« La crise sanitaire n’est pas derrière nous, très clairement, nous allons vivre encore plusieurs mois avec ce virus ». Ces propos d’Emmanuel Macron, le 11 aout 2021, prenaient acte des limites et des échecs de la politique de l’exécutif dans la lutte face au COVID 19. Fin aout 2021, l’épidémie restait à un niveau jamais atteint en Martinique en Guadeloupe et en Polynésie. Les hôpitaux y pratiquent une médecine de catastrophe et sont contraints au tri des patients.
Dans l’hexagone, la vaccination de plus de la moitié de la population, dont une grande partie des personnes « à risque » a permis d’éviter une contamination catastrophique et le débordement du système de santé. La circulation du virus est restée néanmoins très élevée, avec pour conséquence la forte augmentation des admissions en soins critiques. Dans plusieurs régions le système hospitalier épuisé et sans moyens supplémentaires n’a pu répondre aux besoins qu’en supprimant ou déprogrammant une partie de son activité au détriment des autres patients.
Avec l’approche de l’automne, la fin des congés dans les entreprises, la rentrée des classes et des universités, tout laisse présager une nouvelle « vague » dans les semaines qui viennent. Les discours d’autosatisfaction ont surtout pour but de justifier la fin du « quoiqu’il en coûte » et la reprise des contre réformes dans les derniers mois du quinquennat (assurance chômage, retraites). Ils ne peuvent masquer la réalité : la crise sanitaire n’est effectivement pas « derrière nous ».
Le 30 avril 2021, dans une interview à la presse régionale, E. Macron avait pourtant fixé les étapes d’une sortie de crise en quelques semaines. L’immunité collective acquise grâce à la vaccination devait permettre un quasi-retour à la « vie d’avant ». L’instauration d’un « pass sanitaire », était alors présentée comme une mesure provisoire, limitée, et sans impact sur la vie quotidienne. « Le pass sanitaire » précisait l’interviewé, « ne sera jamais un droit d’accès qui différencie les Français. Il ne saurait être obligatoire pour accéder aux lieux de la vie de tous les jours comme les restaurants, théâtres et cinémas, ou pour aller chez des amis ». Le « jamais » macronien n’a pas duré deux mois et demi. Le 12 juillet, confronté à la montée en puissance rapide du variant « delta », propulsant une quatrième vague de l’épidémie, le président a opéré une volte face spectaculaire.
Sur injonction présidentielle, une loi, votée à la sauvette le 25 juillet, marque le retour aux contraintes autoritaires. L’état d’urgence sanitaire est une nouvelle fois prolongé (au moins) jusqu’au 15 novembre[1]. L’extension du pass sanitaire instaure un pays « à deux vitesses » : celui des vaccinés accédant, sous contrôle, à une vie sociale plus ou moins « normale » et celui des non vaccinés, qui voient remis en cause certains de leurs droits fondamentaux, comme l’accès aux soins dits « non urgents », aux transports, aux loisirs et à la culture.
Quant au droit constitutionnel au travail, il est lui aussi gravement mis à mal. Dans son allocution, E. Macron déclarait le 24 novembre 2020 « Je veux aussi être clair : je ne rendrai pas la vaccination obligatoire. ». Le 4 décembre, dans une interview à Brut, il enfonçait le clou « je ne crois pas à la vaccination obligatoire pour ce vaccin. Je crois beaucoup plus au travail de conviction par la transparence qu’à l’obligation ». Six mois plus tard, pour le « chef de guerre » contre le virus c’est le retour au « silence dans les rangs » et aux sanctions pour les fortes têtes. Celles et ceux qui, non vaccinés, travaillent en contact avec le public (à commencer par les soignantEs) seront dans un premier temps privés de salaire, et s’ils persistent pourront perdre leur emploi.
