La visite de Narendra Modi au Bangladesh n’a pas fait que des heureux. “La police a ouvert des poursuites à l’encontre de plus de 8 000 personnes, à la suite de la pagaille qui a sévi ces trois derniers jours” à Chattogram, Brahmanbaria, Dacca et Narayanganj lors des manifestations de groupes islamistes et de gauche contre la visite du Premier ministre indien au Bangladesh, indique le Business Standard.
Venu participer aux célébrations du cinquantième anniversaire de l’indépendance à Dacca, vendredi 26 mars, le dirigeant nationaliste hindou a fait l’objet de manifestations hostiles durant plusieurs jours, accusé de mener une politique répressive à l’égard des musulmans dans son pays. Beaucoup estiment que la Première ministre bangladaise, Sheikh Hasina, aurait dû s’abstenir de l’inviter. Selon le journal, “au moins 14 personnes ont été tuées et des dizaines d’autres blessées lors des affrontements qui ont eu lieu dans tout le pays”.
De nombreux membres du Hefazat-e-Islam ont été vus en train de se battre avec les forces de l’ordre, mais aucun d’entre eux n’aurait été interpellé. Ce mouvement islamique radical, qui repose sur un réseau dense d’écoles coraniques, réclame depuis des années une loi sur le blasphème. Le gouvernement Hasina s’efforce de ne pas se le mettre à dos, surtout lors des échéances électorales importantes. Mais dimanche 28 mars, “les manifestants sont devenus plus violents et plus féroces. Ils ont attaqué des bâtiments publics et des bureaux privés, et ils ont vandalisé des bus et des trains dans plusieurs régions.”
Le ministre de l’Intérieur parle d’“anarchistes” et a prévenu que les autorités “prendraient des mesures sévères” si les défilés anti-Modi ne prenaient pas fin immédiatement, rapporte The Independent. Il est notamment reproché au Hefazat-e-Islam d’“instrumentaliser des enfants” éduqués dans ses madrasas (écoles coraniques) à des fins politiques en les enrôlant dans les manifestations.
Un moment historique pour les deux pays
Si Narendra Modi a fait partie des dignitaires venus fêter le jubilé du Bangladesh, c’est parce que l’année 1971 a été “un moment d’une importance indéniable” pour les deux pays, estime le Dhaka Tribune. Le Premier ministre indien “a affirmé avoir participé, alors qu’il n’avait qu’une vingtaine d’années, à des manifestations contre la persécution de la population” de ce qui s’appelait alors le Pakistan oriental.
Cela “reste à vérifier”, car, pour les Bangladais, l’Inde que dirige aujourd’hui Modi n’a rien à voir avec l’Inde d’Indira Gandhi, alliée à l’époque du Bangladesh naissant. L’actuel ministre de l’Intérieur indien, Amit Shah, ne compare-t-il pas souvent “à des termites” les personnes originaires du Bangladesh qui vivent en Inde depuis cinquante ans et plus ? rappelle à point nommé le journal.
Guillaume Delacroix
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