La lettre à Nicolas Sarkozy, Président de la République
Monsieur le Président,
Lors de votre venue en Guyane le 11 février 2008, puis lors de votre entrevue avec le Président brésilien le 12 février 2008, vous avez, notamment, fait état de votre volonté de lutter contre la destruction de la forêt guyanaise par les activités liées à l’orpaillage clandestin.
Je connais la Guyane et le village de Saül en particulier, depuis 16 ans. D’autre part, à titre personnel et sans aucun soutien financier, je passe chaque année mes congés avec des amis durant 4 semaines en forêt profonde sur le mont Galbao (depuis 2004). À cette occasion, je mène une petite étude scientifique sur les oiseaux dans le cadre d’un programme personnel en tant que bagueur collaborateur bénévole du Muséum national d’histoire naturelle de Paris (MNHN/CRBPO).
Or, il se trouve qu’à l’occasion de ces expéditions, en tant que « touriste » ayant une modeste connaissance de ce milieu si riche, je constate facilement et de façon extrêmement alarmante la destruction inexorable de la forêt dans cette partie du parc national et l’inefficacité poignante des opérations comme « Anaconda » et « Harpie ».
En trois ans l’évolution est spectaculaire :
– Destruction physique des sites : criques polluées, création de bassins de décantation, création de très nombreux layons de chasse, abattages d’arbres de valeur commerciale…
– Installation pérenne et en toute tranquillité d’activités d’orpaillage illégales : réalisation d’un abatti de 1,5 hectare, acheminement de bétail (zébus, chèvres, porcs) depuis le Brésil et le Surinam, mise en place de villages et de camps de repli en cas d’interventions de police …
– Perte de la biodiversité : disparition des tinamous, hoccos, tapirs, agoutis, grande méfiance des singes comme l’atèle, découverte de nombreux cadavres liés à la chasse …
– Apparition de problèmes sanitaires majeurs dans la zone de Saül : zone nouvellement impaludée dans des proportions alarmantes (falciparum et vivax), pollutions des criques …
– Etc.
Ces quelques faits et constats sont connus de tous - habitants de Saül, élus, représentants du parc national, des autorités, etc. - tant ils sont flagrants au quotidien.
Je tiens également à vous préciser que, régulièrement, je suis amené à rencontrer fortuitement de nombreux orpailleurs clandestins et qu’à chaque fois, contrairement à ce qui peut être dit ici ou là, ils ne manifestent aucun signe d’animosité ou de violence. Bien au contraire, ils prennent toutes les précautions nécessaires pour montrer ostensiblement leur attitude pacifique : fusils cassés et déchargés, discussions cordiales, etc.
Aussi, partant de ces constats et au regard des efforts fournis par l’État dans la lutte contre l’orpaillage, je souhaite, Monsieur le Président, vous poser trois questions simples, pragmatiques et que bon nombre de citoyens se posent :
– Pourquoi l’État ne contrôle-t-il pas les achats de carburants des sites officiels, comme celui de Dorlin, en les comparant à la consommation maximum possible de leurs installations, de façon à s’apercevoir très facilement qu’il existe un marché « au noir » vers les sites clandestins ? Sachant que les carburants sont le « nerf de la guerre » des sites clandestins.
– Pourquoi l’État ne contrôle-t-il pas les avions ravitaillant les sites d’orpaillage clandestins depuis l’aéroport de Rochambeau ou entrant sur le territoire national depuis le Surinam ?
– Pourquoi les gendarmes venant à Saül n’interviennent-ils pas sur la dizaine de sites situés à moins de 6 heures de marche du village de Saül et qui sont connus de tous, y compris de simples touristes ?
Je n’ose imaginer qu’un Président aussi actif que vous, puisse rester passif devant l’échec avéré des opérations de lutte mises en place. Il faut intervenir autrement et extrêmement rapidement ; le devenir de la dernière parcelle de forêt tropicale européenne en dépend.
Monsieur le Président, vous avez invité Monsieur Richard Bohringer à vous entretenir d’une de ses passions qu’est le Sénégal afin d’enrichir vos connaissances sur les problématiques liées à ce pays.
Aussi, suis-je disponible pour vous rencontrer personnellement et vous exposer des cas concrets concernant l’orpaillage clandestin en Guyane. Je pourrais ainsi contribuer modestement à la résolution de ce problème.
Veuillez croire, Monsieur le Président, à l’assurance de mon profond respect.
Laurent Brucy et l’ensemble des membres des expéditions Galbao depuis 6 ans.
