Négociations Unedic
À l’approche de la date butoir des négociations sur l’assurance chômage, le patronat entend baisser les indemnisations et exclure un nombre croissant de chômeurs du système.
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Contrairement aux déclarations du Medef, le deuxième avant-projet de texte, présenté le 9 décembre, annonce une dégradation importante de l’indemnisation des chômeurs. En posant comme principe que « les durées d’indemnisation ne peuvent pas dépasser les durées de cotisation », le texte enregistre un nouveau recul par rapport à la convention actuelle où, par exemple, six mois de cotisations ouvrent droit à sept mois d’indemnisation. Avec ce nouveau texte, la durée minimale de d’activité est de cinq mois (au cours des dix derniers mois), qui ouvrent droit à quatre mois d’indemnisation
La durée maximale d’indemnisation serait fixée à 18 mois (contre 23), ce qui privera de couverture entre 179 000 et 377 000 personnes. Le travail à temps partiel ne serait indemnisé que dans la limite de 80 heures par mois et pendant six mois seulement.
À l’appel des associations de chômeurs et d’intermittents ainsi que des organisations syndicales, près de 2 000 personnes se sont rassemblées, mardi 16 décembre, devant le siège parisien du Medef. Les associations de chômeurs, la CGT, Solidaires, Attac, avec le soutien de partis politiques de gauche, dont la LCR, ont lancé un appel demandant aux négociateurs de ne pas signer le projet de convention en l’état, avec comme principales revendications l’interdiction des licenciements dans les entreprises qui font des bénéfices, un fonds abondé par le patronat pour le maintien du salaire de tous les licenciés, l’augmentation conséquente des allocations chômage et la prolongation de leur durée jusqu’à l’obtention d’un emploi librement choisi, l’indemnisation de toutes les formes de chômage et de précarité, des premiers demandeurs et des paysans dans la misère, le libre choix de son emploi, la garantie d’un revenu décent, la continuité des droits sociaux pour tous, le relèvement conséquent de tous les minima sociaux (RMI, API, AAH, ASS).
Lucas Maldini
* Paru dans Rouge n° 2279, 18/12/2008.
Le contrat de transition professionnelle (CTP)
Le CTP, actuellement expérimenté dans sept bassins d’emplois, consiste en une prise en charge, pendant douze mois, équivalente à 80 % du dernier salaire brut. Les chômeurs concernés ont le statut de stagiaires de la formation professionnelle et ne sont donc pas comptabilisés dans les chiffres du chômage.
Dans les bassins d’emplois concernés, ce CTP est loin d’être une garantie car, quand Renault licencie à Sandouville, par exemple, ce ne sont pas les sous-traitants et équipementiers des alentours qui vont embaucher. Les licenciés sont tenus de donner suite à toute offre d’emploi correspondant aux orientations définies par le contrat, y compris si cette offre implique une mobilité géographique ou professionnelle.
L’extension de ce dispositif à dix-huit nouveaux bassins est prévue (dont Niort et Sandouville). En contrepartie, le Medef propose une dégressivité de l’indemnisation.
L. M.
* Paru dans Rouge n° 2279, 18/12/2008.
PÔLE EMPLOI : chômeurs méprisés
Alors que la crise provoque un afflux d’inscriptions, le Pôle emploi, qui doit fusionner, en 2009, l’ANPE et l’Assedic, est en crise avant sa naissance. Philippe Sabater appartient au Syndicat national unitaire (SNU-FSU) à l’ANPE.
● La crise a-t-elle des effets sur l’afflux de nouveaux demandeurs d’emploi ? On parle de 100 000 dossiers en retard ?
Philippe Sabater – Il y a des chômeurs qui vont passer Noël sans avoir été indemnisés, c’est certain. Les licenciements augmentent. La crise va s’amplifier en 2009. La réponse de la direction générale est d’embaucher 200 CDD, des personnes non formées, pour résorber ces dossiers en attente. C’est le premier couac du Pôle emploi, et ce ne sera pas le dernier.
● Pourquoi des actions symboliques, le 15 décembre, devant l’ancien et le futur siège de Pôle emploi ?
P. Sabater – Nous voulons marquer notre entrée symbolique dans les lieux du nouveau Pôle emploi, en signifiant que les salariés et leurs organisations syndicales sont les vrais maîtres d’œuvre de ce service public. Cela fait suite à la grève massive de l’ANPE le 1er décembre, et prépare celle de début janvier, avec les syndicats de l’Assedic. Les salariés de l’ANPE ne souhaitent pas participer au système de coercition à l’œuvre derrière le projet. Avec un contrôle accentué des demandeurs d’emploi et la mise en place d’un « référent unique », qui réponde à la fois à la demande d’emploi et d’indemnisation. Derrière l’« offre raisonnable d’emploi » imposée par le pouvoir, il s’agit de contraindre à accepter des emplois dégradés, à retirer toute possibilité de choix.
● Comment le Pôle sera-t-il organisé ?
