La tenue des élections législatives et provinciales au Pakistan comme prévu le 8 janvier est « impossible » , en raison des violences consécutives à l’assassinat de Benazir Bhutto jeudi, a annoncé mardi 1er janvier le porte-parole de la commission électorale. Des hauts responsables du gouvernement et de la commission ont indiqué sous couvert d’anonymat que le scrutin aurait lieu en février, « mais pas au-delà ». La nouvelle date doit être annoncée mercredi, « après consultation avec les partis politiques », a précisé Kanwar Dilshad. Le secrétaire de la commission a ajouté que le mois de Moharram, sacré pour les musulmans, et qui s’achève vers le 8 février, « doit être pris en compte » dans la décision.
Le parti de Mme Bhutto s’est opposé lundi à un quelconque report, remettant cependant sa décision finale à une réunion de son comité exécutif. Dans l’entourage de la famille Bhutto, qui a repris dimanche les rênes du Parti du peuple pakistanais (PPP), on laissait quand même entendre qu’un délai « raisonnable » pourrait être accepté. Le dirigeant du deuxième parti d’opposition, l’ex-premier ministre Nawaz Sharif, a également rejeté l’idée d’un report, mais un membre de son mouvement a estimé qu’un « léger délai » serait « acceptable ».
LES ÉTATS-UNIS RÉCLAMENT UNE DATE PRÉCISE
Les élections prennent une importance particulière dans ce pays de 160 millions d’habitants, la seule puissance nucléaire connue du monde musulman, au bord du chaos politique. Le président Pervez Musharraf a été réélu pour un second mandat le 6 octobre lors d’une élection au suffrage indirect des Assemblées nationales et provinciales sortantes, qui lui étaient tout acquises. Son pouvoir, de plus en plus contesté, serait rendu inopérant si l’opposition remportait les législatives.
Les Etats-Unis, qui ont perdu une carte maîtresse avec la disparition de Mme Bhutto, devraient continuer de soutenir le chef de l’Etat pakistanais, dont ils ont fait leur allié principal dans la région dans leur « guerre contre le terrorisme » après les attentats du 11 septembre 2001. Washington pourrait ainsi juger acceptable un report des élections législatives mais veulent qu’une nouvelle date précise soit fixée, a déclaré lundi un porte-parole du département d’Etat, Tom Casey.
Le chef de la diplomatie française Bernard Kouchner est quant à lui attendu mardi soir à Islamabad, pour « témoigner de (la) solidarité » de la France.
LEMONDE.FR avec AFP | 01.01.08 | 09h22 • Mis à jour le 01.01.08 | 09h33
Les élections pakistanaises pourraient être reportées de plusieurs semaines
LEMONDE.FR avec AFP et Reuters | 31.12.07 | 09h18 • Mis à jour le 01.01.08 | 09h41
Le Pakistan pourrait reporter d’au moins un mois ses élections législatives et provinciales, prévues le 8 janvier, en raison des troubles qui ont suivi l’assassinat, jeudi, de l’ancienne première ministre Benazir Bhutto. « Nous avons demandé des rapports sur la situation aux autorités locales et aux responsables électoraux dans les provinces (...), nous trancherons demain [mardi] », a indiqué Kanwar Dilshad, secrétaire de la commission électorale.
Un haut responsable du gouvernement, cité anonymement par l’AFP, a affirmé pour sa part que les élections « seront repoussées pour au moins quatre semaines, sinon plus ». « Il est absolument exclu que les élections soient maintenues au 8 janvier en raison des violences et émeutes dans tout le pays qui ont affecté directement (...) les préparatifs du scrutin », a confirmé un des ses collègues, invoquant la « destruction de plus de 40 bureaux » de la commission électorale, notamment dans le sud du pays.
L’OPPOSITION NE VEUT PAS D’UN REPORT
Au sein de la Ligue musulmane du Pakistan (PML-Q), membre de la coalition soutenant le président Pervez Musharraf, on a annoncé avoir « suspendu la campagne en raison de la situation qui prévaut » depuis la mort de Mme Bhutto. « Un report de dix à douze semaines » des législatives « est une option réaliste », a ajouté Tariq Azim, ancien ministre et porte-parole du mouvement.
