Quatre ans après son discours de « mission accomplie », George W. Bush a mis son veto à un projet de loi démocrate associant le financement de l’occupation de l’Irak au retrait des troupes à partir d’octobre. Ce veto n’a pu être levé par une majorité démocrate trop étroite. Chaque parti connaît son rôle dans ce jeu institutionnel et s’organise pour faire payer à l’autre le prix du statu quo aux élections de 2008. La Constitution et l’absence de majorité parlementaire large laissent des pouvoirs très importants au président. Les démocrates ne le contestent que sur la forme : ils comptent simplement amener les électeurs à la « bonne » conclusion électorale en 2008. En attendant, ils se montrent déterminés à trouver un compromis - sans retrait programmé - pour renouveler les budgets militaires, plutôt que de risquer de perdre leur image de « patriotes ».
Il faut dire, qu’en l’absence d’un mouvement antiguerre suffisamment fort, les opinions véhiculées par les sondages demeurent ambiguës : impopularité forte et croissante de Bush, rejet de la politique menée en Irak mais, en même temps, souci de « soutenir les troupes ». Ce mot d’ordre est un des piliers la « guerre contre le terrorisme », discours idéologique bien connu qui transforme en capitulation toute demande d’inflexion politique, toute critique de l’intervention armée et de ses justifications initiales. La classe politique est aussi parvenue à séparer la situation en Irak, particulièrement catastrophique, du reste du grand plan guerrier américain où les États-Unis sont accompagnés par un front impérialiste plus large. Même en Irak, Bush a réussi à envoyer des troupes supplémentaires malgré sa défaite !
La situation en Irak force à certains aménagements, que les deux grands partis vont maintenant négocier. Les démocrates proposent de lier le budget des forces d’occupation, non à un plan de retrait, mais à une « irakisation » - souhaitée par les républicains depuis les élections. Dans cette nouvelle mascarade, les États-Unis pourraient poser des conditions au maintien de leurs dépenses militaires, pour « responsabiliser » les autorités qu’ils ont eux-mêmes portées au pouvoir, espérant ainsi se dédouaner après avoir eux-mêmes mis le feu aux poudres de la guerre civile.
En Irak, la guerre reste une réalité quotidienne et 10 % de la population a fui le pays depuis 2003. Tout cela résulte de l’occupation, dont la durée même entraîne un chaos encore plus profond. Le retrait demeure la seule perspective d’avenir pour le peuple irakien. Aux États-Unis, le repositionnement des candidats à la présidentielle peut refermer l’espace ouvert par l’impopularité de Bush. Un mouvement antiguerre indépendant des démocrates et dénonçant toutes les interventions armées des États-Unis est donc plus que jamais possible et nécessaire.