Lettre envoyée à :
A Mesdames et Messieurs les ministres français : Premier ministre, Ministère des affaires étrangères et européennes, Ministère de l’agriculture et de la pêche, Ministère de la défense, Ministère de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de l’aménagement du territoire, Ministère de l’économie, de l’industrie et de l’emploi, Ministère de l’immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du développement solidaire, Ministère de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales, Ministère de la justice.
A mesdames et messieurs sénateurs, députés et élus politiques de France et d’Europe : Christiane Taubira, Chantal Berthelot, Jean-Etienne Antoinette, Georges Patient, les commissions parlementaires des affaires économiques, de l’environnement et du territoire, les groupes d’études de l’assemblée nationale (« tourisme », « ressources minières », « santé et environnement », « parcs naturels nationaux et régionaux », « forêt, bois, meuble et ameublement »), Martine Aubry, UMP Guyane, Les verts, Corine Lepage, Noel Mamere, Dominique Voynet, Yves Cochet, Les jeunes verts, Conseil de l’Europe, Les verts Europe, Denis Beaupin, Aurélie Filippetti, Vincent Peillon, Jean-Pierre Raffarin, Jean Luc Mélenchon, …
A mesdames et messieurs les élus des collectivités territoriales et autres structures de Guyane : Herman Charlotte, maire de Saül, MM les présidents du conseil général et régional de Guyane, messieurs Frederic Mortier, Kamran Khazraie du parc national de Guyane, ONF, ONCFS, RNF, écomusée Approuague, Comite du tourisme de Guyane, DIREN Guyane, …
A mesdames et messieurs les journalistes et les rédacteurs en chef : AFP, Reuters, France Inter, RFO radio, Europe1, RTL, RFI, RMC infos, Radio-France, iTV, TF1, France 2, France 3, RFO tv, France O, Canal+, Marianne, Le Figaro, Le Point, Ouest France, Le Canard enchaîné, Libération, Le Monde, L’Humanité dimanche, Journal l’Humanité, Le parisien Ici en France, 20 minutes, Siné Hebdo, Télérama, Courrier international, Charlie hebdo, France Guyane, Une saison en Guyane, La semaine Guyanaise, Terres de Guyane, lemag.net, Europubli, Futura sciences, JNE, Reporter sans frontière, Philippe Dubois, Yann Hermieu, Siné, Luce lapin, Fabrice Nicolino, Laurent Marot, Marc Giraud, Nathalie Fontrel, Denis Chessoux,…
A mesdames et messieurs les responsables d’associations de protection de l’environnement : Allain Bougrain-Dubourg, Hubert Reeves, Yann Arthus Bertrand, Sébastien Moncorps, Florient Kirchner, , Thierry Dutertre, WWF France, GREENPEACE, LPO, FNE, RSPB, IUCN, Robin des bois, ATTAC collectif orpaillage, RNR Trésor, BIRDLIFE International, GEPOG, GADEPAM, APFT, Sciences frontieres, ROC, Ushuaia magazine, IFAW, KWATA, Sos planète, Les amis de la terre, FOAG, Solidaritéguyane, CIPRA, SPA, Fondation Nature et découverte, Agir pour l’environnement, Groupe Pandion, Bruno Manser Fonds, GRAINE, CORA, Planète écologie, Forest World, Forêts du monde, United Nations Forum on Forests, …
A mesdames et messieurs les chercheurs, scientifiques et citoyens français : IRD, CNRS, SYLVOLAB, MNHN, François Baillon, Guy Jarry, Jean-Marc Thiollay, JAL Voyage, Agence couleur amazone, IFREMER, Le Guen éditions, Compagnie des guides de Guyane, PEFC, AFD et près de 1000 citoyens français soucieux du devenir de la Guyane française, …
Chronologie d’un désastre annoncé et dénoncé...
Arrivés en 2004 sur le site touristique de Galbao pour la première année des expéditions Galbao, nous avons eu le bonheur de découvrir un forêt magnifique et intacte.
Puis en 2007, les premières dégradations sur ce secteur à moins de 6 heures de marche du village de Saül, sont apparues. Les layons de transport de marchandises et les layons de chasse pour ravitailler les sites d’orpaillage clandestins se sont multipliés.
Puis en 2008, sont apparus les premiers camps « de replis » des orpailleurs craignant les fameuses interventions « anaconda ». Ces camps (en fait des carbets)sont prêts à recevoir les orpailleurs en fuite afin qu’ils se cachent des gendarmes. De la nourriture et autres biens matériels sont accumulés, parfaitement emballés pour le cas où...
