Budryk, en Haute-Silésie, est la plus productive des mines polonaises. Chaque mineur y extrait en moyenne 1400 tonnes de houille par an, contre 700 tonnes par mineur en moyenne nationale. Elle est rentable : au cours des seuls trois premiers trimestres 2007, son profit net a atteint 12,6 millions d’euros. Mais, ouverte en 1994, elle dispose d’une grille de salaires très inférieure à celle des mines plus anciennes. Les mineurs de Budryk exigent que leurs salaires soient alignés sur ceux des autres mines du groupe. Le nouveau gouvernement polonais, ultralibéral, veut privatiser le secteur minier. Il veut aussi comprimer les salaires des mineurs, et pour ce faire, briser la résistance des plus combatifs.
Le 13 décembre, deux, puis cinq mineurs ont commencé une grève de la faim pour exiger l’application du droit du travail : même travail, même salaire. Le 17 décembre, l’assemblée générale a voté la grève. Un comité de grève a été élu le lendemain. Trois syndicats animent le mouvement : le syndicat libre Août 80, Kadra et l’Unité. Le 21 décembre, les grévistes ont voté l’occupation. Le 23, en présence de 550 salariés, ils ont tenu une conférence de presse et y ont rendu publics les documents témoignant de détournements de fonds par la direction, qui approcheraient les 2,7 millions d’euros – alors que la satisfaction de leurs revendications ne coûterait que 2,2 millions par an.
La veille de Noël qu’ils ont passé dans la mine occupée, les grévistes ont donné leur sang : 35 litres. Le lendemain, ayant reçu des sucreries de la population solidaire, ils les ont offert à deux orphelinats locaux. Le 26, une équipe de grévistes est descendu au fond de la mine pour garantir la sécurité et débloquer une machine en danger, du fait de l’arrêt de l’exploitation. Le 29, les négociations n’aboutissant pas, cinq des syndicats jusque-là inactifs – dont Solidarnosc et le ZZG (ex-syndicat officiel des mineurs) – ont déclaré leur soutien à la direction de la mine. La majorité des salariés ont alors décidé de durcir la grève.
Le 4 janvier, 150 mineurs, descendus avec l’accord de la direction pour assurer la sécurité du fond, ont rejoint la grève et occupé le niveau -700 mètres. L’occupation du fond par plus de 500 mineurs durera jusqu’à ce que le PDG du groupe, profitant d’un moment d’inattention des grévistes en surface, descende dans la mine, accompagné d’un procureur et d’un policier. Il voulait ainsi démontrer que les mineurs sont sous la contrainte d’« une minorité terroriste ! » Devant leur détermination unanime, le procureur et le policier ont quitté la mine : « C’est une grève, je ne suis donc pas concerné », a déclaré le procureur. Le PDG a été retenu par les grévistes, qui lui assurent qu’il disposera ainsi d’un logement… jusqu’à la fin de la grève. Pris de peur, il a fini par accepter de négocier et les grévistes ont quitté le fond, le 9 janvier au petit matin. Mais l’occupation continue.
Le 14 janvier, la direction a rompu de nouveau les négociations. Le 15 janvier, W. Pawlak, vice-Premier ministre a pris un ton menaçant : « Trois syndicalistes très radicaux ne peuvent pas déstabiliser toute l’industrie minière », alors qu’une assemblée de plus de 500 grévistes a décidé d’entamer une grève de la faim au niveau -700. La tension est à son comble... Le 19 janvier, une proposition de compromis des grévistes a été rejetée, tandis que l’occupation et la grève de la faim se poursuivait, jusqu’à 1050 m. de fond…
Dès le 29 décembre, le comité de grève a lancé un appel à la solidarité des travailleurs du monde entier. Car les salaires de décembre ont été bloqués par la direction. « La mine Budryk ne fera pas faillite, a déclaré cyniquement à la radio Zet le PDG Bojarski, même si cette grève devait durer des mois, mais ce sont les familles des grévistes qui feront faillite ». La solidarité internationale peut le contredire… Vos pouvez envoyer vos dons au journal avec la mention « Grévistes polonais ».