La guerre israélienne dans la Bande de Gaza a placé les Palestiniennes dans des situations tragiques, où elles souffrent de problèmes accrus de santé mentale, de violence de genre et de difficultés à accéder à des services de santé ou à des soins menstruels, a conclu une enquête.
Cette nouvelle évaluation, publié jeudi par l’Association palestinienne pour l’autonomisation et le développement local — Reform, basée à Ramallah, a établi que les femmes, dans la Bande de Gaza ravagée par la guerre, sont confrontées à plusieurs crises interconnectées dans le contexte de la guerre.
Celles-ci incluent le déplacement, l’insécurité alimentaire, l’escalade de la violence, les pertes financières et le manque de préparation à un conflit et de connaissances sur la prévention, entre autres problèmes.
« Les femmes de Gaza sont confrontées à une situation catastrophique et elles sont parmi les personnes les plus durement touchées par la guerre », a déclaré Reform.
« La guerre a privé femmes et filles de stabilité et de sécurité. La violence de genre s’est accrue et le système de protection s’est effondré. »
Selon les responsables palestiniens de la santé, environ 70% des quelque 40000 personnes tuées par Israël à Gaza depuis le 7 octobre sont des femmes et des enfants.
Des 382 femmes issues de toute la Bande de Gaza et contactées par Reform, 40% ont indiqué qu’un ou plusieurs membres de leur famille avaient été tués au cours de la guerre, 67% déclarant qu’elles avaient aussi perdu contact avec un ou plusieurs membres de leur famille.
Près de 90% ont été déplacées, 78% rapportant qu’elles ont perdu leurs maisons.
La plupart des personnes interrogées luttaient avec des problèmes de santé mentale, plus de 80% éprouvant une anxiété sévère, 70% souffrant de dépression et près de 50% rapportant des symptômes de stress post-traumatique.
« Beaucoup de femmes ont besoin d’un soutien psychologique. Certaines sont devenues violentes, d’autres sont en état de choc et ont cessé de parler. Nous avons besoin de sécurité, nous avons besoin de nourriture correcte », a dit une personne interrogée pendant l’enquête.
Pics de violence
La violence de genre, aussi bien physique que psychologique, a aussi connu un pic pendant la guerre, ont déclaré la plupart des personnes interrogées.
Les deux-tiers des interviewées ont rapporté que la violence physique a augmenté pendant la guerre, y compris celle de membres de leur famille, et trois femmes sur quatre ont dit que la violence psychologique contre les femmes et les filles a augmenté.
Presque toutes les femmes ont dit qu’elles étaient confrontées à des problèmes pour obtenir des serviettes hygiéniques, des lingettes humides, de l’eau pour se laver, de l’intimité et des installations de toilettes adéquates, selon Reform.
« Nous avons dû faire des choses que nous n’aurions jamais pensé devoir faire, comme de couper nos vêtements et de les utiliser comme serviettes », a dit une personne interrogée de Deir al-Balah.
« Nous avons commencé à couper nos vêtements pour les porter en guise de serviettes et la nourriture que nous mangeons n’est pas saine, ce qui a affecté nos hormones. »
Elle a ajouté : « Les règles sont devenues irrégulières ; nous avons des problèmes digestifs à cause de l’eau, et tout est chamboulé. »
« Rien ne va. Nous ne sommes pas bien psychologiquement, physiquement, [et] financièrement, nous n’avons pas les moyens d’obtenir quoi que ce soit ».
La vaste majorité des femmes ont rapporté qu’elles avaient un accès limité ou pas d’accès du tout à des soins, dans le contexte d’un démantèlement systématique du système de soins dans la Bande de Gaza par l’armée israélienne.
Cela affecte particulièrement les femmes enceintes et les jeunes mères qui ne reçoivent pas les soins de maternité dont elles ont besoin.
« J’ai été déplacée à l’intérieur de l’hôpital et j’ai donné naissance là ; cela a été très difficile. Nous étions piégées sans nourriture ni eau. Il n’y avait aucun médicament ni aucune sorte de services disponibles », a dit une interviewée du nord de Gaza.
Besoins de base non satisfaits
La plupart des femmes ont aussi dit qu’elles devaient lutter pour accéder à de la nourriture, de l’eau potable et de l’aide humanitaire.
La guerre a fait que près de 80% des personnes interrogées avaient perdu leurs sources de revenus, les laissant en difficulté financière.
L’enquête a aussi montré que près de la moitié des interviewées rapportaient qu’elles avaient une connaissance limitée en ce qui concerne la préparation au conflit et la prévention.
Reform a dit qu’une « intervention internationale intensive » était nécessaire pour soulager la crise humanitaire dans toute la Bande de Gaza, crise causée par une agression israélienne longue de 10 mois et « amplifiée par les sévères restrictions de l’occupation israélienne et un accès limité à l’aide humanitaire et à la protection ».
« L’Association appelle la communauté internationale à intervenir pour arrêter l’agression, en exhortant les ONG et les donateurs à garantir que les fournitures humanitaires essentielles comme de l’eau potable, des aliments nutritifs et de l’aide médicale soient acheminées en toute sécurité et régulièrement aux groupes les plus vulnérables de Gaza », a-t-elle ajouté.
Huthifa Fayyad
- Photo : Une femme assise avec d’autres rassemblées à l’extérieur de la morgue de l’Hôpital des martyrs d’Aqsa, à Deir el-Balah au centre de la Bande de Gaza, le 25 juin 2024 (AFP/Bashar Taleb)