Le protocole sanitaire de rentrée dans l’éducation nationale étend les discriminations à la jeunesse scolarisée. En cas de Covid dans une classe, les collégiens et lycéens vaccinés pourront continuer à assister aux cours tandis que les non vaccinés seront « évincés », et devront suivre autant que faire se peut les enseignements à la maison.
Tout laissait pourtant prévoir la montée en puissance très rapide du nouveau variant « delta », beaucoup plus contagieux. Apparu en Inde, où il contribué à provoquer une situation sanitaire dramatique, et causé des milliers de morts, il s’est rapidement étendu à tous les continents. En Europe, il a vite remplacé les variants précédents en Angleterre, en Russie, en Allemagne, au Portugal. La France ne pouvait durablement être un ilot préservé de cette « quatrième vague ». Mais, tout à la glorification du « pari réussi » de Macron, censé avoir évité un nouveau confinement généralisé en début d’année 2021 (au prix de centaines de morts), l’exécutif ne voulut rien voir venir… jusqu’au moment ou il lui fallut bien se rendre à l’évidence. Dès lors, comme à chaque étape de la crise sanitaire depuis un an et demi, la solution fut un brusque tour de vis autoritaire.
Une méthode autoritaire, inefficace, qui nourrit la colère
L’instauration du pass sanitaire, et l’obligation vaccinale pour les professionnels en contact avec le public (police exceptée), fait suite à la succession des confinements et des couvre feu sans que la sortie de la pandémie soit en vue. Ils provoquent une colère et une exaspération qui se sont exprimées au cours de l’été. Fait exceptionnel, des manifestations ont réuni, chaque samedi en pleine période de congés des dizaines de milliers de manifestantEs. ils dénoncent les atteintes aux libertés, et l’instauration d’une société de surveillance et de contrôle de plus en plus pesante. Une partie significative d’entre eux s’affirme ouvertement anti-vaccins.
La lutte contre le COVID, (tout comme celle contre le terrorisme) est l’occasion pour le pouvoir d’imposer de nouvelles mesures répressives. Toutefois aborder uniquement la question sous cet angle élude un point essentiel : la politique macronienne de lutte contre le COVID n’est pas seulement autoritaire, elle est en premier lieu peu efficace. L’exaspération et la colère qui n’ont cessé de monter depuis un an et demi, trouvent leurs racines dans la promesse jamais tenue d’en finir avec la pandémie. Les mesures de contraintes, tolérées dans un premier temps, avec l’espoir de retrouver la « vie d’avant » n’apportent pas le résultat attendu.
« Incompétence » ou choix politiques ?
Les opposants de droite et de gauche institutionnelle à l’actuel exécutif, dénoncent souvent la succession chaotique des « stop and go » qui ont émaillé la gestion de la crise sanitaire comme le résultat de « l’incompétence » ou de « l’amateurisme ». C’est pour eux un moyen commode d’escamoter des choix politiques qui furent aussi les leurs.
La limitation drastique des travaux de recherche sur les vaccins-maquettes du covid depuis 2004, l’affaiblissement de l’hôpital public frappé par l’austérité et l’absence d’un système public de santé hors hôpital, la privatisation rampante du système de soins, l’absence de toute politique d’anticipation d’une épidémie pourtant prévue depuis des années par les scientifiques ne datent pas du quinquennat d’E.Macron. Celui-ci n’a fait que poursuivre et aggraver les politiques menées de manière constante par ses prédécesseurs Chirac (y compris sous le gouvernement Jospin), Sarkozy, et Hollande.
La pandémie a brutalement rappelé au monde que la santé, bien commun, ne peut être préservée par des politiques fondées sur la prédominance du chacun pour soi et d’une économie fondée sur la recherche du profit.
