L’île Maurice retient son souffle : ce sont des “heures décisives”, titrait Le Mauricien le mardi 11 août. Toute la journée, les rumeurs se sont propagées : le MV Wakashio est-il sur le point de se briser en deux, voire en trois, comme le craignent les autorités ? “L’état du MV Wakashio ne s’améliore pas. Les fissures qui zèbrent la coque de l’épave […] sont de plus en plus importantes”, constate L’Express.
Cela serait synonyme d’une catastrophe encore plus grande. Deux cuves encore intactes mais pleines de fioul pourraient à leur tour répandre leur contenu toxique dans les sublimes eaux mauriciennes.
Une tache d’huile de plus en plus grande
Pour l’heure, seule une des trois cuves a cédé. Assez néanmoins pour déverser des milliers de tonnes d’huile lourde le long de la côte sud-est de l’île de l’océan Indien. Le MV Wakashio, vraquier d’un armateur japonais battant pavillon panaméen chargé de 3 800 tonnes de fioul, s’est échoué le 25 juillet à Pointe d’Esny.. Le 6 août, le gouvernement a annoncé qu’une partie de son contenu se déversait en mer.
Et si, “finalement, une bonne nouvelle” est arrivée avec la fin des opérations de pompage prévue ce mercredi 12 août, selon l’Express, l’huile ne cesse de se répandre. “Les dernières données satellite datant du mardi 11 août montrent que l’étendue de la zone directement touchée par la marée noire a été multipliée par dix en cinq jours”, explique le média américain Forbes, qui a pu se procurer ces données.
Contre la marée noire, “une marée de solidarité” a déferlé sur les côtes, titre Le Mauricien. Les habitants de l’île sont à pied d’œuvre pour nettoyer au plus vite l’eau et les plages, explique le quotidien. “Ils viennent du Centre, de l’Ouest, du Nord et de l’Est. Tel un pèlerinage, des Mauriciens, volontaires et curieux confondus, ont convergé pour prêter main-forte aux militants écologistes mais aussi pour constater de visu cette solidarité mauricienne hors du commun.”
Un désastre pour les écosystèmes
La pollution promet déjà d’être dramatique pour la faune et la flore exceptionnelles de ce lagon, explique Forbes :
“[Cela peut avoir] des conséquences à long terme sur la vie marine. Il y aura des retombées néfastes sur les écosystèmes fragiles des récifs coralliens, les mangroves, les oiseaux de mer, les poissons, les tortues, les dauphins, les baleines et les crustacés, qui auront les poumons atteints. […] C’est particulièrement préoccupant pour Maurice, qui est l’un des hauts lieux les plus riches de la biodiversité de l’océan Indien, avec une faune et une flore que l’on ne trouve nulle part ailleurs dans le monde.”
Les écologistes craignent “la pire catastrophe écologique que le pays ait connue”, écrit L’Express. Avec des conséquences lourdes sur le tourisme, qui fait vivre une partie de l’île.
Le gouvernement a mis dix jours à réagir
Si le temps est encore à l’urgence, les questions commencent à surgir, et avec elles, l’indignation. Comment le MV Wakashio a-t-il pu s’échouer ainsi ? Quelle est la responsabilité de l’équipage ? Maurice a-t-elle manqué à la surveillance de ses côtes ? Pourquoi le gouvernement mauricien a-t-il mis plus de dix jours à réagir ? Pourquoi n’a-t-il pas sollicité l’aide de la communauté internationale et de la France plus tôt ?
“Nous assistons en direct non seulement à une crise environnementale et un désastre écologique, mais aussi à une crise humaine, puisqu’un grand nombre d’habitants des environs gagnent leur vie grâce à la mer nourricière. Cette tristesse cache difficilement une sourde colère qui gagne non seulement les habitants des régions affectées, mais toute la population mauricienne, qui ne comprend pas comment ce drame a pu se produire.”
Anna Sylvestre-Treiner
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