“Forcer l’Indonésie à atteindre zéro déforestation en 2030 est clairement inapproprié et injuste. L’ère du développement massif [du président Joko Widodo] ne doit pas s’arrêter au nom des émissions de carbone ou au nom de la déforestation.” Ce message cité par le Jakarta Post a été envoyé sur Twitter par Siti Nurbaya Bakar, la ministre de l’Environnement et des Forêts indonésienne, le 3 novembre 2021, soit deux jours après que l’Indonésie, au sommet de Glasgow, a pris, avec 127 autres nations, l’engagement solennel d’atteindre zéro déforestation en 2030.
Cette “ère du développement massif” que défend la ministre fait référence à l’arsenal de lois votées en 2020 par le Parlement indonésien qui favorisent les grandes plantations de palmiers à huile et encouragent les compagnies minières à multiplier leurs activités, criminalisant toute critique de ce développement. À l’époque, Koran Tempo se faisait l’écho des nombreux activistes qui dénonçaient ces lois dites “omnibus” qui “draguent les entrailles de l’archipel”.
“Notre Constitution stipule que la terre, l’eau et toutes les richesses qu’elles contiennent doivent être utilisées pour le bien-être de toute la population, et non pour le bénéfice d’une poignée d’entrepreneurs miniers. Les lois omnibus, qui ne profitent qu’à un groupe d’hommes d’affaires affiliés à certains partis politiques, violent clairement les nobles idéaux de notre République.”
Le jeudi 4 novembre 2021, note le Jakarta Post, c’est au tour du vice-ministre des Affaires étrangères indonésien, Mahendra Siregar, de démentir l’engagement pris par son pays à la COP26 : “La déclaration émise ne fait aucunement référence à la ‘fin de la déforestation d’ici à 2030’, a déclaré Mahendra dans un communiqué. Il est important d’aller au-delà du simple récit, de la rhétorique, des cibles arbitraires et des prises de bec sonores.”
Le quotidien ajoute que le vice-ministre a déclaré plus tard à l’agence Reuters que l’Indonésie interprétait la phrase “arrêter et inverser la perte de forêts et la dégradation des terres d’ici à 2030”, tel qu’indiqué dans l’engagement, comme “la gestion durable des forêts […], et non pas comme mettre fin à la déforestation d’ici à 2030”.
Les représentants de l’Indonésie à Glasgow se seraient-ils égarés dans la traduction ? Une chose est certaine : depuis 1997, plus de 14 millions d’hectares de forêts de l’archipel indonésien sont partis en fumée à cause des sécheresses dues au changement climatique et à l’activité humaine. Aujourd’hui, il reste moins de 94 millions d’hectares.
Courrier International
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