Les secousses de la guerre entre le Hamas et Israël se font sentir jusqu’en Tunisie. Là, la petite communauté juive craint de faire les frais des événements en cours dans la bande de Gaza, observe le site d’information panarabe Al-Monitor.
Dans la ville d’El-Hamma, dans le sud du pays, un site sacré a été incendié et gravement dégradé par une foule en colère lors d’une manifestation propalestinienne. Dans la nuit du 17 au 18 octobre, soit quelques heures après l’annonce de l’explosion survenue à l’hôpital Al-Ahli, à Gaza, des centaines d’hommes “brandissant des drapeaux palestiniens et scandant des slogans islamistes” s’en sont pris au sanctuaire du rabbin Youssef El-Maarabi.
Al-Monitor note que la tombe de ce sage du XVIe siècle n’était pas un lieu de culte très fréquenté. Pourtant, l’événement fait craindre une montée de l’antisémitisme à l’encontre de la petite communauté juive du pays. “À chaque fois que des Palestiniens sont tués, les Juifs de Tunisie sont attaqués à leur tour. C’est un rituel”, témoigne Rafram Chaddad, artiste tunisien juif, qui a beaucoup milité en faveur de la cause palestinienne, ajoutant :
“Je n’oserais pas me montrer dans la rue en ce moment.”
Une communauté juive qui se réduit
La crainte est également justifiée par le discours ambigu du président Kaïs Saïed, qui cultive l’art du populisme et du complotisme. “La bataille d’aujourd’hui est menée contre le sionisme international. Nous ne voulons pas qu’on dise que nous sommes contre les Juifs. Nous ne sommes pas contre les Juifs, et nous n’avons jamais été la cause des holocaustes auxquels les Juifs ont été soumis”, a déclaré le président tunisien après l’attaque d’El-Hamma, sans condamner clairement les débordements.
Au lendemain de l’indépendance du pays, en 1956, la Tunisie comptait près de 150 000 Juifs. Après le départ des Français, un grand nombre d’entre eux ont choisi de partir en Israël. Après la guerre des Six-Jours, en 1967, une seconde vague a émigré vers l’État hébreu.
Aujourd’hui, la communauté juive est estimée à environ 1 000 personnes, concentrées principalement sur l’’île de Djerba, qui abrite l’une des plus anciennes synagogues d’Afrique. Chaque année, au mois de mai, des milliers de pèlerins juifs venus des quatre coins du monde affluent dans l’île. En mai, en plein pèlerinage, un agent de la garde nationale avait ouvert le feu sur la foule de fidèles, tuant deux personnes.
Courrier International
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