Le Rafi Peer Theater Workshop [1] n’est pas une ONG tout à fait comme les autres… Les ateliers d’expression de Rafi Peerzada entendent « servir la société à travers l’art du spectacle, divertir en utilisant le potentiel de l’artiste qui est en chacun de nous ». A commencer par le Festival folklorique de marionnettes qui a déjà acquis une renommée internationale, malgré un climat local hostile et des plus instables. Traditionnel et expérimental, cet événement a lieu chaque année au Musée de la marionnette.
Et si les enfants rencontraient les fantoches ?
Le Rafi Peer Theater Workshop (RPTW) a toujours souhaité conduire des actions auprès des jeunes pour développer leur esprit artistique. Une façon de les sortir de l’oppressante réalité sociale pakistanaise. « C’est l’occasion d’aborder avec eux des thématiques pacifistes, de discuter de justice, de solidarité. Et d’imaginer. De rêver. De créer », précisent les Peerzada. Créé récemment à Lahore [2], le Musée de la marionnette a pour but de rassembler les cultures autour de poupées fantoches. Le RPTW donne aujourd’hui l’opportunité à des milliers d’enfants de découvrir cet endroit magique. Pour ce faire, un projet innovant a été lancé l’an passé : l’acquisition de trois bus qui permet d’y emmener 33 000 enfants par an. « Le projet vise à apporter une expérience artistique aux jeunes, à encourager la compréhension mutuelle et l’échange interculturel grâce au langage universel des marionnettes », précise Sanaa Hamid [3].
Les bus amènent les enfants de leur école au Musée où ils découvrent des centaines de “puppets’’ venant de tous les coins du globe. Puis les écoliers confectionnent leur propre marionnette. Ils jouent aussi un peu de musique, admirent un spectacle et continuent de rêver…
De l’expression théâtrale locale au festival international
Depuis sa première représentation de marionnettes il y a 33 ans, le RPTW a déjà fait partager plus de 2 500 spectacles qui ont rassemblé quelque 3 000 artistes issus d’une soixantaine de pays. Entre ateliers et festivals, théâtre et marionnettes, danse et musique, la compagnie tente de sensibiliser un large public, des lointaines contrées rurales jusque sur la scène internationale. Née en 1974 dans une période de grande oppression [4], l’ONG est l’une des plus anciennes compagnies d’art dramatique au Pakistan. Rafi Peerzada est considéré comme le véritable père du théâtre moderne dans la région. Au fil du temps, il a développé de nombreuses activités pour vulgariser l’art dans un pays où toute expression est toujours très contrôlée par les autorités [5].
Ayant démarré avec des petits spectacles de marionnettes, le théâtre a vite pris une dimension hors frontières à travers rencontres, festivals et coproductions internationales -avec l’Europe notamment-, tout en sachant rester proche du peuple. C’est ce qui fait sa force.
L’art est la vraie réflexion des sociétés
Avec 24 festivals culturels à son actif, le RTPW joue sur de nombreuses disciplines artistiques. Parmi ces rencontres, le World Performing Arts Festival [6] est organisé depuis 17 ans à Lahore. C’est l’occasion pour 600 artistes du monde entier de présenter leurs créations. Un vrai melting-pot artistique qui aura lieu cette année du 22 novembre au 2 décembre. Le RPTW donne aussi le LA en organisant depuis 6 ans l’International Mystic Music Sufi Festival 6 afin de promouvoir la musique soufi.
« L’art est la vraie réflexion des sociétés, de son idéologie et de ses croyances. Lorsque nous avons organisé notre premier festival international en 1992, nous voulions que la scène artistique locale serve de baromètre culturel pour les délégations étrangères en leur montrant la richesse artistique de notre pays, souvent ignorée par les médias internationaux. » La famille Peerzada est passionnée. Elle relève un sacré challenge étant donné l’actuel contexte sociopolitique national. « Grâce à ces festivals interculturels, nous pouvons établir une plateforme vitale pour l’échange et la liberté. »