Question personnelle et intime, la santé dépend néanmoins de choix collectifs, politiques et sociaux. Préserver la santé suppose une action sur les déterminants sociaux de santé (les conditions de vie, de travail, les facteurs environnementaux, l’alimentation, le logement….), ainsi que l’existence d’un système public de santé et de protection sociale garantissant à toutes et tous l’accès aux meilleurs soins. Cela implique des choix collectifs et solidaires. Ils sont incompatibles avec la conception libérale qui fait de la santé un « capital » individuel, géré en fonction de ses préférences…. et de ses moyens et qui soumet le système de santé aux impératifs de la rentabilité et du profit.
Le COVID-19 a également rappelé qu’il n’existe pas de protection individuelle contre une épidémie et que celle ci peut être seulement endiguée par des mesures de protection de l’ensemble de la société. C’est ce qui fait de la vaccination une question politique, collective, qui ne peut être ramenée à un choix de chacun·e concernant « sa » santé.
De même, le « nationalisme vaccinal » des pays riches, espérant protéger « leur » population en achetant les vaccins disponibles, tout en abandonnant à leur sort les pays du sud s’est retourné contre ses initiateurs. L’effet boomerang des « variants » issus de ces pays, a provoqué de nouvelles vagues de contamination dans les pays les plus riches pourtant fortement vaccinés qui s’estimaient protégés. Les « vagues » liées aux nouveaux variants sont le prix à payer pour un égoïsme qui a refusé de mettre les vaccins à disposition de tous les peuples par la suppression des brevets et la réquisition des industries pharmaceutiques.
La pandémie a enfin rappelé au monde que la santé n’est pas seulement une affaire de professionnels. La réussite d’une « stratégie de santé » repose sur l’alliance entre un système de santé public solide, et la mobilisation active de la population. Une telle mobilisation ne peut reposer que sur un travail de conviction, sans culpabilisation, stigmatisation ni répression, sur la transparence de l’information, l’acceptation du débat démocratique public respectueux et contradictoire, une politique de santé communautaire, au plus près de la population, avec les acteurs de terrain (familles, professionnels de santé, ONG, intervenants sociaux, élus..). C’est ce que confirment les très nombreuses expériences menées depuis la lutte anti tuberculeuse à la fin de la première guerre mondiale, jusqu’a à l’actuelle pandémie en passant par les luttes contre le VIH, les épidémies de Choléra, Zyka ou Ebola.
Ces exigences sont en contradiction avec les politiques libérales et autoritaires de l’exécutif français et expliquent qu’il « court derrière le virus » depuis mars 2020.
La vaccination universelle, un enjeu décisif
Un an et demi après le début de la pandémie, l’urgence sanitaire est toujours là, et toute tentative de la banaliser serait irresponsable. Plus de 4 millions de morts ont été recensés dans le monde, et des millions d’autres personnes, de plus en plus de jeunes, voient leur état de santé, physique et psychique durablement et profondément atteint.. Ce sont les plus vulnérables, les plus exposés sans protection nécessaires (« les premiers de corvée »), les plus pauvres et les plus précaires qui paient le tribu le plus lourd aux conséquences sanitaires et sociales de cette crise. Ce sont eux qui sont les plus frappés par la maladie et ses formes graves, qui ont le plus de mal à accéder à la vaccination et aux soins. Ce sont eux qui subissent le plus les effets sociaux de la pandémie par les pertes de salaires, de revenus, de droits sociaux, d’emplois, les expulsions des logements, le « décrochage » des études.
Vaincre le virus et sortir de la crise sanitaire, par la prévention (vaccin) et par l’accès aux soins (renforcement du système public de santé) fait partie du combat social et de la lutte pour l’émancipation.
