Sur les 471 maternités du territoire 150 comptaient 100% de grévistes, et la moitié des cabinets libéraux de sages-femmes étaient déclarés fermés. 3500 sages-femmes de tout le pays ont manifesté à Paris, sur les 23 397 en exercice. Elles expriment depuis des années les difficultés de leur profession, et le Ségur de la santé étant nettement insatisfaisant, elles se mobilisent. Fin du « code rouge » (césarienne d’urgence pour sauvetage maternel ou foetal), elles déclenchent le « code noir ».
« On vous fait naître, il faut nous reconnaître ! »
Leurs revendications portent sur l’amélioration de leurs conditions de travail, notamment l’augmentation des effectifs à hauteur d’ « une femme, une sage-femme » (un de leurs slogans). Les décrets définissant les effectifs datent de 1998 alors que depuis le champ d’intervention n’a cessé de s’étendre. Aujourd’hui considérées comme profession médicale, elles demandent la reconnaissance de leur statut médical et une augmentation de salaire en adéquation avec leur niveau de responsabilités. Depuis 2009, il leur a été attribué des tâches gynécologiques préventives (prescriptions/poses de toutes contraceptions, réalisations de frottis cervico-utérins, prescriptions de mammographies…) dont elles ont donc acquis les compétences, en plus de leurs compétences et tâches obstétricales initiales. Mais à ce jour, une sage-femme débutante gagne entre 1700 et 1800 euros bruts par mois, tandis que, par exemple, le salaire moyen brut d’unE gynécologue est de 7800 euros par mois.
Les sages-femmes interviennent tout au long de la vie des patientes : suivi gynécologique, prescriptions d’IVG médicamenteuses depuis 2016, préparations à la naissance et à la parentalité, rééducation du périné, visites à domicile… Elles peuvent également assurer le suivi du nouveau-né jusqu’à ses 28 jours. Elles travaillent dans tout type de structures : 33% d’entre elles sont en exercice libéral ou mixte, on estime que ce chiffre devrait doubler d’ici à 2050. De nombreuses étudiantes présentes lors de la manifestation témoignent de la dureté de leur apprentissage dans ce contexte dégradé. Elles rapportent des places vacantes et de nombreux abandons au sein de leur promotion. L’instauration d’une sixième année d’études, programme actuellement dense, avec un meilleur encadrement pédagogique leurs semble indispensable.
« Mépriser les sages-femmes c’est mépriser toutes les femmes »
Soutenir cette profession est un enjeu de santé publique et féministe. Les sages-femmes permettent une meilleure accessibilité et offre de soins dans un plus court délai, quand il faut des mois pour un rendez-vous chez un gynécologue. Elles proposent un accompagnement centré sur les besoins des personnes concernées et prônent leur autonomisation. Elles favorisent le maintien en bonne santé par le dépistage notamment des cancers du sein et du col de l’utérus. Elles jouent aussi un rôle majeur dans la détection des violences sexuelles et intra-familiales : parfois, ce sont les seules professionnelles de santé consultées pendant des années par les femmes.
Le métier est pratiqué à plus de 97% par des femmes : des soins par les femmes, pour les femmes. Elles occupent ainsi une place qui déstabilise le monopole des médecins en matière de santé sexuelle et reproductive. Historiquement, elles ont beaucoup contribué à la lutte pour les droits des femmes, notamment dans la défense du droit à l’avortement.
Les sages-femmes grévistes s’organisent contre les idées de rentabilité des soins et de rationalisation du temps de prise en charge qui accentuent les violences gynécologiques et obstétricales ; pour la bien-traitance de toutes les personnes qu’elles accompagnent.
Clarisse, infirmière dans le 94
• Hebdo L’Anticapitaliste - 586 (14/10/2021). Publié le Lundi 11 octobre 2021 à 13h46 :
https://lanticapitaliste.org/actualite/sante/greve-des-sages-femmes-le-monde-de-demain-nait-entre-nos-mains-0
Sages-femmes à Saint-Denis en grève
Le 7 octobre dernier, les sages-femmes, hospitalières et libérales, manifestaient pour la sixième fois de l’année à Paris : 5 000 à 6 000 d’entre elles dans la rue, sur les 24 000 exerçant sur le territoire. La revendication principale : la reconnaissance du travail via la question du statut et le niveau des salaires.
En septembre, Véran avait annoncé une augmentation de 100 euros par mois pour les sages-femmes exerçant à l’hôpital à partir de janvier 2022. Cette annonce, dans un contexte de fuite massive de personnelEs à l’hôpital, a été vécue comme une insulte au vu de la réalité du travail. Un appel à un « week-end noir » via différentes organisations du métier s’en était suivi fin septembre, avec ensuite la montée nationale à Paris. Il a donné un ton radical, notamment par la volonté de faire respecter les modalités d’assignation, donc le droit de grève.