P. Sabater – Le système de référent unique devrait être mis en place à partir du deuxième semestre 2009. Auparavant, il y aura des formations dérisoires, trois jours pour les conseillers ANPE et sept pour les agents Assedic volontaires. C’est totalement surréaliste. On fait croire qu’en modifiant un outil, en pleine crise de l’emploi, on va changer les choses. Le logiciel d’indemnisation, très simplifié, ne donnera qu’une fourchette allant de 50 à 100 euros pour le calcul des droits des chômeurs. C’est une négation des métiers complexes qui existent à l’ANPE et à l’Assedic, doublée d’une opération de communication. Ils veulent des gains de productivité avec des temps de plus en plus réduits passés avec les demandeurs d’emploi, et des modes opératoires stéréotypés. L’outil mis en place vise à « normer » le geste professionnel. On proposera très rapidement des offres raisonnables d’emploi, que les chômeurs seront tenus d’accepter. De plus, dans le budget 2009, il est prévu d’augmenter la participation du secteur privé dans le suivi des chômeurs ; les entreprises de travail temporaire recevront un budget de 100 millions d’euros (au lieu de 80) pour s’occuper de cette part du marché du travail.
Propos recueillis par Dominique Mezzi
* Paru dans Rouge n° 2279, 18/12/2008.
ANPE. C’est la réalité de la politique de démantèlement de l’école mise en œuvre par Darcos. Depuis quelque temps, on trouve, dans les agences de l’ANPE, des annonces telles que celle-ci : « Instituteur/institutrice d’école primaire H/F. Vous assurerez le remplacement d’une institutrice qui enseigne en classe de CM2. Vous travaillerez tous les jours de 9 h à 16 h, sauf le vendredi de 9 h à 12 h. Type de contrat : contrat à durée déterminée de cinq mois. Expérience souhaitée d’un an en classe de CM2. » Voilà contre quoi les instits et personnels de l’Éducation nationale se dressent aujourd’hui.
* Paru dans Rouge n° 2279, 18/12/2008.
Le Medef contre les chômeurs
Cette année, la manifestation appelée par les associations de chômeurs, le 6 décembre, à Paris, était marquée par la crise économique et la remontée du chômage, mais aussi par les négociations en cours sur la nouvelle convention d’assurance chômage (lire Rouge n° 2277). Plusieurs milliers de personnes y ont participé. Outre les cortèges des associations de chômeurs, une forte délégation des intermittents était présente. Leur situation fait aussi l’objet des négociations en cours. Au niveau politique, on notait une présence du PCF et du Mouvement des jeunes socialistes (MJS), un cortège de Lutte ouvrière et, bien sûr, un cortège du NPA. Les dernières propositions du patronat concernant l’indemnisation, en date du 5 décembre, sont de véritables provocations. Sous prétexte de simplification, le patronat veut réduire les durées d’indemnisation à dix-huit mois maximum pour les moins de 50 ans (23 mois actuellement) et à 30 mois maximum pour les plus de 50 ans (36 mois actuellement). Pour les jeunes, sa proposition prévoit le versement d’une prime pour ceux qui ont travaillé quatre mois durant les douze derniers mois. Cette prime ne serait qu’une avance remboursable, si le jeune obtient un jour des premières indemnités chômage.
Le 16 décembre, une journée d’action est prévue, à l’appel de différents secteurs de la CGT (chômeurs, saisonniers, jeunes, spectacles, organismes sociaux, intérim, ANPE), d’AC !, de l’Apeis et du MNCP, avec un rassemblement devant le siège parisien du Medef, à 14 h.
* Paru dans Rouge n° 2278, 11/12/2008 (Au jour le jour).
ANPE-ASSEDIC : Plus de chômeurs, moins d’indemnisations
Les négociations sur la nouvelle convention d’assurance chômage doivent se conclure le 23 décembre. Sarkozy et le Medef entendent faire payer la crise aux chômeurs.
Les « partenaires » patronaux (Medef, UPA, CGE-PME), dans leur logique de baisse du coût du travail, ont comme priorité la réduction des cotisations. Le gouvernement leur demande de les réduire de 1 % en trois ans, ce qui ponctionnera les indemnisations chômage de 4 milliards d’euros, alors que le nombre de chômeurs va augmenter. Les chômeurs sont de moins en moins nombreux à être indemnisés, principalement du fait de l’insuffisance de la durée d’activité qui conditionne l’ouverture de droits. Un quart des chômeurs officiels n’a aucun revenu.
Tous les « partenaires sociaux », excepté la CGT, proposent une filière unique avec une indemnisation au bout de quatre mois de travail, contre six actuellement. Sous couvert de simplification, ce retour à une filière unique, sans filière pour les précaires, exclura encore de nombreux jeunes et précaires de l’indemnisation. Les calculs d’AC ! montrent que les nouvelles durées d’indemnisation seraient particulièrement défavorables aux salariés. Si la non-dégressivité des indemnisations dans le temps n’est pas remise en cause, les durées d’indemnisation diminuent, ce qui revient au même.
La question des saisonniers est également posée. La convention de 2006 stipule qu’ils ne peuvent être indemnisés que trois années de suite. Pour peser sur les négociations, un préavis de grève est déposé pour le 20 décembre, en pleine saison de ski.
