Où sont passés les engagements politiques ?
« Ce quinquennat sera écologique ou ne sera pas ». Cette phrase du président Macron le 16 avril 2022 dans l’entre-deux tours des élections présidentielles qui aboutiront à ouvrir son second mandat, résonne de façon particulière aujourd’hui. Les dernières années de gouvernement du président sans majorité absolue ont connu des régressions importantes du droit de l’environnement, passées souvent en force, comme des atteintes aux libertés associatives et à la démocratie participative. Ces ingrédients nuisent aujourd’hui gravement aux capacités de notre société à faire face aux constats de plus en plus alarmants des scientifiques tout en tentant d’empêcher la société civile de se faire entendre et de faire entendre les solutions à la triple crise du dérèglement climatique, de l’effondrement de la biodiversité et de la pollution généralisée de notre planète.
La campagne électorale qui a suivi la dissolution de l’Assemblée nationale a relayé en arrière-plan les enjeux écologiques, quand elle n’en a pas fait un sujet épouvantail et repoussoir. Aujourd’hui, le « gouvernement de gestion » poursuit ses actions politiques régressives, en particulier dans le cadre de la préparation du projet de budget 2025, dans lequel plusieurs grands engagements pour la transition énergétique ou la biodiversité sont piétinés : baisse de 35% du budget de l’ADEME, chute de 60% du budget du fonds vert, rabotage de 25% du budget de la Stratégie nationale pour la biodiversité….
Nos attentes
Demain, qui que soit la ou le Premier ministre, qui que soient les ministres, la question centrale est de savoir comment le gouvernement sans majorité pourra relever le défi de la transformation écologique et sociale tout en renforçant notre démocratie qui en a grand besoin. Sur quel modèle de société, sur la base de quelle volonté de transformation sociale ?
France Nature Environnement rappelle ses attentes au prochain gouvernement, comme elle l’a déjà fait auprès des parlementaires nouvellement élu·es depuis maintenant 8 semaines :
7 mesures
Et si… ? 7 mesures pour prendre soin les un·es des autres et de notre environnement
Publié le 25 juin 2024
Et si nous imaginions une société construite sur autre chose que la haine, le dénigrement et la peur ? Et si nous faisions appel à l’intelligence collective et à l’empathie pour relever ensemble les immenses défis auxquels nous sommes confrontés ? Et si nous faisions confiance aux citoyennes et citoyens plutôt qu’aux vendeurs de peurs ? Un autre futur est possible, juste, désirable, vivable. Voici nos 7 propositions.
1. Et si… nous inscrivions le retour aux limites planétaires comme nouvelle boussole politique ?
Aujourd’hui, si tout le monde vivait comme les Françaises et les Français, il faudrait trois planètes Terre pour répondre à nos besoins. Il est urgent de revenir dans les limites planétaires, c’est-à-dire ne consommer en un an que ce que la planète peut produire chaque année. C’est du simple bon sens ! Nous demandons de ne pas restreindre la « transition écologique » à la seule « décarbonation de l’énergie », mais à ce que l’objectif de retour des activités humaines dans les limites planétaires à l’horizon du milieu du siècle soit inscrit dans la loi et serve de boussole à l’ensemble des politiques publiques.
2. Et si… nous débattions et imaginions ensemble ce futur désirable ?
Revenir dans les limites planétaires va engendrer des changements majeurs dans nos modes de vie. Ces changements, c’est ensemble qu’il faut les imaginer, les construire. Parce qu’il y a plus d’intelligence dans 68 millions de cerveaux que dans 577, nous demandons l’organisation d’états généraux du futur désirable, en s’appuyant sur les nombreux travaux de la société civile organisée (Conseil Economique Social et Environnemental et CESE Régionaux notamment) pour mettre sur pied, partout en France, des ateliers-débats apaisés permettant de réparer le tissu social abîmé et se tourner collectivement vers un avenir juste et durable.
