Après le vote du Sénat sur la de base de Vicenza on nous demande qui est qui met en danger le gouvernement Prodi. La gauche « radicale » et ses « dissidents » ou « la sirène néocentriste » ?. La réponse est peut-être plus simple, parce que toute l’activité de l’exécutif montre que le principal responsable c’est Prodi lui même, vu l’engagement qu’il prodigue à décevoir et à démotiver son électorat.
Vicenza est le cas le plus emblématique mais l’Afghanistan n’est pas une plaisanterie et il ne s’agit pas non plus de plaisanteries en ce qui concerne la réforme des retraites, les nouvelles privatisations, la timidité sur les PACS.
Le problème, qui n’est pas accessoire mais fondamental, c’est que la gouvernement, s’il continu ainsi, se condamne non seulement à la disparition, mais qu’il contribuera à délégitimer pour l’avenir le concept même de la gauche, toujours plus associé à « la guerre multilatérale », aux « fonds de pension », aux « linceuls des libéralisations » etc. C’est une bonne colle pour constituer le Parti démocrate mais une manière de dissoudre la gauche, qui risque d’atteindre même sa partie « radicale » si elle reste confinée « à réduire les dégâts » des politiques de gouvernement. Seulement neuf mois après les élections, en effet, ce mélange a produit un renforcement significatif des droites et un ternissement non seulement de l’image pacifiste de l’actuel gouvernement mais de toute sa dynamique de transformation. La gauche s’acharne à défendre l’ordre existant en minant et en niant sa fonction historique et sa nature. La droite se renforce.
De tout ceci on discute peu dans le cadre complexe de la réorganisation en cours. Et c’est à ce débat qu’en tant que courant de Rifondazione, nous avons décidé de contribuer en nous transformant en une association « interne-externe » au parti, la Gauche critique, au cours de l’assemblée tenue le samedi dernier. Un tournant dont l’objectif n’est pas la scission mais la définition en positif un projet et une orientation de travail. En dépassant même les connotations idéologiques du siècle passé — par exemple les définitions comme celle de trotskistes — et en visant à un sérieux travail de recherche, tout en sachant que les importants points de référence du XXe siècle, de Trotski à Luxemburg, de Gramsci à ce bon vieux Che Guevara, doivent être mis à l’épreuve aujourd’hui avec le nouvel internationalisme, le féminisme, la critique écologiste. Nous avons cependant choisi une orientation limpide, la seule qui soit en mesure de résister au coups de l’offensive libérale, celle de l’anticapitalisme, qui doit évidemment être repensé, précisé, décliné. Pour ce faire nous nous sommes risqué à tenter d’entreprendre un travail antique autour du « manifeste programmatique » ou de la définition méticuleuse d’orientations concrètes.
Le camp de l’anticapitalisme reste aujourd’hui le seul où il est possible d’imaginer un avenir différent divergé et ce pour des raisons que le mouvement altermondialiste n’a rendu que plus qu’évidents. Un camp de recherche, évidemment, qui ne peut pas ne pas faire des comptes des défaites du XXe siècle, mais surtout un camp au sein duquel la reconstruction d’un « sujet de la transformation » — un sujet pluriel et sexué — qui aujourd’hui apparaît au contraire dispersé, démantelé et vaincu, prend tout son sens. Un sujet, un protagoniste, au quel la Gauche devrait dédier toutes ses énergies en comprenant que ce travail de reconstruction est rendu plus difficile à réaliser quand on est au gouvernement. Au contraire, cet emplacement risque d’alimenter un travail de Sisyphe moderne où ce qui s’est construit dans la « lente impatience » du mouvement est défait et
broyé par l’action du « gouvernement ami ». Autre chose est la patiente recherche de l’unité sociale pour des campagnes, des mobilisations, des luttes culturelles qui puissent aspirer dans le temps et avec la nécessaire accumulation de force, à la perspective du gouvernement. Il est à peine nécessaire de préciser que Morales ou Chavez sont d’une autre trempe que Prodi ou Ségolène Royal.
Une gauche anticapitaliste est ce qui devrait constituer la préoccupation de la plupart d’entre nous aujourd’hui et si son ancrage de classe en constitue l’ordonnée, le non à la guerre « sans si et sans mais » en représente l’abscisse. Pour cette raison la motion finale de notre assemblée a indiqué que le choix sur l’Afghanistan n’est pas discutable et que nous continuerons donc à dire Non au refinancement des missions. Parce que si elle ne dit pas non à la guerre, avec netteté et clarté, une gauche du futur n’ira nulle part.