cette étude aboutisse vraiment à une meilleure protection des groupes vulnérables, au lieu de s’en tenir à de vaines déclarations démagogiques.”
Sasha Mitchell
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