“Pas une de plus”, titre le quotidien progressiste polonais Gazeta Wyborcza en une de son édition du lundi 8 novembre, avec en couverture une photo de la manifestation qui s’est tenue samedi 6 novembre à Varsovie en hommage à “Izabela de Pszczyna”. Selon le collectif féministe Dziewuchy Dziewuchom, il s’agit du “premier décès résultant de l’impossibilité d’accéder à l’avortement depuis la décision de justice d’octobre 2020”.
Cette femme de 30 ans a perdu la vie le 22 septembre dernier dans un hôpital du sud de la Pologne, à la suite d’un choc septique. Enceinte de vingt-deux semaines, elle avait été hospitalisée après avoir perdu les eaux, et son fœtus avait auparavant été diagnostiqué comme présentant des malformations. L’avocate de la famille de la défunte affirme que si les médecins avaient pratiqué à temps un avortement, la jeune femme aurait pu être sauvée.
Dans l’état actuel de la législation polonaise en matière d’avortement – l’une des plus restrictives d’Europe –, l’interruption médicalisée de grossesse est autorisée lorsque la vie ou la santé de la femme enceinte sont menacées ou lorsque la grossesse est le produit d’un inceste ou d’un viol.
La peur de poursuites pénales
Toutefois, soutient l’association de planning familial Federa, la délégalisation à l’automne 2020 de l’avortement en cas de malformation grave et irréversible du fœtus aurait un “effet dissuasif” sur les médecins, qui auraient peur de poursuites pénales et refuseraient donc de pratiquer des interruptions de grossesse même dans les situations où la loi les y autorise.
Survenant un peu plus d’un an après cette décision de justice très controversée, qui avait déclenché dans le pays de vastes manifestations, l’“affaire Iza” a ravivé une certaine émotion autour d’un sujet historiquement très sensible en Pologne en raison de la forte influence exercée par l’Église catholique, hostile à l’avortement. Gazeta Wyborcza relève ainsi qu’en plus des quelque 30 000 manifestants réunis dans la capitale, Varsovie, des milliers d’autres ont marché dans plus de 80 villes, le plus souvent en silence.
De son côté, le ministère de la Santé a rappelé, dimanche 7 novembre, dans un communiqué que “la vie et la santé de la mère ont la priorité. [Par conséquent], les médecins ne devraient pas craindre de prendre des décisions évidentes reposant sur leur expérience et sur les informations médicales à leur disposition.”
Gazeta Wyborcza
Abonnez-vous à la Lettre de nouveautés du site ESSF et recevez par courriel la liste des articles parus, en français ou en anglais.