La découverte et la production de masse de vaccins, en un temps record a profondément modifié la situation. Avec désormais près d’une année de recul et 4 milliards d’injections, tout confirme à la fois l’efficacité d’une grande partie des vaccins, des effets secondaires limités, et un nombre d’accidents liés à la vaccination très restreint. Les vaccins confirment leur efficacité, avec les nouveaux variants même si elle peut être plus réduite. Ils réduisent enfin fortement (autour d’un facteur 10) la transmission du virus. La balance bénéfices/risques en leur faveur ne peut dans ces conditions être mise en doute. Accompagnée du maintien des gestes barrières et des mesures de précaution, la vaccination est un outil central pour contribuer à l’acquisition de l’ immunité collective, en épargnant des milliers de vie, et en évitant la répétition indéfinie de « vagues » de plus en plus contagieuses, et virulentes.
Encore faut-il que cet outil soit bien utilisé. Ce ne fut pas, et ce n’est toujours pas le cas en France (et ailleurs) du fait des choix politiques du pouvoir. La mise en place de la campagne vaccinale a tardé et a été chaotique. Les mesures radicales (suspension des brevets, réquisition de l’industrie pharmaceutique) qui auraient permis de produire rapidement le nombre les doses indispensables à la couverture vaccinale de la population et d’étendre la vaccination aux pays du sud n’ont pas été prises. Pendant des semaines, les personnes qui souhaitaient se faire vacciner, ne sont pas parvenues à avoir de rendez vous. La forte adhésion à la vaccination s’est heurtée à l’incapacité du pouvoir d’y répondre.
Brusquement, en juillet, pris à la gorge par la montée non anticipée du variant delta, l’exécutif a décidé d’imposer le pass sanitaire et la vaccination obligatoire de certaines professions. Refuser ces mesures, c’est dire qu’il était et qu il reste possible de faire beaucoup mieux en faisant autrement de manière démocratique et participative et en renforçant les moyens du service public de santé.
La vaccination obligatoire n’est pas la solution
La mise en place du pass sanitaire n’est qu’une manière hypocrite d’imposer la vaccination anti covid. Le but revendiqué est en effet de rendre suffisamment insupportable la vie de celles et ceux qui refusent de se faire vacciner pour qu’ils décident « librement » de changer d’avis. C’est un prélude à une obligation généralisée. Macron, dans son intervention du 12 juillet le laissait déjà entendre : « …la question de la vaccination obligatoire pour tous les français devra sans doute être posée »
Critiquant le caractère discriminatoire du pass et ses incohérences, le Parti Socialiste, et une partie des professionnels de santé, se prononcent pour leur part en faveur de la vaccination obligatoire de toute la population. Ils y voient le seul moyen d’atteindre rapidement l’immunité collective et soulignent qu’il existe déjà d’autres vaccins obligatoires.
Quelle qu’en soit la forme, hypocrite ou assumée, la vaccination obligatoire part d’un postulat : la contrainte étatique, les sanctions et les peines lourdes sont le seul moyen, face à l’urgence d’aboutir à l’immunité collective. C’est bien ce postulat qui doit être mis en cause.
La question n’est pas de savoir si l’on est « par principe » pour ou contre la vaccination obligatoire mais d’en mesurer les effets concrets dans un contexte précis. Penser qu’elle permettrait de vaincre les réticences et les résistances, dans l’actuel climat de défiance généralisée, sans prendre en compte ses effets contre productifs relève de l’illusion.
Au lendemain de l’allocution de Macron le 12 juillet, les porte-parole du pouvoir se sont félicités du brusque bond des inscriptions dans les centres de vaccination. La communication gouvernementale insiste aujourd’hui sur les 50 millions de « primo vaccinés » bientôt atteints.
Il faut d’abord souligner que si les annonces présidentielles ont provoqué, de manière non surprenante, un afflux d’inscriptions. L’effet en est retombé assez vite. Mais surtout ces chiffres ne font que dissimuler l’incapacité persistante à convaincre ceux qui ne le sont pas, et à les rendre plus déterminés dans leur refus ; celui-ci pouvant devenir (à tort) pour eux un acte de « résistance ». Elle ne doit pas non plus masquer le fait que cette méthode ne permet pas de toucher les personnes les plus à risque.
