Depuis le 9 août, une barre de combustible nucléaire est en suspens au-dessus du cœur du réacteur n° 1 de la centrale de Gravelines (Nord). Son exploitant, EDF, met actuellement au point un dispositif permettant de retirer sans dommage cet assemblage. Sorti aux trois quarts de son emplacement normal lors de la préparation d’opérations de déchargement du combustible, il joue les épées de Damoclès.
« Dans l’hypothèse d’une chute de cet assemblage, les calculs réalisés par les experts d’EDF montrent que les conséquences radiologiques à l’extérieur du site seraient très inférieures aux valeurs réglementaires (...) pour la population, et qu’elles ne nécessiteraient donc pas d’actions de protection vis-à-vis des salariés de la centrale, de la population et de l’environnement », assure EDF. L’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) a provisoirement classé l’incident au niveau 1 de l’échelle des événements nucléaires, graduée de 0 à 7.
EDF avait été confrontée à un problème similaire en 1999, à la centrale de Nogent-sur-Seine (Aube). Puis en septembre 2008, au Tricastin (Vaucluse), où deux éléments combustibles n’avaient été « sécurisés » qu’après un mois et demi d’études et d’essais.
MAQUETTE
La même méthode devrait être utilisée à Gravelines pour soutenir, puis désolidariser, l’assemblage resté accroché, sous 9 mètres d’eau, aux « éléments internes supérieurs » qui coiffent les 157 barres de combustibles lorsque le réacteur est en fonctionnement. L’outil de secours sera d’abord testé en grandeur nature sur une maquette au Centre d’expérimentation sur chaudières nucléaires de Chalon-sur-Saône (Saône-et-Loire). Au Tricastin, une erreur de mesure de quelques centimètres avait contraint EDF à revoir sa copie, avant de mener à bien cette opération délicate.
Comment expliquer ces incidents ? Au Tricastin, certains assemblages ne respectaient pas un alignement qui permet à leur extrémité d’être centrée. La faute « à une bille de roulement tombée d’un pont de manutention au fond de la cuve du réacteur », comme l’indique Guillaume Wack, directeur des centrales nucléaires à l’ASN ? Ou « peut-être en raison d’une dilatation », ainsi qu’on l’avance à EDF, ce qui serait plus inquiétant pour le reste du parc ?
Aucune de ces deux explications, contradictoires, ne semble valable à Gravelines : les enregistrements vidéo montrent que les assemblages étaient bien alignés lors du chargement. « Nous avons à Gravelines les mêmes conséquences qu’au Tricastin, mais pas les mêmes causes », note M. Wack. La panne du réacteur, qui devait redémarrer courant septembre (selon l’ASN) ou octobre (dixit EDF), risque en tout cas de coûter cher à l’électricien.