La température supérieure à 24°C en début de soirée a baissé jusqu’à 17°C vers 2h30 le 17. Pas de vent et ciel clair mais sans lune.
Nous avons déjà explicité l’intérêt des observations nocturnes des Hétérocères. Le lecteur pourra retrouver ces informations sur les précédents articles parus sur le site de Beaumonts Nature en Ville [et ESSF].
Les observations et photographies ont été réalisées sur un drap blanc éclairé par une lampe LepiLED (lampe à diodes électroluminescentes), sauf mention contraire.
Divers insectes appartenant à d’autres ordres que celui des Lépidoptères ont également été attirés par ces radiations lumineuses, essentiellement ceux d’Hyménoptères, d’Hétéroptères (punaises) et Coléoptères.
Quelques espèces non encore inventoriées sur le site se sont posées sur le drap. Les noms vernaculaires de ces espèces seront soulignés dans la suite du texte.
[Un imago est un adulte (volant)].
LÉPIDOPTÈRES
A Géomètres :
Parmi les espèces connues du parc nous avons retrouvé un imago de l’Alternée Epirrhoe alternata (Müller, 1764) ainsi qu’un autre de l’Horisme jumeau Horisme radicaria (de la Harpe, 1855).
Horisme jumeau, Horisme radicaria, le 16 juillet 2023, cliché : André Lantz.
Horisme jumeau, Horisme radicaria, le 16 juillet 2023, cliché : Pierre Rousset.
La phalène rustique Idaea rusticata (Denis & Schiffermüller, 1775) avait déjà été observée mais uniquement en journée.
Phalène rustique, Idaea rusticata, Beaumonts, 16 juillet 2023, cliché André Lantz
Phalène rustique, Idaea rusticata, Beaumonts, 16 juillet 2023, cliché Pierre Rousset
De même la phalène ocreuse Idaea ochrata (Denis & Schiffermüller, 1775) que l’on débusque facilement en journée dans les prairies, a été attirée par les rayonnements UV.
Phalène ocreuse Idaea ochrata, Beaumonts, 16 juillet 2023, cliché Pierre Rousset
Un imago de l’Impolie Idaea aversata (Linnaeus, 1758) s’est posé. L’habitus [comportement caractéristique] de cette géomètre correspond à la forme remutata L. qui est moins courante.
l’Impolie, Idaea aversata f. remutata ; Beaumonts, 16 juillet 2023, cliché : André Lantz
l’Impolie, Idaea aversata f. remutata ; Beaumonts, 16 juillet 2023, cliché : Pierre Rousset
La surprise est venue vers 2h du matin le 17 juillet. Une belle et grande géomètre jaune est apparue. Il s’agit de la Phalène de la Mancienne Crocallis elinguaria (Linnaeus, 1758) Son envergure peut atteindre 40mm. La couleur de fond des ailes antérieures et postérieures est jaune beige pâle. Les ailes antérieures sont traversées par une bande brunâtre foncée délimitée par deux lignes noires. Un point noir orne la cellule de l’aile antérieure. Il n’y a pas d’autres espèces voisines avec laquelle elle pourrait être confondue. La chenille se nourrit de diverses espèces arbustives, de ronce… « Répandu et commun dans tous types de milieux, y compris en ville. Une seule génération de juin à septembre » d’après Philippe Mothiron. Il est cependant curieux qu’il n’y ait pas de données connues sur le département de la Seine-Saint-Denis depuis 1997, d’après le site Lepinet de Philippe Mothiron.
Phalène de la Mancienne, Crocallis elinguaria, Beaumonts, 17 juillet 2023, cliché : André Lantz
Phalène de la Mancienne, Crocallis elinguaria, Beaumonts, 17 juillet 2023, cliché : Pierre Rousset
B Noctuelles
– Le Hibou Noctua pronuba (Linnaeus, 1758), commun au parc des Beaumonts. On le retrouve assez souvent de jour comme de nuit attiré par la lumière.
– La Troènière Craniophora ligustri (Denis & Schiffermüller, 1775) est aussi une espèce très commune déjà répertoriée aux Beaumonts. On la revoit chaque année lors de plusieurs observations nocturnes.
Troènière, Craniophora ligustri, Beaumonts, 17 juillet 2023. Cliché : André Lantz
Troènière, Craniophora ligustri, Beaumonts, 17 juillet 2023. Voilà ce que donne une photo au flash dans un bain de lumière bleue due aux verres teintés de la lampe à UV. Cliché : Pierre Rousset
– Mesoligia furuncula (Denis & Schiffermüller, 1775) est une plus petite noctuelle qui se nourrit de graminées. C’est une espèce univoltine que l’on peut observer de mai à juillet. Elle n’avait été observée en journée au parc en 2009 et2013. L’imago qui s’est posé sur le drap correspond à la forme vinctuncula Hübner, 1803. l’aile antérieure rousse est traversée par une bande médiane noire.