Les collègues des hôpitaux de Saint-Denis ne lâchent rien
À l’hôpital de Saint-Denis, les sages-femmes ont déposé, avec les organisations syndicales du site, un préavis spécifique reconductible depuis le 7 octobre pour négocier également avec la direction du CHSD. En août dernier, elles avaient déjà interpellé par courrier la direction, l’ARS, la mairie… pour alerter sur la crise des effectifs. Aujourd’hui, il manque 25 sages-femmes dans cette maternité de niveau 3 et accueillant environ 4 500 naissances par an. Alors le foutage de gueule, comme le disent nombre de pancartes dans les manifs, « Faut pas pousser » : dès le « week-end noir », elles ont lutté pour leur droit de grève en imposant le respect des protocoles d’assignation (assignation en main propre avant le début de la grève et pour chaque jour de grève, si pas d’assignation en amont, pas de prise de poste) ; le 7 octobre elles ont organisé une journée sans sages-femmes.
Depuis, les collègues des hôpitaux de Saint-Denis ne lâchent rien. Elles ont notamment gagné, lors de négociations, une prime temporaire et l’embauche des nouvelles en « stage » pour la titularisation, pour celles et ceux qui le souhaitent (cela permet l’octroi de la prime d’installation).
La lutte continue pour une reconnaissance de leur travail, leur salaire et aussi, pour l’accès aux soins. Début octobre, elles diffusaient un communiqué de presse, depuis elles répondent aux différents médias, à différentes sollicitations d’éluEs, organisent des tables de rencontre sur l’hôpital, sur la ville... pour donner de la voix à leurs revendications et dénoncer la crise sanitaire : celle de la fuite des personnelEs par manque de reconnaissance du travail, les bas salaires, les réductions de budget que le gouvernement actuel n’a pas arrêté.
Embauches, augmentation des salaires, reconnaissance du travail !
CorrespondantEs NPA 93
• Hebdo L’Anticapitaliste - 589 (04/11/2021). Publié le Jeudi 4 novembre 2021 à 13h00 :
https://lanticapitaliste.org/actualite/social/sages-femmes-saint-denis-en-greve
Saint-Denis, maternité en danger, personnel mobilisé.
Depuis le 19 mai, les personnels de la maternité de l’hôpital Delafontaine à Saint-Denis (93), soutenus par les syndicats SUD, CGT, FO et CFDT, sont en grève reconductible contre les mesures d’austérité de la direction et du gouvernement.
Afin de sensibiliser les usagers et la population sur les raisons de leur mobilisation, les grévistes organisent différentes actions à l’hôpital mais aussi en ville.
Après un rassemblement de solidarité devant la maternité, le mardi 24 mai, nous avons retrouvé les grévistes au marché de Saint-Denis, le dimanche 29. Ils y ont installé une table pour recueillir des signatures et des dons.
De nombreuses personnes, parmi lesquelles des femmes qui ont accouché dans cette maternité, ont pu ainsi manifester leur solidarité.
Stéphanie, jeune sage-femme, activement impliquée dans la mobilisation, nous parle simplement mais avec conviction des revendications du personnel : « Nous allons avoir de nouveaux locaux mais il faut plus de personnels pour assurer la qualité du service et la sécurité des mamans et des bébés. Or, c’est le contraire qui est en train d’être mis en place : réduction des effectifs, développement de la polyvalence. On va demander au personnel d’être à la fois aide-soignants et auxiliaires de puériculture… Une puéricultrice pour 30 ou 40 bébés dans l’après-midi. Le service d’IVG au 2e étage mais le personnel concerné au 1er. En étant en sous-effectifs depuis des années, nous avons déjà touché un seuil critique. »
Une trentaine de sages-femmes assurent 3 200 accouchements par an dans des conditions difficiles. Même si la fatigue gagne le personnel, il ne veut en aucun cas que la santé des usagers de la maternité soit mise en danger. Comme les grévistes le signalent « Naître, c’est le premier acte social de tout individu, accoucher, c’est un acte citoyen, c’est initier l’avenir, pouvoir être entourée lorsque se termine une grossesse non désirée, c’est pouvoir plus tard se projeter dans l’avenir. C’est aussi un droit. »
Stéphanie le souligne, « nous irons jusqu’au bout ; nous n’abandonnerons pas nos mamans et nos bébés ».
Avec le soutien des personnels et des usagers, l’intersyndicale se prépare pour un nouveau tour des négociations pour la création des postes nécessaires pour un service public de qualité et en refusant activement la politique d’austérité et de la casse sociale.
Correpondante
• Hebdo Tout est à nous ! 105 (02/06/11). Publié le Vendredi 3 juin 2011 à 10h28 :
https://lanticapitaliste.org/actualite/social/saint-denis-maternite-en-danger-personnel-mobilise