
Dans l’État de Rakhine, l’armée de l’Arakan s’en prend désormais aux Rohingya d’une manière qui rappelle assaut del’armée birmane génocidaire contre les minorités ethniques et religieuses pendant des décennies . Pendant plus de deux ans, alors qu’elle prenait de plus en plus le contrôle territorial de l’Arakan, l’armée d’Arakan a malheureusement eu recours à des atrocités à l’encontre des Rohingyas restés dans leurs villages et cantons ancestraux, notamment Buthidaung et Maungdaw. Parmi ces atrocités figurent des incendies criminels, des pillages, des actes de torture, des arrestations et détentions arbitraires, le travail et le recrutement forcés, les transferts et confinements forcés, ainsi que le meurtre et le massacre de centaines de Rohingyas. À l’instar de l’armée, l’AA a également commis des viols individuels et collectifs et d’autres formes de violence sexuelle et sexiste à l’encontre de femmes et de filles rohingyas, propagé discours de haine anti-Rohingyas, des propos génocidaires et de la propagande par le biais de ses moyens de communication virtuels et matériels.
À l’heure actuelle, les victimes et les survivant.e.s du génocide de 2017 sont en train de mourir de faim dans leur pays natal. Des informations faisant état de situations de famine continuent à apparaître dans l’État de Rakhine, où diverses communautés se voient refuser l’accès à l’aide humanitaire. L’accès à la nourriture et à l’eau potable est pratiquement inexistant pour les Rohingyas, majoritairement musulmans, qui se trouvent dans le nord de l’État de Rakhine ou sont confinés dans des camps de personnes déplacées à l’intérieur du pays sous haute surveillance militaire à Sittwe. En partie à cause des coupures d’Internet et de communication qui s’aggravent depuis des années dans tout l’État de Rakhine, sa situation désastreuse n’a malheureusement fait l’objet que d’une couverture médiatique internationale et locale limitée.
Depuis près de deux ans, la détérioration des conditions humanitaires et des droits humains dans l’État de Rakhine a contraint plus de 150 000 Rohingyas à fuir vers le Bangladesh ou à entreprendre des traversées maritimes périlleuses à travers l’Asie du Sud et du Sud-Est. En un peu plus d’un an, plus de 11 000 Rohingyas auraient pris la fuite par la mer, où ils sont exposés à des formes barbares de torture, de travail forcé, de meurtres et de violences sexuelles de la part de ceux qui leur font traverser les frontières. Parallèlement, les possibilités pour les Rohingyas de pouvoir se réfugier ailleurs se sont encore détériorées.
Entre-temps, les perspectives de trouver refuge des Rohingyas se sont encore détériorées.
Entre-temps, les perspectives de refuge des Rohingyas se sont encore détériorées. Au Bangladesh, les coupes budgétaires massives et sans précédent ont plongé plus d’un million de réfugiés rohingyas dans une crise préexistante des moyens de subsistance et de la sécurité. En Indonésie, en Inde, en Thaïlande et en Malaisie, des centaines de milliers de réfugiés rohingyas ne sont pas enregistrés et n’ont pas accès à une protection contre l’exploitation, la servitude forcée, la détention par les services d’immigration, l’expulsion forcée et la violence ciblée. La montée mondiale des sentiments xénophobes et anti-réfugiés a également remis en cause les possibilités de réinstallation dans des pays tiers.
En conséquence, à l’occasion du huitième anniversaire du génocide de 2017, nous demandons à la communauté internationale et régionale de prendre des mesures immédiates pour assurer la survie des Rohingyas.
Pour les Rohingyas qui restent dans l’État de Rakhine, nous demandons que l’aide transfrontalière soit autorisée à franchir la frontière entre le Bangladesh et le Myanmar avec le soutien des organisations des Nations unies, des organisations non gouvernementales internationales et des organisations locales de la société civile dignes de confiance ; que soit déployé dans l’État de Rakhine un dispositif indépendant de surveillance des droits humains chargé de surveiller et d’enquêter sur les atrocités en cours, ainsi que de veiller à la conservation des preuves, conformément aux mesures conservatoires émises par la Cour internationale de justice en janvier 2020 ; que tous les auteurs d’atrocités contre les Rohingyas soient poursuivis en vertu du droit international. Lors de la Conférence de haut niveau des Nations unies sur les Rohingyas et les autres minorités, qui se tiendra en septembre prochain, les États membres doivent concentrer leurs efforts sur la justice et la responsabilisation afin de traiter efficacement la crise des Rohingyas et, plus largement, celle du Myanmar.
Pour les réfugiés rohingyas déplacés ailleurs en Asie du Sud et du Sud-Est, nous appelons à la reprise immédiate de l’aide humanitaire, à la mise en place d’un système d’éducation structuré et à la création d’emploi, au droit à l’entrée et à la protection de tous les Rohingyas en quête d’asile, notamment par la prise de mesures contre les réseaux de traite des êtres humains conformément aux dispositions du Processus de Bali, ainsi qu’à la fin des détentions, des expulsions forcées, des discours haineux anti-Rohingyas et xénophobes et autres violations. L’Association des nations de l’Asie du Sud-Est devrait prendre des mesures actives pour protéger les Rohingyas plutôt que de collaborer avec l’armée birmane et ses tentatives d’organiser des élections fictives. Des conditions propices au retour sûr, volontaire, durable et digne des Rohingyas au Myanmar doivent être réunies avant toute tentative de rapatriement.
En dernier lieu, toutes les parties prenantes doivent s’engager de manière significative auprès des Rohingyas, y compris les femmes et les jeunes, afin de promouvoir tout dispositif ou procédure susceptible d’avoir une incidence sur leur vie et leur avenir.
Huit ans après le génocide de 2017, les Rohingyas sont confrontés à une nouvelle menace existentielle. Le moment est venu pour la communauté internationale et régionale, y compris les responsables favorables à la démocratie en Birmanie, de mettre activement en pratique les leçons tirées de l’histoire afin qu’elle ne se répète pas.
Women’s Peace Network

Europe Solidaire Sans Frontières


Twitter
Facebook