Jardins à la française, jardins à l’anglaise. En France, depuis des siècles, les relations de l’homme avec la nature se caractérisent par la réalisation de parcs splendides comme celui du château de Versailles. En Angleterre, depuis des siècles, les parcs sont aménagés pour proposer au public des ensembles les plus proches possible de la nature. Cette différence de traitement de la nature s’exprime de manière caricaturale par la présentation de part et d’autre du Channel de deux sentiers de découverte des arbres : l’un se trouve à la périphérie de Londres, dans le parc de Kew, le plus beau jardin botanique du monde.
Un « Treetop Walkway » permet au visiteur de découvrir la forêt à la cime des arbres en cheminant sur un parcours situé à 20 mètres de hauteur. Ce parcours est une passerelle métallique rigide qui serpente entre les sommets des arbres sans les toucher. La passerelle est portée par des pylônes métalliques et on y accède par un escalier, mais un ascenseur permet aux handicapés moteurs et aux personnes du troisième âge de profiter du spectacle magnifique et instructif.
En France, un « sentier suspendu dans les arbres » a été réalisé dans la forêt de Rambouillet par l’Office national des forêts. Un parcours permet de circuler à mi-hauteur des arbres et de cheminer sur 300 mètres grâce à des passerelles souples. L’intention est très bonne, mais à la différence de Kew, le parcours à mi-hauteur ne donne pas une image différente de la forêt telle qu’on l’observe au ras du sol ; des passerelles en pente et présentant un fort tangage empêchent toute personne âgée ou handicapée de se lancer dans l’aventure ; et plus surprenant, les plates-formes ont été accrochées sur chaque arbre en perçant les troncs des chênes par des grandes tiges métalliques de 5 cm de diamètre. Ces beaux arbres sont donc ligotés par des câbles métalliques et perforés par des barres d’acier !
Cet exemple n’est pas le seul. L’élagage des arbres le long des rues de Paris a pris un tour effarant avec la suppression - au prétexte qu’ils sont malades - des plus beaux et des plus vieux platanes. Le très vieux et très beau saule pleureur qui plongeait ses branches dans la Seine au chevet de l’île de la Cité n’est plus. Il a été achevé récemment avant qu’il puisse mourir de sa belle mort. Peut-être menaçait-il le trafic des péniches...
Les vieux arbres du quai d’Orléans ont été systématiquement élagués chaque année - par une coupe au carré à la française - et ont été remplacés, eux aussi, par des arbres maigrichons. En face, sur le quai de la Tournelle, on a au contraire planté un camion poubelle - peint en vert - qui toute la semaine (sauf les week-ends) broie, dans un joyeux vacarme, des déchets ménagers que lui apporte une noria de petits camions bennes.
Il reste heureusement des lieux relativement préservés de la fureur des aménageurs et des tronçonneurs à la française. Une visite au platane que Buffon a planté dans le Jardin des plantes en... 1734 s’impose. Cet arbre majestueux, âgé de 370 ans, qui n’a jamais été traité ni élagué, fait à juste titre l’admiration de tous les promeneurs. Il se porte... comme un charme !