Procude furoncle, Mesoligia furuncula, Beaumonts, 16 juillet 2023, cliché André Lantz
Les « Écailles », nom donné aux Hétérocères souvent bien colorés, étaient placées dans la famille des Arctiidae. Maintenant des études plus poussées ont rangé ces espèces dans la sous-famille des Arctiinae dans les Noctuelles. 3 espèces de noctuelles ont été attirées.
– L’Écaille cramoisie ou l’écaille fuligineuse Phragmatobia fuliginosa (Linnaeus, 1758) n’avait pas encore été observée dans le parc. De taille modeste elle est reconnaissable à ses antérieures brun foncé et à la couleur rougeâtre de ses ailes postérieures. Les ailes paraissent très légèrement hyalines. La chenille vit sur les Myosotis, Rumex, Galium et autres plantes basses. Bivoltine, elle vole de mars à juin puis de Juillet à septembre. C’est une des espèces à sortir en début de nuit. Ce sont effectivement les premiers hétérocères qui sont venus sur le drap.
Écaille fuligineuse, Phragmatobia fuliginosa, Beaumonts, 16 juillet 2023, cliché André Lantz
Écaille fuligineuse, Phragmatobia fuliginosa, Beaumonts, 16 juillet 2023, cliché Pierre Rousset
– L’Écaille chinée Euplagia quadripunctaria (Poda, 1761), espèce très commune, souvent observée de jour car elle s’envole quand on la dérange. Elle est aussi attirée par la lumière. Un imago de grande taille est arrivé après-minuit.
Écaille chinée, Euplagia quadripunctaria, Beaumonts, 17 juillet 2023, cliché : Pierre Rousset
– La Lithosie complanule, la Lithosie plombée Eilema lurideola ( Zincken, 1817) est une Lithosie d’assez grande taille et commune. Les imagos possèdent une activité diurne et nocturne. Comme la majorité des Lithosies, la chenille se nourrit de Lichen. J’avais déjà trouvé la chenille de cette espèce aux Beaumonts, mais pas encore l’adulte. La chenille consommait le Lichen Xanthoria parietina. Deux imagos se sont posés avant minuit.
La Lithosie plombée Eilema lurideola, Beaumonts, 16 juillet 2023, cliché André Lantz
La Lithosie plombée Eilema lurideola, Beaumonts, 16 juillet 2023, cliché Pierre Rousset
C Pyrales
– L’Hydrocampe fausse éphémère ou Hydrocampe neigeuse Acentria ephemerella (Denis & Schiffermüller,1775) est une pyrale de la famille des Nymphulinae ou Acentropinae. Les espèces de cette famille sont aquatiques. C’est une petite espèce dont l’envergure ne dépasse pas 16 mm. En général l’envergure est pus proche de 8 à 10 mm. L’aile antérieure est beige blanchâtre et l’aile postérieure plus blanche. Les ailes n’ont absolument aucun motif. Les chenilles peuvent vivre dans l’eau jusqu’à 2m de profondeur. Elles consomment l’Élodée du Canada, des Potamots. La nymphose se fait aussi sous l’eau. Les femelles sont soit ailées et alors souvent d’envergure supérieure au mâle soit aptères. Les insectes ailés, souvent peu visibles sur la surface des mares ou étangs sont attirés par la lumière UV. Comme son nom l’indique la durée de vie des imagos est très limitée. Ayant déjà observé cette espèce dans d’autre lieux, j’espérai la retrouver sur le site. Quelques femelles et mâles ont donc satisfait ma curiosité.
L’Hydrocampe fausse éphémère Acentria ephemerella , Beaumonts, 16 juillet 2023, cliché : André Lantz
L’Hydrocampe fausse éphémère Acentria ephemerella , Beaumonts, 16 juillet 2023, cliché : André Lantz
– La Phycide de l’Aubépine Acrobasis advenella (Zincken, 1818) est une observation nouvelle pour le parc. La plante hôte des chenilles y est bien présente, mais les imagos n’avaient pas encore été détectés. Elle consomme aussi les Sorbiers et Pyracanthas que l’on trouve aussi dans le parc mais en sous-bois. Vole de mai à août. Elle est considérée comme assez commune par Patrice Leraut.
La Phycide de l’Aubépine Acrobasis advenella, Beaumonts, 16 juillet 2023, cliché : André Lantz
La Phycide de l’Aubépine Acrobasis advenella, Beaumonts, 16 juillet 2023, cliché : Pierre Rousset
– La Clédéobie étroite Synaphe punctalis ( Fabricius, 1775) appartient à la famille des Pyralinae.
