Les catholiques espagnols, soutenus par la droite et l’église, étaient mobilisés pour une grande manifestation, samedi après-midi à Madrid, contre le projet de libéralisation de l’avortement du gouvernement socialiste. Selon les organisateurs, « plus d »un million de personnes" ont participé au défilé. Selon une estimation de l’AFP sur place, les manifestants étaient plusieurs centaines de milliers. Les autorités n’ont pas communiqué de chiffres.
La manifestation a été convoquée par le Forum de la famille, une plateforme très organisée d’organisations catholiques conservatrices, qui avait fait descendre des centaines de milliers de manifestants dans la rue en 2005 pour protester contre la loi autorisant le mariage homosexuel. « Elle ne vise pas qu’à réclamer le retrait de la nouvelle loi, le message de fond est que le débat ne sera pas clos tant qu’il y aura un seul avortement en Espagne », a averti son président, Benigno Blanco, dans un entretien au quotidien conservateur ABC.
Le projet de loi socialiste, réformant une loi de 1985 qui n’avait dépénalisé l’avortement que sous certaines conditions, prévoit notamment une liberté totale d’avorter dans un délai de 14 semaines.
Plus de 600 autobus et plusieurs avions ont été affrétés pour transporter de toute l’Espagne les anti-avortement, qui défileront derrière une grande pancarte proclamant : « Chaque vie compte ». L’ancien chef du gouvernement conservateur José Maria Aznar (1996-2004) devait défiler avec plusieurs élus du Parti populaire (PP), dont la présidente de la région de Madrid, Esperanza Aguirre et la secrétaire générale du parti, Maria Dolores de Cospedal, souligne El Pais. Le PP a annoncé qu’il utiliserait tous les moyens juridiques et constitutionnels pour faire barrage à cette loi sur l’avortement.
La Conférence épiscopale soutient la manifestation mais sa présence devait s’y faire discrète, seuls quelques évêques étant annoncés. En revanche, le rappel des fidèles pendant les messes dominicales a été intense ces dernières semaines. L’activisme des conservateurs semble porter ses fruits : selon un sondage publié le 5 octobre par La Vanguardia, 46 % des Espagnols désapprouvent la nouvelle législation, contre 44 % qui y sont favorables. Un an plus tôt, les « pour » étaient près de 60 %.
Actuellement, l’avortement n’est autorisé qu’en cas de viol (jusqu’à 12 semaines de grossesse), de malformations du foetus (22 semaines) ou de « danger pour la santé physique ou psychique de la mère » (sans limitation de temps). Mais dans la pratique, le risque pour la santé psychique de la mère est le motif invoqué par plus de 90% des femmes, ce qui a donné lieu à des avortements très tardifs et controversés. Le projet contient une disposition qui est loin de faire l’unanimité, y compris dans l’électorat de gauche : les mineures de 16 et 17 ans pourront avorter librement sans consentement ni information préalable de leurs parents.
AFP, 17.10.09
Voir aussi : Avorter au pays de l’Opus Dei