La crique au niveau du passage dit « des 2 ponts » (après le croisement de Ballenfoi) est désormais polluée. L’eau n’est plus translucide comme auparavant mais laiteuse, épaisse et les sédiments se sont tellement accumulés qu’il est imossible de la traverser à pieds...
En parallèle, il devient de plus en plus difficile d’observer les agoutis, les hoccos, les agamis ou encore le tapir que nous suivions « à la trace » depuis 2004 dans ce secteur.
Et le désastre en 2009 !!....
A moins de 200 mètres du carbet touristique de l’ONF, un abatti d’environ 1,5 hectare est créé à la vue de tous. Y compris de ceux qui prennent l’avion d’Air Guyane quand celui-ci fait la « tournante » Saül/Maripa/Cayenne...
Au pied du carbet touristique, des bouses de zébus traduisent le secret de polichinelle sur les transferts de bovins vivants depuis le Brésil à travers la forêt pour alimenter les sites d’orpaillage... La viande de cabri et porc venant elle du Surinam !!
Et notre pauvre crique des « 2 ponts » est quant à elle entourées de magnifiques bassins de décantation ....
Nous ne parlons pas de la pinotière qui est complètement ravagée, des sondages effectués partout dans le secteur, des coups de feu (chasse) réguliers, des moto pompes, tronçonneuses et autres chaines Hifi qui couvrent les bruits de la forêt, de l’arrivée massive du vivax et du falciparum à Saül ou encore les singes atèles (kwata) qui n’essaient même plus de « bombarder » les intrus mais qui se sauvent de peur de recevoir un coup de feu !!....
Devant ce constat désolant, l’inéfficacité des opérations anaconda ou harpie, les promesses non tenues des uns ET des autres, le manque de moyens du parc national et de l’état pout réagir et la désolation de la population locale nous n’en sommes pas restés au fait d’alarmer les autorités locales comme nous le faisons depuis 2007.
Nous avons décidé d’écrire au chef de l’Etat et d’en faire part au plus grand nombre.
Soutenez notre démarche en transférant l’adresse de notre blog et la lettre que nous avons adressé au Président Sarkozy.
MERCI DE VOTRE SOUTIEN
Laurent, Alain & tous les membres des expéditions Galbao 2004/2009
La lettre au Président : suite...
La lettre au Président de la République a été envoyée lundi 09 février.
Depuis, vous avaez été très nombreux à nous soutenir dans notre démarche ainsi qu’à relayer ce courrier à vos amis, proches ou connaissances. D’un premier comptage, il s’agit de plus de 5 000 personnes au minimum ! MERCI à toutes et à tous.
Vous avez été nombreux à vous étonner du nombre de ministères « finalement impliqués » dans la problématique de l’orpaillage clandestin et de la destruction de la forêt en Guyane. C’est la démonstration que ce sujet est un sujet d’envergure nationale.
Depuis ce matin, une pétition de soutien à été mise en ligne par une citoyenne « française et européenne » qui souhaitait soutenir notre action et amplifier l’effet de la lettre.
Aussi, nous vous invitons à signer cette pétition sur le lien : http://www.mesopinions.com/Contre-l... [voir ci-dessous]
Côté politique, les deux premières personnes ayant réagi sont François Bayrou (MODEM) et Corine Lepage (CAP21) qui biensûr, soutiennent notre démarche. Merci de leur réactivité.
Le PS et l’UMP sont à cette heure silencieux.... Mais il est vrai que les DOM TOM ont une autre actualité tout aussi importante en ce moment ...
Côté médias, la lettre a été publiée dans le journal Libération daté du 12 février et nous avons réalisé un entretien téléphonique avec RFO. Merci à eux.
Nous avons également reçu le soutien de la Ligue pour la Protection des Oiseaux via son président, Allain Bougrain-Dubourg, qui a également informé le ministre de l’environnement, Jean-Louis Borloo de l’existence de notre lettre.
En résumé, nous attendons encore quelques jours afin de laisser le temps au président de nous répondre et aux députés et ministres de bien vouloir nous adresser leurs avis sur la question de l’orpaillage. Nous tirerons ensuite les conclusions de cette action.
Merci
Laurent et Alain.
La forêt guyanaise est perdue...
Réponse de Monsieur Cédric Goubet, Chef de cabinet du Président de la République, à notre lettre concernant l’orpaillage clandestin en Guyane.
Monsieur,
Le Président de la République a bien reçu votre lettre et m’a confié le soin de vous répondre.
Monsieur Nicolas Sarkozy a tout à fait conscience des dégâts occasionnés par l’orpaillage clandestin en Guyane et des problèmes de sécurité que cette activité génère.
