« Il relève du domaine du Parlement et des organes législatifs des Etats de décider de la loi sur le mariage », a tranché le président de la plus haute cour du pays, D.Y. Chandrachud.
L’arrêt de la Cour a relevé que le droit au mariage pour tous n’est pas garanti en l’état actuel par la Constitution.
Le magistrat a toutefois souligné que l’Inde avait le devoir d’accorder une forme de reconnaissance aux relations entre personnes de même sexe, et celui de protéger ces dernières contre toute forme de discrimination.
Cinq ans après la décriminalisation de l’homosexualité dans le pays par la plus haute institution judiciaire, 21 couples de même sexe et leurs avocats avaient obtenu, en avril, que la question du mariage gai soit examinée par la Cour. Les couples ont témoignés en avril et mai que les lois qui les empêchent de se marier les rendent « des citoyens de seconde classe ». Ils demandaient que l’Inde traite la communauté LGBT+ comme des citoyens égaux en vertu de sa Constitution.
Mardi, la déception s’est lue sur le visage des personnes qui s’étaient rassemblées devant le tribunal à New Delhi avec l’espoir que l’Inde devienne le plus grand pays au monde à reconnaître le mariage homosexuel. En Asie, seul Taïwan reconnaît le mariage entre personnes de même sexe.
« Nous ne sommes pas satisfaits de ce que le tribunal a dit », a témoigné Siddhant Kumar, 27 ans. « Cela fait des années que nous luttons pour une reconnaissance légale », a-t-il ajouté. « Nous devons rester forts et poursuivre notre combat. »
Une légalisation du mariage entre personnes de même sexe aurait notamment permis à la communauté LGBT+ un meilleur accès à l’adoption, aux assurances ou encore à l’héritage, avaient souligné les signataires de la requête.
Cette décision aura un impact sur des millions de personnes LGBTQ+ en Inde où on estime que la communauté LGBTQ+ compte de manière conservatrice plus de 80 millions de personnes adultes.
« Unité familiale »
Mais le gouvernement nationaliste hindou du Premier ministre Narendra Modi s’y est fortement opposé et a déclaré que tout changement de la loi relevait du Parlement et non des tribunaux, une ligne finalement suivie par la Cour suprême.
« Toute ingérence dans ce domaine (…) perturberait complètement l’équilibre délicat des lois relatives à la personne dans le pays et les valeurs sociétales acceptées », a déclaré le gouvernement dans un mémoire adressé à la Cour.
« Vivre ensemble en tant que partenaires et avoir des relations sexuelles entre personnes du même sexe (…) n’est pas comparable au concept de l’unité familiale indienne, composée d’un mari, d’une femme et d’enfants », a-t-il ajouté.
La Cour suprême a autorisé mardi la reconnaissance du mariage pour les couples dont l’un des membres est transgenre, à la condition qu’ils soient respectivement identifiés comme un « homme » et une « femme ».
En Inde, les lois sur le mariage sont régies par des lois codifiées en fonction de diverses communautés religieuses.
En 2018, un arrêt historique a annulé une loi datant de l’époque coloniale qui interdisait les relations sexuelles entre individus de même sexe et, l’année dernière, la Cour a statué que les partenaires non mariés ou les couples de même sexe avaient droit à des prestations sociales.
« Notre capacité à ressentir de l’amour et de l’affection l’un pour l’autre fait de nous des êtres humains », a relevé le juge D.Y. Chandrachud. « Cette cour a reconnu que l’égalité exige que les unions homosexuelles et les personnes homosexuelles ne fassent pas l’objet de discriminations. »
Siddhant Rai, 20 ans, qui s’était rendu à la Cour suprême pour la décision, a reconnu être désabusé. « Aussi longtemps que le BJP (le parti au pouvoir de M. Modi, ndlr) sera au pouvoir, je n’imagine pas de jugement en notre faveur dans un futur proche. »
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