Le jugement du tribunal de Lille annulant un mariage car la mariée « avait menti sur sa virginité » constitue une atteinte gravissime aux droits des femmes et à leur liberté individuelle. En acceptant la démarche de l’époux, qui déclarait avoir été « trompé » sur une « qualité essentielle » de sa future épouse, censée être « chaste et vierge », le tribunal a cautionné une vision machiste des rapports hommes-femmes. Quelle que soit la volonté des époux, ni la loi, ni la jurisprudence ne peuvent consacrer le symbole de la domination masculine qu’est la virginité.
La procédure d’annulation du mariage, censée protéger des citoyens et des citoyennes, notamment contre des mariages forcés, a servi à cautionner une conception de la sexualité portant atteinte à l’égalité entre hommes et femmes, à la dignité des femmes. Cette interprétation du code de procédure civil est venue nous rappeler que, dans le domaine de la sexualité, contrairement aux hommes, les femmes restent sous contrôle social.
Après ce jugement, quel a été le sort de cette jeune femme ? Les pressions familiales existent malheureusement pour de nombreuses jeunes filles et jeunes femmes, qui ne peuvent assumer librement leur vie affective et sexuelle. Un jugement comme celui-ci va renforcer cette situation. La garde des Sceaux, Rachida Dati, a demandé au parquet de Douai de faire appel, après avoir tergiversé en déclarant qu’un jugement comme celui-ci pouvait permettre de « protéger la femme ».
Néanmoins, la LCR met en garde tous ceux qui voudraient profiter de l’indignation légitime suscitée par ce jugement pour relancer une campagne de stigmatisation des personnes musulmanes. Dans toutes les religions, la virginité est une norme réactionnaire destinée à contrôler le corps des femmes et à exercer un pouvoir sur leur vie. N’oublions pas que le pape réaffirme régulièrement la condamnation du droit des femmes à disposer de leur corps. À l’heure où le gouvernement commence à mettre en cause le principe de mixité à l’école, et qu’il cherche à démanteler le service des droits des femmes, plus que jamais, nous devons défendre sans concession le droit des femmes à disposer de leur corps.