Paris dans le bourbier afghan
Ainsi, par l’entremise d’une prise d’otages, le gouvernement français se retrouve-t-il piégé par sa participation à la Force internationale d’assistance à la sécurité (Fias), qui occupe présentement l’Afghanistan sous l’autorité de Washington et de l’Otan. Céline Cordelier, l’une des otages enlevés par les talibans à l’occasion d’une mission de l’organisation humanitaire Terre d’enfance, vient en effet d’être libérée afin de rendre publique une adresse de ses ravisseurs.
À travers la missive en question, ces derniers fixent un nouvel ultimatum aux autorités de l’Hexagone, leur donnant jusqu’à la veille du second tour de la présidentielle pour retirer leurs troupes et favoriser un échange de prisonniers. Le président afghan Hamid Karzaï et ses mentors américains ayant d’emblée affiché leur refus de toute transaction avec la guérilla intégriste, Paris s’est vu obligé de prendre quelque distance avec une politique qui, occupant militairement un pays au mépris de l’aspiration de ses habitants, n’aura fait, en presque six ans, que permettre aux talibans de se refaire une santé. Même notre très atlantiste Philippe Douste-Blazy aura dû avouer le « malaise » officiel, en déclarant que la France n’avait « pas vocation à occuper un pays sur le long terme ».
Une précaution qui n’a aucune chance d’être suivie du moindre effet, la déstabilisation de l’Afghanistan, autant que l’essor de la production de drogue finançant l’opposition talibane, conduisant les forces d’occupation à une escalade militaire qui produit des conséquences similaires à celles qui ravagent l’Irak...
* Paru dans Rouge n° 2204 du 3 mai 2007.
Troupes impérialistes hors d’Afghanistan
En Afghanistan, les talibans, qui ont capturé, début avril, deux Français, membres de l’ONG Terre d’Enfance, et leurs trois accompagnateurs afghans, ont donné, le 20 avril, une semaine au gouvernement français pour retirer ses troupes d’Afghanistan et faire libérer des prisonniers détenus par le gouvernement de Kaboul. Sans quoi, menacent-ils, les otages seront exécutés.
Ce n’est qu’à l’occasion de tels événements qu’il est question, dans la presse, du déploiement militaire français en Afghanistan : plus d’un millier de soldats dans la région de Kaboul, des hélicoptères et la mise à disposition du porte-avions Charles-de-Gaulle avec ses 25 avions de chasse. Au total, plus de 40 000 soldats de la Force internationale d’assistance à la sécurité (Isaf), coalition dirigée par les États-Unis, occupent le pays depuis décembre 2001. Des milliards de dollars sont dépensés pour maintenir et équiper ces troupes et appuyer un gouvernement fantoche et corrompu. Rien n’est fait, en revanche, pour la population, dont 95 % n’ont pas accès à l’eau ou à l’électricité, dans un pays dévasté par 30 ans de guerre, et dont toute l’économie, sauf celle de l’opium, est ruinée.
Loin d’apporter la paix et la sécurité, l’occupation impérialiste n’a fait qu’accroître la misère et les souffrances du peuple afghan, pris en otage entre la violence des troupes étrangères, les bandes armées des chefs de guerre locaux et les attentats aveugles des terroristes. Cette occupation est la première responsable du renforcement des talibans et autres forces réactionnaires qu’elle prétend combattre.
* Paru dans Rouge n° 2203 du 26 avril 2007.