Alain Delon lors de la cérémonie l’élevant au rang de commandeur des Arts et des Lettres en présence de Jean-Marie Le Pen le 26 mai 1986 à Paris. FREDERIC REGLAIN/GAMMA-RAPHO VIA GETTY IMAGES
CINÉMA - Une icône culturelle qui sent quand même un peu la naphtaline. Alors que la mort d’Alain Delon ce dimanche 18 août affecte le cinéma français et international, une grande partie de la droite française s’est empressée de saluer la mémoire de ce monument de la culture française.
Rien d’anormal à cela, quand on connaît les prises de position conservatrices de l’acteur, né en 1935 dans une tout autre France que celle d’aujourd’hui. Gaulliste revendiqué, le comédien n’a jamais caché ses opinions politiques, soutenant plusieurs candidats de droite au fil des élections présidentielle françaises.
Favorable à la peine de mort, il s’était notamment positionné en faveur de Valéry Giscard d’Estaing en 1974 et 1981, avant de soutenir Raymond Barre, Jacques Chirac ou Nicolas Sarkozy lors élections suivantes. Pour Raymond Barre, qu’il comparait à de Gaulle, il s’était d’ailleurs transformé en mascotte, allant jusqu’à introduire son clip de campagne.
Vidéo : Raymond Barre, campagne présidentielle 1988 | Archive INA
Passionné par la figure du général de Gaulle, Alain Delon avait d’ailleurs racheté le manuscrit de l’appel du 18 juin en 1971 pour éviter qu’il ne parte à l’étranger, comme le rappelle Le Figaro.
Idylle générationnelle
Ce que l’on sait moins sur Alain Delon, c’est qu’il partageait une certaine accointance avec le fondateur du Front national, Jean-Marie Le Pen. Une amitié discrète mais assumée, comme ce fut le cas en 1987, lorsqu’il déclara avoir « des points d’accord et de désaccord » avec cet « ami de longue date ». Alain Delon disait même être « très “sympathisant” de Monsieur Le Pen », tout en soutenant Raymond Barre à la même période.
Une amitié qui trouve son origine dans le passé commun des deux hommes, tous deux ayant participé à la guerre d’Indochine. Jean-Marie Le Pen était d’ailleurs présent sur la liste des invités d’Alain Delon lors de son élévation au rang de commandeur des Arts et des Lettres par Jack Lang, en 1986.
Sans jamais s’engager franchement pour le FN, Alain Delon avait malgré tout adoubé le parti des Le Pen en 2013 lorsqu’il avait affirmé dans le journal suisse Le Matin qu’il souhaitait que « le Front national prenne une place très importante » dans le paysage français. « Je l’approuve, je le pousse et le comprends parfaitement bien », assurait-il. Des déclarations qui lui avaient valu d’être particulièrement critiqué, en plus de perdre son titre de président à vie du Comité Miss France.
« Je n’ai pas dérapé. Je suis gaulliste depuis quarante ans mais il faut vivre avec son temps. On ne peut pas être gaulliste dans un monde hollandiste », avait-il répondu dans le même journal face au tollé provoqué par son soutien au parti de Jean-Marie Le Pen. On a « voulu me coller l’étiquette extrême droite parce que j’ai raconté que j’étais copain avec Le Pen depuis l’armée. Non, je suis de droite, point », nuançait-il quelques années plus tard dans le JDD.
« Raciste, homophobe et misogyne »
Des positions et sorties conservatrices, Alain Delon en a quelques unes au compteur. Pas étonnant donc de le voir s’afficher avec la fervente opposante au mariage pour tous Christine Boutin en 2014 pour la campagne des européennes, assurer au journal L’Express en 1977 qu’il était « fasciste » ou assumer des violences conjugales en déclarant dans l’émission Thé ou Café en 2018 : « Machiste ? Ça dépend de ce que vous appelez machiste. Si une gifle c’est machiste, oui j’ai dû être machiste. »
Interpellé dans l’émission C à Vous en 2013 après des propos sur l’homosexualité dans les colonnes du Figaro (« On a l’air de sous-entendre qu’être avec quelqu’un du sexe opposé ou du même sexe, c’est pareil. Ça, c’est grave ! »), l’acteur s’était une nouvelle fois retrouvé au cœur d’une polémique en affirmant n’avoir « rien contre les gays qui se mettent ensemble » mais qu’il considérait l’homosexualité comme étant « contre-nature ». Avant de se reprendre pour réduire la portée de ses propos à l’adoption des couples homosexuels, comme vous pouvez le revoir dans la vidéo ci-dessous.
Vidéo : Delon : l’homosexualité est contre-nature
En 2019, avant de recevoir la Palme d’or d’honneur du Festival de Cannes pour l’ensemble de sa carrière, l’acteur de Paris brûle-t-il ? ou Borsalino avait également été attaqué par l’association américaine Women and Hollywood, qui militait pour que le festival cannois renonce à cette remise de prix, jugeant Alain Delon « raciste, homophobe et misogyne ». En s’appuyant sur un bon nombre d’exemples cités plus tôt. « Je n’ai jamais harcelé une femme », avait-il tenu à répondre à ses accusatrices.
Pas à une incohérence près, Alain Delon pouvait se montrer plus tolérant qu’il n’en avait l’air. Sa longue collaboration avec le réalisateur italien Luchino Visconti, homosexuel et sympathisant de la cause communiste, ou son soutien à la marie PS de Paris Anne Hidalgo pour les municipales de 2014 sont là pour le prouver.
Maxime Birken