Sortie de crise ou enlisement ? Hier, le bras de fer qui oppose depuis un mois le géant français du BTP, Lafarge, et quatre ex-salariés sud-coréens d’un sous-traitant du cimentier n’avait pas trouvé d’issue. Après avoir remis lundi des propositions de reclassement, le groupe s’est vu opposer une fin de non-recevoir. Ce matin, la CGT doit expliquer son refus.
Le 7 septembre, trois des quatre Sud-Coréens licenciés après la fermeture du sous-traitant Woojin en 2006 ont débarqué devant le siège de Lafarge, dans le XVIe arrondissement de Paris, avec la ferme intention de repartir avec un contrat de travail en poche.
Mais, depuis, les deux partis campent sur leurs positions. Frédéric de Rougemont, le patron du groupe en Corée, fait valoir, jugement d’un tribunal coréen à l’appui, que les quatre hommes n’étaient pas ses employés. Les manifestants, épaulés par la CGT-construction, ne nient pas. « Mais compte tenu du poids économique de Lafarge là-bas, on attend un coup de pouce. Pour le groupe il est facile de leur trouver de nouveaux emplois », regrette Gilles Lecaille, délégué CGT. Chez Lafarge, on s’étrangle : « On ne sait plus quoi faire ! On a envoyé lundi de nouvelles propositions d’embauches précises et garanties ! »
C’est là que le bât blesse. Les Sud-Coréens les jugent inacceptables. La lettre de Frédéric de Rougemont prévoit une rémunération à 3,5 dollars de l’heure, précisant un équivalent mensuel de 2 000 dollars. Mais comment toucher 2 000 dollars par mois avec 3,5 dollars de l’heure ? « En effectuant au minimum 224 heures supplémentaires ! » s’exclame Monsieur Yang, porte-parole francophone des trois Sud-Coréens. Mais Lafarge a bétonné sa défense : n’étant pas l’employeur direct des Sud-Coréens, le groupe n’est pas tenu de les reclasser. De plus, les 3,5 dollars proposés par le cimentier équivalent exactement au salaire minimum coréen. Or si le niveau de vie est le même qu’en Europe, le salaire minimum est deux fois inférieur. Sur 13 millions d’actifs , 8,5 millions seraient des travailleurs précaires.
Lucas Bretonnier
* Publié dans le quotidien Libération du 3 octobre 2007.
Des opposants en béton à Lafarge
Devant le siège de Lafarge à Paris, trois ex-salariés sud-coréens manifestent depuis plus de vingt jours.
Devant le siège du leader mondial des matériaux de construction Lafarge à Paris, trois ex-salariés sud-coréens manifestent depuis plus de vingt jours. Ils sont silencieux, mais leurs dossards donnent le ton : « Nous voulons vivre humainement, pas en esclave ».
Ces hommes, ex-salariés de Woojin, une société de sous-traitance de la filiale coréenne du groupe, se sont déplacés jusqu’à Paris, pour protester contre leur licenciement. Selon eux, Lafarge est responsable de la fermeture de Woojin en 2006. Le motif de cette fermeture serait l’adhésion d’une vingtaine de salariés au syndicat coréen KCTF. Les employés qui n’ont pas adhéré au syndicat ou qui en ont démissionné auraient été réembauchés chez d’autres sous-traitants, mais ceux qui souhaitaient rester syndiqués se retrouveraient sans emploi.
Aujourd’hui, ils demandent à être directement employés par Lafarge en conservant leur liberté syndicale. Selon Jacques Vallet, membre de la CGT-Construction, « la direction, qu’ils n’ont rencontrée qu’une fois, leur avait promis un engagement écrit avant le 19 septembre (...). Mais il n’en est rien. » Hier, la direction de Lafarge a démenti : « Nous sommes très favorables à la liberté d’association », a-t-elle indiqué à l’AFP. La semaine dernière, les trois Sud-Coréens devaient prendre leur avion pour rentrer, mais la situation étant bloquée, ils sont restés sur place et n’ont plus de billet de retour.
Sophie Bouquet - ©2007 20 minutes
* 20 Minutes, éditions du 26/09/2007 - 07h20.
Coréens/Lafarge : proposition de la direction inacceptable en l’état
La CGT a qualifié, mardi, d’« inacceptable en l’état » la proposition du groupe de matériaux de construction Lafarge concernant les anciens salariés de sa filiale sud-coréenne, venus manifester à Paris pour réclamer leur intégration dans le groupe de BTP.
La proposition d’embaucher les « quatre salariés (concernés) par deux sous-traitants de Lafarge peut être un point de départ pour la discussion, mais en l’état elle est inacceptable car le salaire horaire proposé est inférieur au salaire minimum horaire coréen », affirme la CGT dans un communiqué.
Pour le syndicat « il est temps que le groupe Lafarge engage un dialogue social constructif sur les conditions de travail et d’emploi dans les entreprises sud-coréennes ».
Le président de la filiale sud-coréenne du groupe de matériaux de construction Lafarge a expliqué lundi ne pas vouloir faire un « cas d’école » des trois anciens salariés coréens d’un sous-traitant, qui sont venus manifester à Paris.
« Il ne faut pas penser qu’il suffit d’aller râler à Paris pour obtenir un emploi », avait déclaré lundi le président de Lafarge Halla Cement, Frédéric de Rougemont, en conférence de presse.
Trois des quatre Coréens, ex-salariés de Woojin, sous-traitant de Lafarge, campent depuis près d’un mois chaque matin devant le siège du groupe de matériaux de construction à Paris, demandant l’« arrêt de l’oppression des travailleurs coréens » et leur embauche par Lafarge.
Selon eux, c’est Lafarge qui a fait fermer l’entreprise en mars 2006 du fait de l’adhésion d’une vingtaine de salariés sur 35 au syndicat KCTF (Fédération coréenne de la chimie et du textile), pour contester leurs conditions de travail.
M. de Rougemont a affirmé au contraire que le syndicat s’est créé une fois la fermeture de la filiale annoncée par son propriétaire.
AFP
le 02/10/2007 à 16:31