Une vingtaine d’unions départementales de la CGT (public-privé) se prononcent pour appeler le 18 octobre : Bouches-du-Rhône, Loire-Atlantique, Isère, Drôme, Hérault, Paris, Seine-Maritime, Pyrénées-Orientales, Lot-et-Garonne, etc. Fait assez rare, cela dénote une grande attente concernant les suites du 18 octobre. Cela provoque aussi une extension unitaire (lire, ci-dessous, l’appel de Loire-Atlantique).
Lors de la conférence de presse de rentrée de la CGT (25 septembre), il n’était encore question que d’engagement « des fédérations », le 18 octobre, et pas de la confédération. Depuis, celle-ci annonce une semaine (15 au 18 octobre) « d’explication et de mobilisation de tous les salariés du privé comme du public », ce qui montre une pression. Partout, il y a évidemment des débats sur les rythmes, sur l’unification privé-public, sur la construction interprofessionnelle. Mais ces débats ne sont pas insurmontables, lorsque la volonté existe d’une vraie riposte, même si celle-ci ne se décrète pas.
L’appel de la CGT des Bouches-du-Rhône l’explique : « Nous avons des priorités différentes dans les revendications. Ce n’est pas un problème : posons-les ensemble [...]. Le monde du travail a besoin de s’unir. » La CGT Paris a réuni 100 personnes, le 5 octobre, pour vérifier la mobilisation, déjà préparée par le commerce, des PME privées, les postaux, les télécoms, les hôpitaux, en plus de la SNCF, de la RATP et d’EDF-GDF. L’union départementale de la CGT des Vosges estime que ce serait « une erreur de séparer les revendications du privé et du public » et attend « un appui de la confédération ». Certains militants CGT estiment qu’entre appeler et mobiliser réellement, il peut y avoir une marge dans le privé, mais que les manifestations du 18 peuvent servir à élargir ; d’autres pensent qu’il faudra une forte pression, afin que toute la confédération s’implique. Beaucoup de syndicalistes, cégétistes ou non, sentent bien que le moment est grave et que, si les cheminots reconduisent, et si Sarkozy affronte le mouvement, il faudra prendre ses responsabilités. D’où la volonté de se préparer maintenant. Les cheminots, les agents de la RATP et d’EDF-GDF auraient d’ailleurs besoin, très vite, de perspectives interprofessionnelles pour les lendemains (la semaine suivante ?).
La fédération CGT de la chimie appelle à unir, le 18 octobre, « toutes nos forces et nos intelligences ». Plusieurs fédérations CGT de la fonction publique (services publics territoriaux, ministère des Finances...) appellent à la grève, sans attendre l’hypothétique rendez-vous de novembre. Unifier par le haut les revendications sur les retraites, sur les salaires, la protection sociale, est décisif. Mais le 18 octobre sert aussi de première journée générale contre Sarkozy.
