Depuis plus d’une année, toute une foule d’habitante-s, de pacifistes, de défenseurs du bien commun aux orientations politiques, culturelles, linguistiques et historiques diverses, se mobilisent pour empêcher la construction d’une nouvelle base militaire sur les terrains du « Dal Molin », un ancien aéroport situé dans la ville de Vicenza (www.nodalmolin.it). Une première grande manifestation de masse avait réuni près de 100000 manifestant-e-s, le 17 février 2007. Celle du 15 décembre a réussi à rassembler environ 80000 personnes, deux fois plus que ce qu’attendaient les organisateurs. Les drapeaux des partis politiques étaient absents des deux manifestations, la désillusion des manifestant-e-s face aux forces politiques qui soutiennent le gouvernement Prodi étant trop forte.
« Quelle différence avec Berlusconi ? » s’est demandé le comédien et prix Nobel Dario Fo, qui a conclu son discours par un avertissement aux actuels gouvernants : « Continuez à ne pas écouter les gens, et ceci sera votre tombe. Crétins ! » Par contre, les mouvements citoyens qui, dans d’autres régions italiennes, s’opposent à d’autres méga-projets imposés d’en haut étaient très visibles : ceux de Venise contre le MoSE (les écluses gigantesques aux embouchures du port www.nomose.org), de la vallée de Susa contre la ligne TGV qui dévasterait la région ; des environs de Naples contre le (mal-)traitement des déchets ; de Cameri, près de Novara, contre l’usine de montage des F-35. Depuis cet été, ces mouvements ont fondé un « Pacte national de solidarité et de secours mutuel » et ils agissent ensemble en défense de l’intérêt public menacé.
Enlevons ses bases à la guerre !
La mobilisation de ces trois journées se voulait internationale, pour montrer comment le projet de nouvelle base à Vicenza s’inscrit dans la réorganisation de l’infrastructure nécessaire à la guerre globale permanente. Hans Lammerant, du mouvement contre les arsenaux nucléaires en Belgique (www.bombspotting.be), a rappelé qu’à la différence d’autres empires coloniaux, l’empire états-unien n’a pas de colonies, mais maintient des bases militaires presque partout dans le monde. Ces bases sont de véritables noeuds logistiques de la guerre. La restructuration des bases en Europe répond à deux exigences : d’abord celle d’assurer la capacité d’intervention militaire rapide au Moyen Orient, en Asie Centrale, ainsi qu’en Afrique ; ensuite, celle de contenir toute velléité de puissance de la part de la Russie. Sans les bases aériennes, navales et des forces terrestres de l’OTAN en Europe, les guerres en Afghanistan et en Irak n’auraient pas été concevables.
Les mouvements de résistance à la militarisation de différentes régions européennes présents à Vicenza ont montré tout l’intérêt d’unir les dimensions locales de l’impact de la militarisation sur le territoire avec la dimension internationale du rejet de la « guerre globale et permanente ». Jan Majicek du mouvement tchèque « ne zakladnam – non aux bases » a remarqué qu’en 2003, en République tchèque, le mouvement antiguerre n’était actif qu’à Prague, alors qu’aujourd’hui la lutte contre l’implantation de nouvelles bases de l’OTAN est actif dans l’ensemble du pays. Il a également souligné que « le meilleur allié contre les bases, c’est la ligue des maires contre les radars ». Les maires de toute une région tchèque se sont unis pour empêcher l’installation de radars de l’OTAN. Ils étaient représentés à Vicenza par Josef Hala, maire du village de Jince, où l’armée US veut installer une station radar. Il paraît que le gouvernement tchèque a traité les maires d’« agents à la solde de Moscou »…
La même connexion entre initiatives locales et questions globales se retrouve dans les actions du mouvement opposé au doublement de la base militaire US d’Ansbach en Bavière (Bürgerinitiative « Etz langt.s ! » e.V., Ansbacher Friedensbündnis www.urlas.de) qui devrait devenir la plus grande base d’hélicoptères militaires d’Europe. Le mouvement a réussi une action retentissante avec le concours d’un groupe de « véterans contre la guerre en Irak », qui a réussi à pénétrer dans la base et à distribuer des tracts aux G.I.s
Pour conclure, une mention à part s’impose pour la couleur rose qui réunit les activistes du groupe « Rosa Heide » – contre le militarisme et le Bombodrome – (une place de bombardements dans le nord de l’Allemagne) et les militantes antiguerre états-uniennes de « Code Pink », également présentes à Vicenza (www.codepink4peace.
org).