“De longues queues devant les banques sont devenues très courantes ces dernières semaines avec la réouverture progressive des succursales, presque toutes fermées début février après la participation du personnel au mouvement de désobéissance civile appelant à la fin du régime militaire”, écrit Frontier Myanmar.
Cette reprise parcellaire des services fait suite aux avertissements de la Banque centrale, début mars. Environ au même moment, une lettre émanant supposément de la junte a fuité en ligne. Il y était question de menaces envers les banques privées suggérant le transfert forcé de leurs avoirs en cas de fermeture prolongée.
Une situation déstabilisante pour les clients, dont la confiance dans le secteur privé bancaire est en chute rapide, poursuit le journal.
Retraits limités
Certes, explique-t-il, le mouvement de désobéissance civile, auquel de nombreux employés ont pris part, a bousculé le secteur, mais les inquiétudes des clients concernent moins le mouvement contre la junte que les politiques contre-productives de la Banque centrale.
Ainsi, malgré la grève de leurs employés, les institutions bancaires ont garni les distributeurs automatiques, permettant des retraits jusqu’à 1 million de kyats par jour (environ 530 euros). Les transferts par mobile étant également possibles, évitant ainsi le recours à l’argent liquide.
Une option qui a disparu quand la junte a coupé l’accès à Internet à toutes les personnes non connectées par la fibre.
Chute de la valeur du kyat
À défaut de ces transferts électroniques, le recours au retrait demeure la seule option. En pratique, la majorité des banques n’autorise des retraits que pour des montant inférieurs à 1 million de kyats. Par ailleurs, les entreprises demandent des paiements en liquide, ce qui aggrave encore plus la situation.
Un autre facteur expliquant la demande pour des liquidités s’explique par la chute de la valeur du kyat contre le dollar. Le kyat a ainsi perdu en trois mois 18 % face au dollar. “Les gens retirent de l’argent de leurs comptes pour acheter de l’or ou des dollars, un investissement pour se prémunir contre la faiblesse du kyat.”
Confiance rompue
Résultat, non seulement la solvabilité des banques et la sécurité de l’épargne sont remises en cause, mais l’attitude récente de la Banque centrale menace également la vie privée des clients. Ainsi, le 19 mars, elle a ordonné aux banques privées de lui fournir la liste des clients possédant des coffres, une information confidentielle.
“Des évolutions qui remettent en cause les efforts considérables mis en œuvre pour redonner confiance dans les banques”, conclut le journal.
Le développement du secteur bancaire a été une des priorités du gouvernement de l’ancien président Thein Sein à partir de 2011, ouvrant le marché aux banques étrangères. Un développement qui s’est poursuivi sous le gouvernement civil d’Aung San Suu Kyi jusqu’au coup d’État du 1er février.
Courrier International
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