Pour les cercles conspirationnistes américains, les antifas ont bon dos. Alors que la côte ouest des États-Unis est frappée depuis le mois d’août par des incendies catastrophiques, “les autorités ont dû démentir des rumeurs, qui se sont répandues sur les réseaux sociaux, selon lesquelles les feux étaient allumés par des militants antifascistes”, rapporte le New York Times.
Et malgré leurs efforts, la désinformation sur l’origine des incendies, qui ont tué au moins quinze personnes et consumé des centaines de milliers d’hectares selon le quotidien, “continue de se répandre sur Facebook et Twitter”.
Le jeudi 10 septembre, plusieurs journalistes couvrant les incendies près de la ville de Molalla, dans l’Oregon, ont déclaré avoir été confrontés à un groupe de personnes armées “qui s’inquiétaient de l’activité non vérifiée de pyromanes dans la région”, indique le quotidien new-yorkais.
Des arbres qui tombent sur les lignes électriques
Mais comme le souligne Joy Krawczyk, porte-parole des services forestiers de l’Oregon citée par le New York Times, il n’y a “aucun signe d’une campagne d’incendies criminels politiquement motivée”, et l’incendie le plus dévastateur a été déclenché par la chute d’arbres qui ont renversé des lignes électriques.
Les rumeurs auraient commencé le mercredi 9 septembre, après que la police de Portland a diffusé sur Twitter une alerte sur le risque d’incendie lors des manifestations.
Des groupes d’extrême droite, des politiciens et des personnalités des réseaux sociaux ont vu dans ce tweet “la preuve que l’Antifa, qui est régulièrement présent à Portland, est responsable des incendies qui ont ravagé la côte ouest”, souligne le quotidien new-yorkais.
Une poignée de pages et de groupes Facebook ont commencé à partager des messages selon lesquels “nombre d’incendies qui se déclenchent dans l’Oregon sont délibérément allumés par Antifa Black Lives Matter”. La rumeur a ensuite été reprise par Paul Romero, un ancien candidat républicain au Sénat, qui a évoqué sur Twitter un “incendie criminel de l’Antifa” et le placement en garde à vue de six pyromanes. Résultat, en quelques jours, cette théorie du complot a été relayée près de 10 000 fois sur Twitter et a touché jusqu’à 680 000 personnes sur Facebook, la plupart semblant proches du groupe complotiste QAnon.
Pour les chercheurs qui étudient les phénomènes conspirationnistes, il n’y a pourtant là rien de surprenant : les périodes de crise génèrent souvent de la désinformation. “On constate une convergence de communautés animées d’un esprit complotiste qui sont très actives sur Internet”, a ainsi déclaré au New York Times Graham Brookie, directeur de l’Atlantic Council’s Digital Forensic Research Lab. Et selon lui, “nous devrions nous attendre à ce que chaque événement d’actualité ou nouvelle crise soit abordé sous cet angle”.
The New York Times
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