TOKYO CORRESPONDANT
Le prix du carburant a baissé au Japon. Non pas que le gouvernement de Yasuo Fukuda entende favoriser les automobilistes. Il a été tout simplement incapable de faire adopter par le Parlement le renouvellement de la taxe de 25 yens (15 centimes d’euros) par litre en vigueur depuis trente-quatre ans et qui expirait le 31 mars.
En raison de l’opposition du Parti démocrate du Japon (PDJ), majoritaire au Sénat, la surtaxe, votée en février par la Chambre basse (dont la majorité est libérale- démocrate, PLD), n’a pas été renouvelée.
Cette baisse du prix de l’essence, qui entraîne une confusion dans les stations-service lancées dans une concurrence sur les prix, n’est que temporaire : la surtaxe devrait être rétablie dans trente jours en raison des dispositions constitutionnelles qui donnent le dernier mot aux députés en cas de désaccord entre les deux Chambres. Cet imbroglio fiscalo-pétrolier n’en est pas moins symptomatique de l’affaiblissement du premier ministre. S’il avait jusqu’à présent avancé « à petits pas », M. Fukuda paraît désormais enlisé. Le quotidien Mainichi (centre) évoque sa « chute en vrille ». Des sondages publiés le 30 mars ont enregistré une nette chute de sa popularité, désormais au plus bas.
Le premier ministre a dû, dès lundi 31 mars, présenter ses excuses à la nation pour la perturbation provoquée par le non-renouvellement de la surtaxe sur les carburants.
Celle-ci rapporte 2 600 milliards de yens (16 milliards d’euros) à l’Etat, dont une partie est reversée aux collectivités locales pour la construction et l’entretien des routes. En dépit des concessions du gouvernement, qui proposait une réallocation des ressources de surtaxe à des dépenses telles que les retraites et la protection de l’environnement, le PDJ est resté inflexible.
« COHABITATION »
Au-delà de la question de fond (utilisation de ressources qui constituent une manne pour des subventions accordées parfois de manière transparente par des députés et sénateurs des deux camps ayant la haute main sur le réseau routier), se pose celle du fonctionnement des institutions en période de « cohabitation » de deux majorités à la Diète, comme c’est le cas depuis les élections sénatoriales de juillet. Seulement une vingtaine de projets de lois ont été votés entre septembre 2007 et janvier 2008. Autre signe de paralysie : le gouvernement a été incapable de désigner un nouveau gouverneur de la Banque du Japon.
Le fonctionnement des institutions est devenu un enjeu des rivalités politiques. Le PDJ, sous la direction d’Ichiro Ozawa, paraît déterminé à faire tomber le gouvernement Fukuda, qui se refuse à débloquer la situation en appelant à des élections anticipées. Le premier ministre hésite à dissoudre la Chambre basse, de crainte que son parti ne perde la majorité des deux tiers qu’il y détient. Il multiplie les offres de dialogue à l’opposition pour montrer sa bonne volonté.
Bien que la tactique du « veto » systématique poursuivie par M. Ozawa, qui conduit à ce blocage de la vie politique, soit critiquée par la presse et lasse l’opinion, elle accentue les divergences au sein du PLD et alimente les spéculations sur un éventuel successeur à l’actuel premier ministre.