Son envergure est d’une vingtaine de mm. L’aile antérieure est assez étroite et l’apex est pointu. La coloration est variable passant du gris-beige au au brun vineux. Le dimorphisme sexuel est assez prononcé. Les ailes du mâles sont plus larges et plus foncées que celles des femelles. Les chenilles vivent sur les mousses terrestres dans une galerie de soie. Elle prospère sur les terrains secs. L’adulte vole de juin à septembre. Cette espèce avait été découverte en 2022 lors d’une session lumineuse, mais c’est la première fois que l’on pouvait compter jusqu’à 6 à 7 individus des deux sexes sur le drap. Elle est peut être en progression sur le site. Le dimorphisme sexuel est bien marqué chez cette espèce. La femelle possède des ailes plus étroites que celles du mâle et leur coloration est nettement plus claire.
mâle de la Clédéobie étroite Synaphe punctalis, Beaumonts, 17 juillet 2023, cliché : André Lantz
femelle de la Clédéobie étroite Synaphe punctalis, Beaumonts, 16 juillet 2023, cliché : André Lantz
femelle de la Clédéobie étroite Synaphe punctalis, Beaumonts, 16 juillet 2023, cliché : Pierre Rousset
mâle de la Clédéobie étroite Synaphe punctalis, Beaumonts, 17 juillet 2023, clichés : Pierre Rousset
– L’Asopie flamme ou la Flamme, Endotricha flammealis (Denis & Schiffermüller, 1775) est aussi une Pyralinae (autrefois rangée dans la Famille des Endotrichinae) dont la couleur est très variable mais dont les lignes transversales sont bien distinctes. L’aile antérieure possède très souvent des franches blanches vers l’apex de l’aile antérieure qui lui donne un aspect un peu concave. de nombreuses formes ont été décrites. La chenille vit sur les plantes basses ; l’adulte vole de mai à septembre. On la rencontre en forêt, dans les les lisières les haies jusqu’aux abords des habitations. Plusieurs imagos se sont posés durant cette session. Cette espèce peut être débusquée de jour quand on la dérange. C’est la seconde fois qu’on l’observe au moyen de l’attraction lumineuse.
L’Asopie flamme Endotricha flammealis, Beaumonts, 16 juillet 2023, cliché : André Lantz
L’Asopie flamme Endotricha flammealis, Beaumonts, 16 juillet 2023, cliché : Pierre Rousset
D Tordeuses
Pas d’espèce nouvelle pour cette session. 3 espèces ont été observées.
– l’Acléride de l’Érable Acleris forsskaleana (Linnaeus, 1758) est une petite espèce d’environ 14mm d’envergure. L’aile antérieure est jaune clair, finement réticulée de brun roux et possédant une ligne noirâtre médiane coudée et épaissie en son milieu. Chez certains exemplaires de la forme agraphana (Klemensiewicz, 1904), cette ligne est presque inexistante. Un des deux imagos observés et dont la photo se trouve ci-dessous appartient sans doute à cette forme. L’espèce avait été vue une seule fois de jour en 2014 aux Beaumonts.
l’Acléride de l’Érable Acleris forsskaleana, photographié en studio, Beaumonts, le 16 juillet 2023, cliché : André Lantz
l’Acléride de l’Érable Acleris forsskaleana,. Beaumonts, le 16 juillet 2023, cliché : Pierre Rousset
– Le Clepsis des jardins Clepsis consimilana (Hübner, 1817) est aussi une petite tordeuse de couleur brune. L’imago observé est un mâle. La chenille est polyphage, se nourrissant de Lierre, Troène, Pommiers… Cette espèce est commune dans les parcs, jardins, même en ville. Elle avait été observée de jour en 2010, 2011 et 2013 mais jamais de nuit.
mâle du Clepsis des jardins Clepsis consimilana, Beaumonts, 16 juillet 2023, cliché : André Lantz
mâle du Clepsis des jardins Clepsis consimilana, Beaumonts, 16 juillet 2023, cliché : Pierre Rousset
Notons aussi un imago du Carpocapse des pommes Cydia pomonnella (Linnaeus, 1758) déjà observé à la lumière en 2022.
Carpocapse des pommes, Cydia pomonnella, Beaumonts, 16 juillet 2023, clichés : Pierre Rousset
E Yponomeutes
Un seul imago a été observé. Il est assez difficile d’identifier les espèces du genre sur un drap. Comme la couleur de l’aile antérieure est d’un blanc pur et que les franges sont bien blanches, on peut éliminer certaines espèces. Nous avions observé la nuit même plus d’une centaine d’individus de l’Yponomeute du cerisier de Sainte Lucie Yponomeuta mahalebella Guénée, 1845 dans le bas du parc sur plusieurs arbres dont les Cerisiers de Sainte Lucie, plantes nourricières des chenilles. On retrouve plusieurs de ces arbres sur l’ensemble du parc. Il est donc fort probable que cet imago appartienne à cette espèce. La tache jaune visible sur le thorax est due à une blessure de l’insecte car son hémolymphe est jaune.
