Gaza sous les bombes est plus coupée du monde encore : les informations et les images arrivent peu, du moins dans les médias français. En Cisjordanie les exactions des colons se multiplient, ainsi que les expulsions. Il ne s’agirait donc pas seulement de se « venger » du Hamas en faisant payer la population de Gaza mais aussi d’accélérer le processus de nettoyage ethnique.
Depuis le 7 octobre, la guerre larvée qui dure depuis des décennies est devenue une guerre ouverte, avec ses crimes, dans laquelle nombre de pays occidentaux ont accordé à Israël « le droit de se défendre ».
Criminalisation du soutien au peuple palestinien
Dès le début de cette nouvelle phase du conflit, le gouvernement français s’est aligné sur cette rhétorique, allant jusqu’à considérer que des manifestations en soutien au peuple palestinien pourraient constituer un « trouble à l’ordre public » et à les interdire au motif d’empêcher des actes terroristes après l’assassinat de Dominique Bernard. Quelques préfectures ont fait d’ailleurs preuve d’un grand zèle en visant en particulier notre organisation, en ne citant qu’un seul de nos textes et parfois en rappelant des manifestations non autorisées du printemps 2023 contre la réforme des retraites. Ce qui ne nous a pas empêchéEs d’exprimer notre soutien au peuple palestinien.
Ce qui n’a pas empêché bien des personnalités de s’exprimer, au-delà de l’émotion et de la sidération des jours qui ont suivi le 7 octobre, pour que le débat public revienne à la raison [1]. Les intimidations de l’État français sont un des pans de la bataille idéologique qui a cours tandis que les bombes tombent…
Changement de ligne
La visite de Joe Biden a peut-être ralenti l’avancée terrestre des forces armées israéliennes pourtant annoncées par le gouvernement Nétanyahou. Des otages ont pu sortir de la bande de Gaza. La ligne globale reste le soutien inconditionnel à Israël. Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission européenne, en visite le 13 octobre a également joué cette carte. Elle a au passage mécontenté plusieurs pays européens, comme l’Espagne, le Portugal, l’Irlande, la Belgique et le Luxembourg, non alignés sur sa position.
Jusqu’à la présidence Sarkozy, la France elle-même tenait une position diplomatique plutôt en faveur des PalestinienEs. Sous Sarkozy et Hollande s’opère « un tournant silencieux », selon les mots d’Alain Gresh [2]. Un tournant désormais claironné, notamment par Yaël Braun-Pivet, la présidente de l’Assemblée nationale en visite en Israël le 22 octobre, à grand renfort d’accusations d’antisémitisme à l’encontre de toutes celles et ceux qui rappellent la légitimité du combat des PalestinienEs pour leurs droits. Macron lui-même, fidèle à sa politique du « en même temps », a pu se dire le 24 octobre favorable à ce que « nous puissions bâtir une coalition régionale et internationale pour lutter contre les groupes terroristes qui nous menacent tous » et à une « relance décisive du processus politique avec les Palestiniens ». Comprenne qui pourra !
Solidarité internationale
Les peuples opprimés qui luttent pour leurs droits n’ont rien à attendre des puissances impérialistes, fussent-elles sur le déclin, comme la France. Ils ont tout à gagner à établir des solidarités élémentaires. Comme à Londres où les manifestantEs étaient près de 100 000 samedi 21 octobre, il nous faut poursuivre et amplifier la mobilisation dans l’unité la plus large pour un cessez-le-feu immédiat et l’arrêt de la colonisation.
Clémentine Berthe