Entraves à la liberté d’expression, arrestations, non délivrance de visas,
syndicalistes empêchés de se rendre au contre G8 : Le Japon est un bon
policier
de la mondialisation !
Une délégation de No Vox France est au Japon depuis le 28 juin à
l’invitation de
No Vox Japon et dans le cadre de la mobilisation contre le G8. La délégation
a
pris part à quatre manifestations contre le G8 depuis son arrivée, à Tokyo,
Osaka et Sapporo.
Le réseau No Vox dénonce l’absence de liberté de manifester au Japon. Les
autorités japonaises tolèrent tout au plus des cortèges d’une largeur de
trois
mètres (le couloir normalement dévolu aux bus), empêchant le déploiement de
nos
banderoles. Les cortèges sont séparés des voies restant ouvertes à la
circulation par une colonne de policiers et les défilés importants sont
fractionnés en sous-groupes par des cordons de gardes mobiles.
Il n’en a pas toujours été ainsi et c’est la faiblesse actuelle du rapport
de
force social, due à des décennies de répression policière intense, qui
explique
cette réduction drastique du champ des libertés publiques, et cela malgré la
lutte. Les militants japonais sont objectivement terrorisés par l’arbitraire
policier qui réduit à néant leur marge revendicative.
De ce point de vue le Japon, loin d’être un cas particulier, nous apparaît à
l’avant-garde de la gouvernance mondiale et un modèle de ce qui se met en
place
dans toutes les démocraties parlementaires. La liberté de manifester vidée
de sa
substance jusqu’à la farce n’est en effet rien d’autre que le mode de «
participation » qu’on voudrait imposer aux citoyens dans le cadre de la «
gouvernance mondiale ». Soit un Conseil d’Administration de l’entreprise
mondiale incarné par le G8 entièrement soumis à ses actionnaires du monde
des
affaires et un « couloir d’expression », comme il y a des couloirs de bus,
dans
lequel il est interdit de franchir la ligne blanche, celle qui perturbe la «
fluidité » des marchés, la circulation automobile valant ici pour métaphore.
Il est vrai qu’on n’est jamais trop prudent, même lorsqu’on a décidé de se
réunir le plus loin possible des populations pour discuter de leur sort, au
point d’empêcher avec efficacité de nombreux précaires et militants du Japon
de
faire le voyage.
Face à cette situation, lors de la manifestation unitaire de Sapporo du 5
juillet 2008, les mouvements ont franchi pacifiquement la ligne blanche,
débordant le cordon policier et doublant la surface réservée à la liberté
d’expression. Trois personnes de nationalité japonaise ont été arrêtées,
dont un
membre de No Vox Japon, et du matériel saisi (camion et sono.)
Le réseau No Vox exige la libération immédiate des interpellés sous le
prétexte
de « non respect des règles concernant la circulation des voitures de la
préfecture de Hokkaido car la voiture de son a prolongé le largeur de la
manifestation avec intention et excité les manifestants. Entraves à
fonctionnaires de police en service par refus d’obtempérer et d’arrêter le
véhicule. » Pour ces délits mineurs, aucune loi n’ayant été violée, la garde
à
vue peut être prolongée jusqu’à 23 jours et les interpellés passibles de
prison
ferme, ce qui atteste une fois encore que le Japon a de facto aboli la
liberté
de manifester tout en tentant de préserver les apparences.
En outre les manifestants réunis au camp de Toyoura au « plus prêt » de la
zone
rouge, soit les 20 km magnanimement accordés par les autorités, ont été
bloqués
dès la sortie du camp ce 7 juillet, sous prétexte qu’ils se dirigeaient vers
la
gare, refusant de faire 20 km à pied en rase campagne sous la pluie pour
atteindre le point de manifestation autorisé.
Par ailleurs, le réseau No Vox proteste énergiquement contre le blocage
d’une
délégation de syndicalistes sud-coréens par la police japonaise et exige
qu’ils
puissent se rendre immédiatement à Hokkaido. De même, l’ajournement de la
délivrance d’un visa à une représentante d’organisations de base kenyanes
qui
devait intervenir dans de nombreux ateliers est intolérable.
D’une façon générale nous demandons aux autorités d’assumer publiquement
leur
choix d’abolir les libertés publiques plutôt que de tenter de donner le
change
en rendant la démocratie encore plus formelle qu’elle n’est, jusqu’à
l’absurde !
Nous soutiendrons l’ensemble des associations et organisations japonaises,
et
notamment celles portant la voix des travailleurs journaliers, qui se
mobiliseront pour reconquérir un espace de liberté. Ces simulacres de
liberté
d’expression et la limitation à la portion congrue de l’accès à l’espace
publique ne sont pas digne d’un pays se définissant comme démocratique. Pour
que
la situation japonaise ne puisse être érigée ailleurs en exemple de « bonne
gouvernance », nous devons apporter une solidarité sans faille à l’ensemble
de
ceux qui se battent pour la liberté d’expression au Japon.
No Vox
Toyoura, le 7 juillet 2008