Yponomeute du cerisier de Sainte Lucie Yponomeuta mahalebella, Beaumonts, 17 juillet 2023, cliché : André Lantz
Toile de chenilles du cerisier de Sainte Lucie tombée à terre en juin 2023, cliché : André Lantz
Yponomeute du cerisier de Sainte Lucie Yponomeuta mahalebella, photo prise en repartant autour des du cerisier de Sainte Lucie, Beaumonts, 17 juillet 2023, cliché : Pierre Rousset
On peut ajouter que les conditions particulièrement sèches du printemps ont été favorables à la prolifération des chenilles. Les cerisiers étaient entièrement défoliés. De nouvelles feuilles ont cependant repoussé vers la mi-juin, les chenilles étant nymphosées à cette époque.
Cerisier de Sainte-Lucie, défolié par les chenilles de Yponomeuta mahalebella, Beaumonts 2 juin 2023, cliché : André Lantz
COLÉOPTÈRES
Une espèce de taille assez imposante est arrivée de nuit. Elle n’avait pas encore été notée du parc.
Il s’agit du Silphe des rivages Necrodes littoralis (Linnaeus, 1758) appartenant à la famille des SILPHIDAE.
L’adulte est noir, excepté les derniers articles antennaires qui sont roux. On distingue 3 côtes sur chaque élytre ainsi qu’une petite gibbosité transversale entre la deuxième et la troisième côte vers les deux tiers des élytres. Les fémurs des pattes postérieures sont bien arqués. Cette espèce est attirée par la lumière comme l’ont constaté plusieurs entomologistes. Comme son nom de genre l’indique, ce coléoptère se nourrit d’animaux morts, souvent de mammifères. C’est donc un insecte utile car il élimine les chairs des cadavres d’animaux, évitant ainsi la prolifération d’organismes susceptibles de produire des maladies pour l’homme et des animaux. Il peut se déplacer sur de grandes distances. Les récepteurs olfactifs de ces antennes lui permettent de détecter sa nourriture. Plutôt forestier, il recherche d’avril à septembre le cadavre des gros animaux morts. Il a été parfois observé sous les varechs en décomposition au bord de la mer d’où le nom d’espèce qui lui avait été attribué. Les larves consomment les chairs en putréfaction des cadavres. Pour cette espèce, sur le site de l’INPN figurent en Île de France une petite cinquantaine de données dont plusieurs versées par un collègue de l’OPIE Bruno Mériguet. En Seine-Saint-Denis quelques unes se situent sur la commune de Villepinte en 2003.
Silphe des rivages Necrodes littoralis, Beaumonts, 17 juillet 2023, cliché : André Lantz
Silphe des rivages Necrodes littoralis, Beaumonts, 17 juillet 2023, cliché : André Lantz
Silphe des rivages Necrodes littoralis, Beaumonts, 17 juillet 2023, cliché : Pierre Rousset
HÉMIPTÈRES
Nous avons retrouvé les petites punaise du genre Callicorixa . Plus d’une dizaines d’adultes ont été comptés. On distingue sur le cliché ci-dessous, les pattes de l’adulte qui servent de rames pour se déplacer en milieu aquatique.
petite punaise aquatique Callicorixa sp, Beaumonts, 16 juillet 2023, cliché André Lantz
petite punaise aquatique Callicorixa sp, Beaumonts, 16 juillet 2023, cliché Pierre Rousset
André Lantz le 22 juillet 2023
Littérature consultée :
– Inventaire commenté des Lépidoptères de l’Île-de-France I. Noctuelles 1997, Philippe Mothiron : supplément hors-série au tome 19 d’Alexanor.
– Inventaire commenté des Lépidoptères de l’Île-de-France II. Géomètres 2001, Philippe Mothiron : supplément hors-série au tome 21 d’Alexanor.
– Inventaire commenté des Lépidoptères de l’Île-de-France III. Bombycoïdes 2010, Philippe Mothiron : supplément hors-série au tome 21 d’Alexanor.
– Papillons de nuit d’Europe, volume 2 Géomètres ; Patrice Leraut,N.A.P. Éditions, 2009
– Papillons de nuit d’Europe, volume 6 Noctuelles 2 ; Patrice Leraut,N.A.P. Éditions, 2019
– Papillons de nuit d’Europe, volume 4 Pyrales 2 ; Patrice Leraut,N.A.P. Éditions, 2019
– Papillons de nuit d’Europe, volume 7 Microlépidoptères 1 ; Patrice Leraut,N.A.P. Éditions, 2023