En France seuls 85% des plus de 80 ans sont vaccinés. Commentant ce chiffre dans un article du Monde[2], Jeremy Ward, sociologue à l’INSERM, rappelait : « La politique du chiffre a permis une large couverture vaccinale mais on a laissé les gens se débrouiller pour se faire vacciner, alors que ceux qui ont du mal à se débrouiller seuls sont précisément ceux qui finissent aux urgences »
G. Attal, porte parole du gouvernement répète, quant à lui, les « éléments de langage » de la propagande gouvernementale et s’auto félicite : « On vient de franchir le million de Français vaccinés via nos opérations d’ “aller vers”qu’on fait pour aller chercher des personnes qui ne peuvent pas, pour différentes raisons, se déplacer jusqu’à la vaccination »[3].
Tout le problème est que pour « aller chercher », convaincre, et amener vers la vaccination, celles et ceux qui en sont les plus éloignés, il faut commencer par créer la confiance, par le respect et le refus de toute forme de contrainte. Faute de quoi la formule « aller vers » est vide de sens : si celles et ceux que l’on veut convaincre, peuvent légitimement penser que cette démarche est n’est qu’un subterfuge pour imposer la contrainte celle ci court à l’échec.
Celles et ceux qui dans le mouvement social et ouvrier se rallient par défaut au pass sanitaire et à la vaccination obligatoire refusent d’en voir les conséquences. Il ne s’agit pas d’instaurer une norme symbolique, de formuler une exigence éthique, autour de laquelle pourrait s’engager une discussion pour trouver un accord et un consentement. Il s’agit de priver celui ou celle qui n’est pas convaincu de rémunération, d’emploi, et d’entraver son accès aux soins, aux transports à la culture, aux loisirs. Se rallier au pass et à l’obligation vaccinale c’est soutenir la répression qu’ils impliquent. Cela ferme la possibilité du dialogue, de la conviction et de la négociation. C’est la raison pour laquelle, pour combattre réellement en faveur de la vaccination, il est indispensable de prendre position explicitement et d’agir contre les mesures répressives et liberticides découlant de la vaccination obligatoire.
Reprendre l’initiative
Depuis les mobilisations qui ont marqué la fin du premier confinement en juin 2020[4], brisées par le « Ségur de la santé », le mouvement ouvrier a été sur la défensive face à la gestion libérale et autoritaire de la crise sanitaire par l’exécutif. La situation des hôpitaux a continué de se délabrer. Les confinements et couvre feu se sont succédés aux rythme des vagues de la pandémie. la vaccination a été chaotique et la politique gouvernementale en a limité l’efficacité. Aucune mobilisation d’ampleur nationale n’a pourtant vu le jour.
A l’automne 2020, des manifestations locales, comme à Toulouse, avaient permis de lier, l’exigences de moyens pour le système hospitalier, le refus de la gestion autoritaire de la crise et ses conséquences sociales. Elles sont restées isolées. Au printemps 2021, des pétitions en ligne portées par un large regroupement de forces syndicales associatives politiques et de personnalités ont demandé de levée des brevets et la réquisition de l’industrie pharmaceutique. Elles ont recueilli des milliers de signature, mais sans déboucher sur des mobilisations concrètes.
Le nouveau tour de vis autoritaire du pouvoir en juillet 2021, ne s’est vu opposer que les déclarations d’une partie du mouvement syndical, associatif et de la gauche politique alors que d’autres composantes se ralliaient à l’acceptation du pass et de la vaccination obligatoire. C’est dans ce contexte, que des appels sur les réseaux sociaux ont initié des manifestations « anti pass » à partir du 17 juillet 2021, Elles ont regroupé, chaque samedi, des dizaines de milliers de participants tout au long de l’été. Au moment ou cet article est écrit, le mouvement se poursuit même s’il a quelque peu décliné.
