Google, Facebook et Twitter ont annoncé qu’ils n’allaient plus répondre aux demandes de divulgation d’informations sur leurs utilisateurs émanant des autorités de Hongkong.
Pour plusieurs géants de l’Internet, une ligne rouge semble avoir été franchie. Quelques heures avant que la chef de l’exécutif hongkongais s’exprime pour défendre une loi sur la sécurité nationale imposée par la Chine, Google, Twitter et Facebook (dont le service de messagerie WhatsApp) ont annoncé, dans la nuit du 6 au 7 juillet, qu’ils ne répondront plus aux demandes de divulgation d’informations sur leurs utilisateurs émanant du gouvernement et des autorités de Hongkong.
« Nous pensons que la liberté d’expression est un droit humain fondamental et nous soutenons le droit des personnes à s’exprimer sans craindre pour leur sécurité et sans redouter d’autres répercussions », a déclaré un porte-parole de Facebook à l’Agence France-Presse (AFP). Twitter a également fait part à l’AFP de ses « graves inquiétudes » au sujet de cette loi.
Ils ne sont pas seuls dans leur démarche. Le réseau social professionnel LinkedIn, propriété de Microsoft, a également fait une annonce similaire. Même chose pour la messagerie russe Telegram, et une autre messagerie, Signal, a assuré qu’elle n’avait jamais livré la moindre information sur ses utilisateurs et compte continuer dans ce sens.
Le réseau social TikTok (détenu par l’entreprise chinoise ByteDance), qui depuis plusieurs mois essaie de se démarquer et de moins lier son image à celle de Pékin, est allé encore plus loin et a annoncé la suspension de son application à Hongkong à cause de cette loi.
Apple indique de son côté être en train d’évaluer cette nouvelle loi, mais n’a pris pour le moment aucune mesure spécifique. L’entreprise de Cupertino assure en revanche n’avoir reçu aucune demande de divulgation d’informations sur ses utilisateurs depuis l’entrée en vigueur de la loi.
Ancienne colonie britannique rétrocédée à la Chine en 1997, Hongkong béné cie – en tant que région administrative spéciale – de certaines libertés, en comparaison avec la Chine continentale. Les résidents hongkongais ont ainsi accès aux services occidentaux sur Internet (comme Google, Facebook et Twitter), souvent bloqués par Pékin, et par ce qui est surnommé la « grande muraille virtuelle ».
Mais ces libertés sont remises en cause par une nouvelle législation sur la sécurité nationale de Hongkong adoptée ce 30 juin. Cette loi est accusée d’ouvrir la voie à des changements radicaux et à un potentiel virage autoritaire, ce que nie Carrie Lam, la chef de l’exécutif hongkongais, qui a défendu ce texte lundi 6 juillet, et s’est engagée à l’« appliquer vigoureusement ».
Cette nouvelle loi vise à réprimer quatre types de crime contre la sécurité de l’Etat : les activités subversives, la sécession, le terrorisme et la collusion avec des forces étrangères. Elle prévoit également que la justice chinoise est compétente pour les atteintes « graves » à la sécurité et pour prononcer des peines de prison à vie pour les crimes contre la sécurité nationale.
Début juillet, en quelques heures, un climat de crainte s’est abattu sur la ville, la loi criminalisant notamment le fait d’appeler à l’indépendance ou à une plus grande autonomie de Hongkong. Nombre d’habitants ont e acé les traces informatiques de leur engagement démocratique alors que le gouvernement a ordonné aux écoles, lundi, de retirer les livres qui pourraient enfreindre le texte.
Les annonces des géants de l’Internet ne veulent cependant pas dire que tout lien est rompu avec Hongkong.
Ainsi, au moins l’un d’elles, Google, ne va pas complètement arrêter de coopérer avec les autorités locales. Contactée par Reuters, l’entreprise de Mountain View indique qu’elle continuera à examiner les demandes du gouvernement hongkongais de suppression de contenus publiés sur ses services.
En clair, Google indique qu’il pourra supprimer certains contenus à la demande du gouvernement hongkongais, mais ne fournira aucune information personnelle sur ses utilisateurs.
Twitter et Facebook n’ont, en revanche, pas répondu sur ce point.
Reste que, comme le note le New York Times, « ce consensus surprenant de la part de géants rivaux de l’Internet américain, qui ont tous employé un discours similaire dans leurs communiqués, est une rare remise en question publique de la politique chinoise ».
D’autant qu’en choisissant de tenir tête à Pékin, ces différentes entreprises vont aussi à l’encontre de cette nouvelle loi, avance le quotidien américain. Selon les nouvelles règles, « si une entreprise de l’Internet refusait de se soumettre à une décision de justice et de livrer des données dans des a aires liées à la sécurité nationale, elle pourrait recevoir une amende allant jusqu’à 13 000 dollars [11 500 euros] et un employé pourrait être condamné à six mois de prison ».