Le dispositif « Harpie » annoncé par le Chef de l’Etat lors de son déplacement en Guyane, le 11 février 2008, a permis, au vu des résultats obtenus entre mars et juin 2008, de déstabiliser de manière significative l’activité aurifère illicite en Guyane et les économies souterraines liées à l’orpaillage clandestin.
La destruction des sites d’exploitation et l’assèchement des flux de ravitaillement ont contraint, en effet, les orpailleurs clandestins à cesser leur activité en quittant le territoir. L’efet recherché à cette opération, qui visait à une destabilisation de l’économie de l’orpaillage illégal dans ce département, a été globalement atteint malgré l’immensité et la densité de la forêt guyanaise.
La lutte contre ce phénomène constitue, croyez-le, une priorité gouvernementale en Guyane à laquelle le Chef de l’Etat est très attaché.
Aussi n’ai je pas manqué de signaler votre démarche au secrétaire d’Etat à l’Outre-Mer.
Je vous prie d’agréer, Cher Monsieur, l’expression de mes sentiments les meilleurs.
Cédric GOUBET
Chef de cabinet du Président de la République"
Notre avis sur ce courrier :
La forêt guyanaise est perdue !
Monsieur Goubet ne répond absolument pas à nos questions. Il se contente simplement de reprendre le sujet de nos questions pour affirmer sans état d’âme que les opérations Harpie ont réglé les problèmes dénoncés ET constatés sur le terrain il y a à peine 15 jours encore !
A travers ce courrier, il est affligeant de voir comment le chef de cabinet du Président de la République répond à un sujet et une problématique qu’il ne connait visiblement pas...
Affirmer que (dixit) « la destructions des sites d’exploitations et l’assèchement des flux de ravitaillement ont contraint, en effet, les orpailleurs clandestins à cesser leur activité en quittant le territoire » est une manière de nous remercier et de nous prier, gentiment, nous citoyens dénoncant un problème grave d’atteinte à l’environnement sur le sol français, d’aller voir ailleurs...
Enfin, signaler notre démarche au Ministre de l’Outre Mer, qui, en ce moment semble avoir quelques soucis avec les DOM-TOM est il une preuve de prise en compte de notre courrier ?....
Finalement, tout comme la problématique « orpaillage » est connue de tous en Guyane, nous résumerons l’attention de l’Etat sur ce sujet avec la pharse non moins connue en Guyane : « Ce qui compte, c’est que la fusée ariane parte à l’heure. Les guyanais et la Guyane, ils s’en fichent ... ».
Ce qui n’a pas manqué d’ailleurs de s’avérer vrai lors des dernières grèves en Guyane pour la baisse des carburants ...
Laurent et Alain
Contre le massacre de la forêt primaire Guyanaise par l’orpaillage clandestin
Date de création : 13/02/2009
Date de cloture : 13/02/2010
Auteur : Carole Pieroni
13 rue du four à chaux
13007 Marseille
Citoyenne française et européenne
A l’attention de : Monsieur le Président de la République Française
Monsieur le Président,
Je soutiens la démarche de Laurent Brucy et du collectif Galbao, et vous demande d’entreprendre toute action et mesures nécessaires à la lutte contre l’orpaillage clandestin en Guyane Française, et la mise en place de solutions rapides à cette destruction galopante qui menace de nous priver de la dernière parcelle de forêt tropicale française et européenne.
Rappel des faits sur le terrain :
– Installation pérenne et en toute tranquillité d’activités d’orpaillage illégales
– Destruction physique et pollution des sites
– Perte de la biodiversité
– Apparition de problèmes sanitaires majeurs dans la zone de Saül : apparition d’agents vecteurs du paludisme, pollution de l’eau...
« Ces quelques faits et constats sont connus de tous - habitants de Saül, élus, représentants du parc national, des autorités, etc. - tant ils sont flagrants au quotidien ».
Des moyens de lutte encore trop peu exploités, respectueux du Droit et des populations, mériteraient d’être étudiés :
– Surveiller l’approvisionnement en carburants des sites clandestins par un contrôle rigoureux des achats des sites officiels.
– Le contrôle par l’Etat des avions ravitaillant les sites d’orpaillage clandestins.
– Une intervention plus régulière des gendarmes sur les sites de proximité connus de tous.
Rester passif devant l’échec avéré des opérations de lutte mises en place n’est plus possible. Il faut intervenir autrement et extrêmement rapidement.
Je vous prie d’agréer, Monsieur le Président, l’expression de ma très haute considération.
Lien vers le texte : http://expeditions-guyane.over-blog.fr/ [Voir ci-dessus]