3. Et si… nous remettions la connaissance scientifique au cœur des discussions et des décisions ?
Climat, biodiversité, eau, alimentation, santé… Nous disposons d’un corpus scientifique d’une immense richesse. Appuyons-nous collectivement sur la connaissance scientifique pour imaginer notre avenir et prendre nos décisions. Pour cela, il faut renforcer la recherche dans ces domaines, reconnaitre la richesse des expertises d’usage et de la science participative, renforcer les organes de conseil et d’évaluation des politiques publiques comme le Haut Conseil pour le Climat, le Conseil Nationale de la Transition Ecologique, le Conseil National de la Biodiversité ou le Conseil National de la Protection de la Nature. C’est sur la base de ce savoir scientifique, partagé et accepté, que doivent se tenir les ateliers-débats permettant d’imaginer une société juste et durable.
4. Et si… nous reconnections l’humain à la nature ?
L’humanité fait partie de la nature. La construction collective de notre futur désirable nécessite de restaurer une relation sensible à notre environnement par la connaissance et l’expérimentation du rapport au vivant. Cela implique de développer le rapport à la nature dans l’éducation, repenser les rapports de nos sociétés à la propriété des sols et des ressources naturelles. Cela implique de nous reconnecter, citoyennes, citoyens, responsables publics, services publics, à notre environnement.
5. Et si… nous faisions de la France un Etat exemplaire en Europe, et de l’Europe un continent exemplaire dans le monde ?
Nous sommes déjà au mitan de cette décennie cruciale pour le climat, la biodiversité, la planète. Le sujet est mondial et impose de la solidarité et de l’exemplarité à cette échelle. C’est maintenant que les décisions, fortes, courageuses, structurantes, doivent être prises pour que dans 20, 30, 50 ans, nous puissions continuer à habiter une planète vivable. Nous vivons dans un monde en plein bouleversement. Soit nous les ignorons et les subissons, soit nous choisissons de regarder la réalité en face, telle que nous la décrivent les scientifiques, et agissons maintenant. La France, par sa culture scientifique et démocratique, a la capacité d’imaginer un futur juste et soutenable et d’inspirer l’Europe dans cette démarche. Faisons preuve d’audace !
6. Et si… nous faisions confiance aux territoires et aux associations de terrain ?
Nous sommes sincèrement persuadé·es que la transition écologique devra se faire dans les territoires. En tant que fédération, nous le constatons quotidiennement : c’est l’ensemble des acteurs des territoires qui transforme une politique publique en réalité. Et les associations ont un rôle clé à jouer pour cela, via leurs activités de sensibilisation (le réseau FNE touche plus de deux millions de personnes par an via ses actions d’éducation-sensibilisation-formation), les projets positifs qu’elles initient avec l’ensemble des acteurs locaux, leur participation aux diverses instances de dialogue locales afin d’y représenter l’intérêt général, leur action de protection, gestion, connaissance du milieu… Consolidons le maillage associatif en lui donnant les moyens de jouer son rôle de relais vers les citoyen·nes.
7. Et si… nous faisions du bonheur humain et de la bonne santé des écosystèmes les premiers indicateurs de réussite des politiques publiques ?
Oui, la situation est extrêmement grave, oui, il faut agir très rapidement, oui, nous sommes confronté·es à des enjeux comme jamais dans l’histoire de l’humanité. Mais il est trop tard pour être pessimiste ! La transformation écologique est vitale, et pour réussir elle doit être juste, inclusive et heureuse, et se déployer sur une planète en bonne santé. Elle doit permettre à chacun et chacune d’exprimer sa diversité. L’indicateur de croissance économique n’a jamais été adapté et est décorrélé depuis longtemps du développement humain et du bonheur. Il est au contraire largement corrélé à la mauvaise santé de nos écosystèmes. Inventer de nouveaux critères de développement, post-croissance, est indispensable.
France Nature Environnement (FNE)
Pour aller plus loin
Législatives 2024 : mobilisons-nous contre l’extrême-droite et pour le vivant