Deux ans après le meurtre par le régime de Jina Mahsa AMINI, « Jin Jiyan Azadî » est devenu un slogan féministe internationaliste.
Ce véritable cri du cœur renvoie à la dignité des femmes qui sont les premières victimes de ce régime phallocratique. Elles subissent violences physiques (incluant la torture), économiques (dont des bas salaires et la précarité). Ces violences sont des outils stratégiques utilisés pour faire taire leurs voix et contrôler leurs corps.
Les revendications intersectionnelles du mouvement « Femme, Vie, Liberté » ne se limitent pas à la question du port du voile obligatoire. Elles se sont élargies au refus de la dictature des mollahs, à la défense des libertés, aux droits des femmes, des minorités ethniques et de genres.
Dès les premiers jours de contestation, au vu de la répression sanglante du régime, un nombre important de manifestant.es blessé.es se sont rendu.es dans les hôpitaux où de nombreu.se.s professionnel.les de santé ont décidé de les soutenir en mettant en place un système pour les protéger d’une éventuelle arrestation.
Par ailleurs, en décembre 2022, des salarié.es de l’hôpital Shariati à Mashhad (Nord est)
s’étaient rassemblé.es en soutien aux manifestant.es. Sur une pancarte on pouvait lire : « Libérez les professionnels de santé » ; et sur une autre : « L’année dernière, (suite à l ’épidémie COVID), les personnels de santé étaient des héros, cette année ils sont accusés par le régime d’apporter la corruption sur Terre ».
La réforme néolibérale du système de Santé amorcée en 1995, a creusé les inégalités ;
– d’une part entre les médecins et les infirmier.ère.s,
– d’autre part, entre les infirmier.ère.s en fonction de leur service d’affectation.
Suite à cela, les infirmier.ères se sont régulièrement mobilisé.es. En 2024, le mouvement s’est amplifié et des grèves sans précédent ont eu lieu tout d’abord à Chiraz (centre de l’Iran), puis s’est propagé dans plus de cinquante villes dans tout le pays. Les réseaux sociaux ont contribué à la promotion de ces mobilisations et donc à leur intensification.
Jusque-là les mobilisations concernaient majoritairement les infirmier.ères en CDD. Cette fois-ci toutes les catégories d’infirmier.ères sont mobilisé.es. D’autres professionnel.les de santé, telles que des sages-femmes et des radiologues, se sont joint.es à la mobilisation.
Tout en faisant grève, les infirmièr.es ont maintenu un service minimum pour assurer les
urgences. La seule réponse des autorités a été le mutisme et la répression.
Des organisations ouvrières, notamment de retraité.es et d’enseignant.es, ont exprimé leur soutien aux infirmièr.es en lutte et à leur mouvement. Ces organisations ont fermement condamné la réaction violente des autorités.
Les revendications des infirmier.èrs portent essentiellement sur
– la fin des heures supplémentaires obligatoires. Légalement, les infirmier.ière.s ne doivent pas effectuer plus de 80 heures supplémentaires par mois, mais il.elle.s sont parfois obligé.es de travailler jusqu’à 300 heures par mois,
– une majoration de 50% des heures de nuit et les jours fériés,
– une réduction conséquente du temps de travail,
– l’application d’une prime spéciale pour des situations particulières, telles les épidémies ;
- le paiement régulier des salaires.
En Iran, comme dans de nombreux pays, les femmes travaillent majoritairement dans les
métiers de reproduction sociale, notamment dans les secteurs en lien avec les soins aux
personnes vulnérables.
Selon les statistiques de l’OMS, les femmes représentent 70 % des personnels de santé dans le monde. En Iran, le nombre d’infirmières atteint 85 % de la profession.
Aujourd’hui il existe douze formes de recrutement pour les infirmier.ères.
Etant donné les politiques libérales drastiques du régime qui affaiblissent les services publics, les femmes sont volontairement placées dans une précarité au travail, et sont de fait invisibilisées. Les bas salaires des infirmier.ères sont une des formes de discrimination fondée sur le genre.
Lors des manifestations, nombre de salarié.es ont été arrêté.es par les services de sécurité, ont été victimes de violences policières, ont reçu des menaces leurs ordonnant de reprendre leurs postes, ou ont été convoqué.es à des entretiens disciplinaires.
Suite à cette répression, le mouvement s’est affaibli à partir du 25 septembre. La solidarité du mouvement ouvrier international est plus nécessaire que jamais.
SUD SANTE-SOCIAUX :
– condamne toute action répressive du régime iranien contre les travailleur.se.s,
– soutient les luttes collectives des travailleur.ses de la santé pour des conditions de travail
dignes,
– défend le droit à la grève, outil du mouvement international des travailleurs.ses,
– défend le droit essentiel des femmes à disposer de leurs corps,
– demande l’abrogation de toutes les lois phallocratiques en vigueur.
Paris, le 10 Novembre 2024