Dominique Mezzi
- Mobiliser sans attendre dans l’Éducation nationale. À la rentrée, les personnels ne pouvaient que s’attendre à être conviés à la grève contre les 11 000 suppressions de postes en 2008. Mais la réunion unitaire du 12 septembre accouchait d’une souris. Nicolas Sarkozy en remettait une couche, avec des menaces sans précédent contre le statut de la fonction publique, le recrutement sur concours... Cette fois, se disait-on dans les salles des profs, le recours à la grève allait de soi, il n’y avait plus qu’à fixer la date ! C’était compter sans les capacités des directions syndicales à éviter de prendre leurs responsabilités. Les blocages de l’Unsa, de la CFDT remettaient encore l’échéance à... novembre : l’art de l’évitement. Un des arguments utilisés pour différer l’action consiste à refuser le lien avec la mobilisation sur les régimes spéciaux. Pourtant, se joindre au 18 octobre était l’occasion d’un vaste « tous ensemble », en défense de la protection sociale de tous, menacée bien au-delà des régimes spéciaux. L’occasion aussi de dire « non » à la case programmée des services publics, notamment celui de l’éducation, et de défendre le statut de la fonction publique. Il n’y a donc pas d’appel unitaire pour le 18, mais nombre d’enseignants souhaitent s’y joindre. La FSU « appelle à l’action » ce jour-là. Déjà, plusieurs de ses syndicats (le Snesup dans le supérieur, le syndicat de l’enseignement agricole, Snetap, celui de la protection judiciaire de la jeunesse, le SNPESPJJ), ainsi que des sections départementales (Bouches-du-Rhône, Haute-Garonne, Isère, Loire-Atlantique, Lot, Maine-et-Loire, Manche, Pyrénées-Atlantiques, Savoie, Val-de-Marne) appellent à la grève. Un appel national clair et net eût été plus mobilisateur. Mais, dans les jours qui viennent, la multiplication des appels locaux peut faire du 18 la première journée d’action et de rassemblement contre le pouvoir. Si nous sommes nombreux en grève et dans la rue, ce sera aussi l’occasion de dire aux organisations syndicales pusillanimes que, sans agir, on est sûr de la défaite.
- Annick Coupé, porte-parole de Solidaires. « Nous avons réuni notre Comité national, avec les organisations professionnelles et les groupes Solidaires locaux interprofessionnels. Nous ne pouvons pas rester plus longtemps avec un mouvement syndical l’arme au pied et attentiste. Il y a une opportunité d’agir autour du 18 octobre. Les cheminots ont pris l’initiative, mais il faut commencer à construire les conditions d’une riposte globale. Les attaques de Sarkozy se situent sur tous les fronts et de manière cohérente. Nous avons la responsabilité, à Solidaires et dans tout le mouvement syndical, de réaliser trois choses : d’abord, un travail d’explication sur chaque mesure concrète (retraites, franchises, heures supplémentaires...). Ensuite, construire des cadres unitaires à tous les niveaux, même si c’est difficile sur le plan national. Et, troisièmement, fortifier les convergences. La situation est bonne à la SNCF, avec un appel unitaire clair. On va sans doute vers une mobilisation importante. Mais la situation est moins bonne dans la fonction publique. On n’a pas réussi un appel à l’action. On a même senti, dans l’interfédérale, que les organisations opposées au 18 ne semblaient pas avoir réellement envie d’agir en novembre. Mais la journée du 18 peut aussi faire bouger les choses. Il y a un appel de la CGT, de la FSU et de Solidaires, même si, côté FSU, c’est plus flou. Localement, il y a des appels clairs assez nombreux. Aux Finances, les dernières mesures de restructuration (fusion impôts-trésor) sont de nature à provoquer une réaction. Nous ne sommes pas dans une situation de grève générale, mais nous allons essayer d’assurer la présence du privé dans les manifestations. Il y a, par exemple, un appel interprofessionnel dans le Nord-Pas-de-Calais, et la CGT appelle à des débrayages. Le 18 prend l’allure d’une expression globale du mécontentement. Il y a une prise de conscience du bouleversement qui se prépare si personne ne réagit. »
- Extraits de l’appel unitaire de Loire- Atlantique (CGT, FSU, Solidaires, FO) : « Ensemble, salariés du privé, de la fonction publique et du secteur public [...], il faut agir pour l’augmentation des salaires, le maintien du Smic, de l’emploi qualifié et statutaire, le maintien des régimes spéciaux de retraite et des droits attachés, l’abrogation de la mesure Fillon visant à prolonger la durée d’assurance à 41 ans en 2012, le retour à la référence aux 37,5 annuités pour tous et en tout état de cause, et le maintien de la retraite à 60 ans à taux plein pour tous. »
- Communiqué SNU-IPP Paris : « Le SNU-IPP appelle les enseignants des écoles parisiennes à se mettre en grève le 18 octobre et à participer aux manifestations. »