Les signataires de la dernière convention avaient justifié leur signature par le fait que serait mis en place un meilleur accompagnement des chômeurs. En fait, c’est l’obligation d’accepter une offre dite raisonnable d’emploi qui se met en place (lire Rouge n° 2267). Les négociations sur les conventions Unedic ont toujours abouti à une baisse de l’indemnisation et à une augmentation des radiations. Le patronat peut aussi faire le choix de dynamiter le système et de faire éclater l’assurance chômage entre assurances privées et solidarité assurée par l’État.
Ces discussions ont lieu dans un contexte de mobilisations. Le 6 décembre, aura lieu la manifestation des chômeurs pour demander une indemnisation égale au Smic et la continuité des droits sociaux. L’appel fait aussi le lien avec les salariés en poste, en demandant l’interdiction des licenciements dans les entreprises qui font des bénéfices.
Lundi 1er décembre, les salariés de l’ANPE étaient massivement en grève (65 %), à l’appel de l’ensemble des syndicats, contre la fusion à marche forcée de l’ANPE et de l’Unedic, et ses conséquences pour les chômeurs. Outre les revendications sur les salaires, les agents du futur « Pôle emploi » demandent des effectifs pour assurer correctement leurs missions et, par exemple, le rétablissement de la possibilité, pour les chômeurs, de contacter directement leur conseiller.
CHÔMAGE EN HAUSSE
46 900 chômeurs de plus ont été enregistrés, en octobre, à l’ANPE. C’est la plus forte hausse depuis 1993, et la barre des 2 millions de chômeurs officiels est de nouveau franchie. Cette hausse concerne principalement les jeunes. La crise touche tous les secteurs, même ceux, comme le bâtiment, qui étaient considérés jusqu’ici comme porteurs.
Les seules réponses du gouvernement sont l’extension du contrat de transition professionnelle (CTP), qui permet de sortir les chômeurs des statistiques pendant le temps de leur prise en charge, l’accélération de la fusion ANPE-Unedic, le discours habituel sur les « gisements » d’emplois comme dans les services à la personne (qui n’offrent que des durées de travail de douze heures par semaine en moyenne) et quelques aides ciblées pour les entreprises concernant le crédit.
Il faut interdire les licenciements et embaucher massivement, dans les services publics notamment.
Lucas Maldini
* Paru dans Rouge n° 2277, 04/12/2008.
Avec les chômeurs le 6 décembre
« Nous ne paierons pas leur crise ! » C’est sous ce cri qu’appellent à manifester les associations de chômeurs, samedi 6 décembre. Cette année, cette manifestation prend un sens particulier, du fait de la crise économique et des attaques contre les chômeurs.
Les licenciements annoncés dans toutes les activités représentent un véritable obstacle pour retrouver un emploi. De nombreux intérimaires licenciés sont venus rejoindre les chômeurs depuis septembre. Le droit à un véritable emploi est remis en cause par le RSA (revenu de solidarité active), qui va étendre les petits temps partiels. En soutenant « l’interdiction des licenciements dans les entreprises qui font des profits », l’appel des associations de chômeurs montre la nécessité de l’unité des luttes des chômeurs avec celles des salariés contre les licenciements et pour la garantie des emplois.
En même temps que l’accès à l’emploi se restreint, les remises en cause des droits des chômeurs se succèdent depuis des années. Moins de la moitié des chômeurs inscrits sont indemnisés par le régime d’assurance chômage. L’application du principe de l’offre raisonnable d’emploi (ORE), obligeant les chômeurs à accepter des emplois dégradés, va augmenter les radiations déjà en hausse. Le Medef annonce, pour les négociations qui s’ouvrent aujourd’hui, sa volonté de réduire encore les cotisations chômage à sa charge. Le passage du RMI au revenu minimum garanti, qui va le remplacer, fait craindre qu’une proportion toujours plus grande de chômeurs soit non indemnisée, voire non inscrite, et disparaisse ainsi de toute statistique et de toute existence sociale.
Les difficultés pour mobiliser des chômeurs témoignent des effets démobilisateurs de la crise économique. Plus que jamais, il faut que les luttes des chômeurs rejoignent les mobilisations des salariés contre les licenciements. Plus que jamais aussi, les salariés doivent étendre leurs préoccupations et leurs mobilisations aux plus démunis, ceux qui ne peuvent même pas faire grève faute d’emploi.
Droit à l’emploi, droit au revenu, ces mots d’ordre sont indissociables. Les salariés de Ford ont annoncé qu’ils participeraient à la manifestation des chômeurs de Bordeaux. C’est un début !
MANIFESTATION LE SAMEDI 6 DÉCEMBRE
à 14h, place Stalingrad, à Paris,
à l’appel de AC !, Apeis, Attac, CIP-IDF, CNDF, Fondation Copernic, Marches européennes, MNCP, No-Vox, Stop-Précarité, Syndicat national des arts vivants, Union syndicale Solidaires…
Louis-Marie Barnier
* Paru dans Rouge n° 2276, 27/11/2008 (Editorial).