Le 8 juillet, 171 millions d’électeurs indonésiens étaient appelés à élire au suffrage universel leur président. Bien que les résultats ne soient pas définitifs, le président actuel, Susilo Bambang Yudhoyono (SBY) est donné vainqueur dès le premier tour avec environ 60 % des votes favorables laissant les 2 autres candidats loin derrière - son actuel vice président Jusuf Kalla et l’ancienne présidente entre 2001 et 2004, Megawathi Sukarnoputri, fille du premier président de l’Indonésie après l’indépendance, Sukarno.
Des militaires toujours bien présents
Cela fait maintenant 10 ans que les indonésiens se sont libérés du jouc de la dictature militaire conduite par Suharto. Pourtant, les trois duos qui se présentaient à l’élection présidentielle comprenaient tous un militaire à la retraite, révélateur du pouvoir politique et économique encore très important de l’armée.
L’actuel vice président Jusuf Kalla, (chef du Golkar le parti de Suharto durant la dictature) avait pour colistier Wiranto, un temps adjudant de Suharto. Wiranto est formellement accusé de crime contre l’humanité alors qu’il dirigeait les forces armées au Timor Oriental.
Prabowo Subianto, le colistier de Megawathi (chef du PDI-P, Parti Démocratique Indonésien de lutte) fut durant la dictature, l’un des chefs du Kopassus, une unité militaire spécialisée dans la contre insurrection et réputée pour ses atrocités. Il est accusé de la disparition de militants pro démocratie en mai 1998 et de violations des droits humains au Timor oriental et en Papouasie occidentale.
Trois candidats, un même agenda néolibéral
Pour finir, SBY est lui-même un général en retraite. Dirigeant du Parti Démocrate, il conduisait durant ces élections, une coalition de 18 partis dont plusieurs partis islamiques. Révélateur de la politique suivie, son colistier, Boediono, était précédemment le chef de la banque centrale.
Bien que leurs campagnes aient revêtu des accents différents, les trois candidats ont joué un rôle actif dans la mise en place des politiques néolibérales qui ont conduit à une augmentation de la pauvreté, du chômage et des destructions environnementales. Ils partagent le même agenda néolibéral.
Jusuf Kalla a joué la carte nationaliste et protectionniste en promouvant le renforcement du capitalisme domestique et un affaiblissement de la domination des capitaux étrangers.
Megawathi a pour sa part utilisé une rhétorique populiste, peu en accord avec sa politique alors qu’elle était présidente.
SBY, considéré par le journal « The Economist » comme le champion des investisseurs étrangers, bénéficie d’une grande popularité, en partie grâce à la lutte contre la corruption. Des mesures économiques comme des aides directes en liquide et les soins gratuits aux familles les plus pauvres ont contribué à assoir sa popularité.
A gauche
Les règles électorales ne permettent pas aux partis de gauche, trop petits, de présenter une candidature. C’est pourquoi, la plupart des organisations de gauche indonésiennes ont mené une campagne pour le boycott militant des élections.
Ce n’est pas le choix fait par une partie du PRD (Peoples Democratic Party), un parti de gauche qui a joué un rôle majeur dans la lutte contre Suharto dans les années 1990. Il a décidé de soutenir une candidature présidentielle contre SBY, argumentant que c’était le meilleur moyen de promouvoir un programme antilibéral à une échelle de masse. A cette occasion, la principale dirigeante du PRD, Dita Sari a lancé un nouveau groupe, les Courageux Volontaires pour Ressusciter l’Autosuffisance (RBBM) afin de soutenir le tandem Kalla – Wiranto, censé parmi les candidats avoir les positions les plus proches de Papernas. Une telle tactique électorale risque malheureusement de créer des illusions sur les candidats et d’affaiblir la gauche indonésienne.
Ces choix politiques ne se sont pas fait sans problème au sein du PRD. Une partie en désaccord avec ce cours opportuniste a été exclue et a depuis formé le Comité Politique pour les Pauvres- PRD (KPRM-PRD) qui a pris une part active dans la campagne de boycott des élections.