Malgré ces affirmations, les deux partis d’opposition, le Parti du peuple pakistanais (PPP), désormais dirigé par le mari de Benazir Bhutto, Asif Ali Zardari, et la Ligue musulmane de Nawaz Sharif, ont fait savoir qu’ils n’accepteraient aucun report du scrutin. « Personne ne veut que les élections aillent au-delà du 8 janvier », a déclaré M. Sharif, lors d’une conférence de presse à Lahore, mardi. L’ancien premier ministre a également attaqué le président, Pervez Musharraf, l’accusant de se servir de la commission électorale pour retarder le processus électoral. « Il est responsable des troubles qui existent au Pakistan », a-t-il ajouté.
Après avoir confirmé qu’il participerait au scrutin, le PPP s’est également élevé contre un report au-delà du 8 janvier. « Nous ne voulons d’aucun report. C’est ce que nous avons demandé », a déclaré Farzana Raja, porte-parole de la formation politique. La décision finale devrait être prise après une réunion de son comité exécutif. Selon un dernier bilan établi par les autorités pakistanaises, au moins 47 personnes sont mortes dans les émeutes qui ont suivi l’assassinat de Benazir Bhutto, jeudi.
Le mari de Mme Bhutto réclame une enquête de l’ONU sur l’attentat
LE MONDE | 31.12.07 | 11h17 • Mis à jour le 31.12.07 | 11h27
Mis en cause dans l’assassinat de l’ex-premier ministre Benazir Bhutto, au moins pour l’incapacité de son gouvernement à la protéger, le président Pervez Musharraf pourrait accepter une coopération internationale dans l’enquête ouverte au Pakistan. Selon un communiqué des services du premier ministre britannique, Gordon Brown, qui s’est entretenu, dimanche 30 décembre, avec le président Musharraf « un potentiel soutien international à l’enquête pakistanaise a été évoqué, les deux parties s’étant mises d’accord pour examiner cette suggestion plus en avant ».
Déjà samedi David Miliband, le ministre britannique des affaires étrangères, avait indiqué que le gouvernement britannique était prêt à accorder « les ressources nécessaires » au Pakistan.
Pour sa part, le mari de Benazir Bhutto a annoncé, dimanche, qu’il souhaitait une enquête de l’ONU sur le modèle de celle menée après l’assassinat de l’ex-premier ministre libanais Rafic Hariri à Beyrouth. « Nous réclamons une commission d’enquête du même genre que celle concernant Hariri », a déclaré Asif Zardari, précisant : « Nous sommes en train d’écrire aux Nations unies pour demander une enquête internationale sur le martyre qu’elle a subi. »
Les causes exactes de la mort de Mme Bhutto, une balle selon des responsables du Parti du peuple pakistanais (PPP) qui l’accompagnaient et les premières déclarations des chirurgiens, une fracture du crâne provoquée par un choc avec la manette du toit ouvrant de sa voiture blindée selon le gouvernement, risquent de demeurer inconnues puisque son mari a refusé une autopsie.
« J’ai choisi de ne pas donner la permission d’effectuer une autopsie. J’ai vécu assez longtemps dans ce pays pour savoir comment elles sont menées », a-t-il dit à la presse. Les rapports des médecins qui ont tenté en vain de ranimer Benazir Bhutto ne sont pas concluants en l’absence d’autopsie.
Une nouvelle vidéo diffusée par la chaîne de télévision britannique Channel4 va de nouveau alimenter la polémique. Celle-ci montre un homme tirant de près avec un revolver sur Benazir Bhutto alors qu’elle est debout dans sa voiture, le toit ouvert. Ses cheveux et son châle se dressent, laissant entendre qu’elle aurait pu être touchée. Elle tombe alors dans la voiture et une explosion retentit.
Cette version va dans le sens d’une blessure mortelle par balle. Le nettoyage a grande eau du lieu de l’attentat peu de temps après celui-ci risque aussi d’avoir à jamais effacé des indices précieux pour établir la vérité.
Françoise Chipaux
M. Kouchner au Pakistan pour exprimer sa « solidarité »
Le ministre français des affaires étrangères, Bernard Kouchner, a annoncé, dimanche 30 décembre, qu’il se rendrait au Pakistan à la demande du président Nicolas Sarkozy afin de « témoigner de [la] solidarité » de la France après l’assassinat de Benazir Bhutto, qualifié de « dégueulasse ».
« L’objet (…), c’est de témoigner de notre solidarité, d’abord évidemment à la famille de Benazir Bhutto, à son parti, mais aussi à l’ensemble du Pakistan » et de leur dire « de ne pas accepter le terrorisme, de ne pas accepter que le règlement des crises politiques soit simplement l’assassinat », a déclaré à la presse M. Kouchner en marge de la visite au Caire de M. Sarkozy. – (AFP.)