Comme l’explique d’entrée de jeu L’Orient-Le Jour, “il est le plus haut gradé de l’appareil répressif syrien jamais appréhendé par une instance judiciaire située à l’étranger”. Jeudi 13 janvier, Anouar Raslan, ex-colonel des services de renseignements syriens, a été condamné à perpétuité par le tribunal régional de Coblence, en Allemagne.
L’homme “a été reconnu coupable de 27 meurtres, de torture sur des milliers d’autres personnes, ainsi que de violences sexuelles et d’autres crimes”, détaille le quotidien libanais. Des crimes qui remontent à la période allant d’avril 2011 à septembre 2012, aux prémices de la guerre civile en Syrie.
Ce verdict devrait enfin mettre un terme – du moins si Raslan ne fait pas appel de la décision – à un procès qui a débuté en avril 2020, et qui avait déjà débouché sur une condamnation mineure, celle d’Eyad Al-Gharib, qui a écopé de quatre ans et demi de prison en février dernier.
D’un point de vue strictement légal, note le média francophone, “pour pouvoir juger Anouar Raslan, l’Allemagne a eu recours au principe juridique de la ‘compétence universelle’, qui existe dans plusieurs autres pays européens à l’instar de la France, et qui permet de poursuivre les auteurs de certains crimes, quel que soit le lieu où ils ont été commis et la nationalité des auteurs ou des victimes”.
Un principe qui, dans le cas des criminels liés au régime de Bachar El-Assad, prend tout son sens puisque certains parmi eux ont fui la Syrie pour se réfugier en Europe, et en particulier en Allemagne. Anouar Raslan lui-même, indique d’ailleurs L’Orient-Le Jour, avait été reconnu à Berlin, en 2014, par Anouar Al-Bunni, “un avocat qui traque les criminels de guerre syriens depuis Berlin afin de les traîner devant les cours de justice européennes”. Son arrestation avait finalement eu lieu en 2019.
Un Raslan repenti ?
En réalité, fait tout de même observer le journal de Beyrouth, “le cas d’Anouar Raslan a fait débat parmi les opposants syriens, puisque certains d’entre eux ont rappelé que l’ancien colonel avait fui le pays en décembre 2012 pour rejoindre leur camp, participant même en 2014 à une conférence de paix à Genève en tant que représentant de l’opposition syrienne”. Ce supposé revirement avait même permis au militaire de rejoindre l’Allemagne légalement à l’aide d’un visa.
Néanmoins, la version d’un Raslan repenti n’a pas convaincu les juges, pour qui “ses prises de position adoptées après avoir fui le pays ne sont qu’une couverture”, indique le média libanais. Par ailleurs, même si l’ancien colonel avait changé de camp par conviction et non par intérêt, “sa responsabilité reste la même”, rappelle l’avocat et défenseur des droits humains syrien Mazen Darwish.
L’Orient-Le Jour
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