Sous la bannière du refus du pass sanitaire, de la défense de la liberté ce mouvement rassemble de multiples colères contre un pouvoir symbolisé par E. Macron. Les motivations et les revendications des participant·es sont non seulement diverses, mais souvent contradictoires. A coté du rejet du pass, élément d’une politique autoritaire, de surveillance et de contrôle social et des questions légitimes qui sont posées sur la sécurité des vaccins, s’affirme un fort courant, variable selon les villes, hostile à la vaccination.
Il est largement alimenté par les sites et officines complotistes, qui a coup de fake news et de chiffres manipulés relativisent l’importance et la dangerosité de l’épidémie, orchestrent le doute sur les « dangers » de la vaccination et son efficacité. L’extrême droite dans ses différentes versions « patriotes », « souverainistes » ou « identitaires », les catholiques intégristes de Civitas tentent de s’affirmer à la tête de ce mouvement, dans le but d’attiser les peurs et les frustrations, non de se battre pour en finir avec la crise sanitaire. On notera que ces « défenseurs » des libertés contre la prétendue « dictature sanitaire », sont premiers à pratiquer la surenchère quand il s’agit de supprimer les mêmes libertés et droits démocratiques au nom de la lutte contre l’immigration et le terrorisme.
La question posée au mouvement ouvrier n’était pas, dans ces conditions, d’unifier le mouvement anti pass sur le plus petit dénominateur commun, mais d’y être présent avec un rapport de force conséquent pour y défendre et y gagner le plus grand nombre à une alternative à la politique libérale et autoritaire du pouvoir et à l’obscurantisme réactionnaire : la généralisation de la vaccination fondée sur la conviction, la lutte contre le pass les sanctions et les mesures discriminatoires, la fin des restructurations hospitalières, le recrutement et la formation de professionnels de santé, la levée des brevets, la réquisition de l’industrie pharmaceutique et le contrôle citoyen sur ce qu’elle produit et comment elle le produit, etc.
Ce fut une nouvelle dérobade de la part de la majorité des composantes du mouvement ouvrier. Elles préférent décréter « infréquentables » les manifestations quand elles ne se sont pas simplement ralliées aux mesures gouvernementales Elles ont ainsi laissé isolée et dans un rapport de force souvent défavorable la petite minorité de militants associatifs, syndicaux, politiques qui sauvèrent l’honneur en constituant des « pôles » progressistes au sein des cortèges.
La rentrée sociale peut et doit être l’occasion d’inverser le cours des choses. Avec le rebond probable de la pandémie, l’état critique du système de santé, aggravé par les sanctions qui vont frapper les réfractaires à la vaccination va maintenir la question sanitaire au premier plan. Elles doivent être liées aux mobilisations contre les sanctions qui vont tomber à partir du 15 septembre ainsi qu’aux luttes sur le terrain social contre les tentatives de l’exécutif de reprendre le cours de ses contre réformes, (retraites , assurances chômage) et de faire payer la note de la crise aux salariéEs et exploitéEs
La possibilité existe dans ce contexte de reprendre l’initiative avec détermination, en liant les questions sanitaires et sociales et contre l’autoritarisme. ChacunE est devant ses responsabilités.
Le 7 septembre 2021.
Jean-Claude Laumonier
Notes
[1] O. Veran a dores et déjà annoncé la possibilité d’une nouvelle prolongation.
[2] Le Monde.fr 30 août 2021 : Covid-19 : la France reste en retard sur la vaccination des personnes âgées
[3] Le Monde.fr 30 août 2021 : Covid-19 : la France reste en retard sur la vaccination des personnes âgées
[4] Le 16 juin 2020, à l’appel de collectifs, syndicats, comités de défense des hôpitaux, auxquels se sont joints des « Gilets Jaunes » 180 000 personnes dont 20 000 à Paris s’étaient mobilisées en soutien aux hospitaliers et pour exiger des moyens supplémentaires pour l’hôpital.