Quelle place pour les travailleurs dans les évènements post-électoraux en Iran ?
Les évènements de masse post-électoraux en Iran, nés en réaction aux trucages massifs des pseudo « élections présidentielles » a débuté par une simple question : « où est passée ma voix ? ».
La réponse du régime militaro-islamique d’Iran n’a pas tardé : torture, assassinat, viol, arrestations massives, mascarades de shows télévisées en guise de procès et condamnations à mort de manifestants par les tribunaux du régime.
Après cela, le mouvement s’est radicalisé et des millions de manifestants ont scandés des slogans plus radicaux « A bas le régime » « A bas la dictature » « A bas la torture », exprimant une haine envers les dirigeants de ce régime fanatique d’un autre âge.
Ces évènements sont un mouvement politique en réaction à tous les mécontentements engendrés par ce régime, à la fois dictatorial et fanatique religieux. La totalité du peuple y était représentée. Les manifestations regroupaient des travailleurs, des femmes, des représentants des minorités religieuses ou ethniques, des étudiants. Hors mis le mouvement étudiant, ces différents groupes n’étaient pas venus avec leurs revendications habituelles, mais bien pour manifester contre le régime en général.
Les personnes qui réduisent les travailleurs au prolétariat industriel prétendent que les ouvriers n’étaient pas actifs dans ce mouvement et que celui-ci n’était que l’expression des classes moyennes. On ne peut pas être d’accord avec cette analyse. Outre les ouvriers, les catégories telles que les instituteurs, les infirmiers, les agents de services étaient présentes. Même s’il n’existe aucune donnée statistique sur la composition des manifestants, il aurait simplement été impossible d’en réunir des millions sans la participation de l’ensemble de ces catégories.
Bien sur, les travailleurs pauvres sont avant tout préoccupés par les moyens de gagner leurs vies au quotidien, plutôt que de gagner leur liberté politique. C’est pour cela, que depuis 30 ans, même à l’époque du Shah, les travailleurs pauvres sont plus actifs pour revendiquer davantage de justice sociale que les classes moyennes, préoccupés par la liberté politique et civile. Les travailleurs pauvres et les cols bleus sont plus tournés vers la justice sociale que vers le droit social, au contraire des intellectuels et de la classe moyenne davantage prêts à défendre la liberté sociale et politique. Mais tout ceci était déjà vrai à l’époque du Shah.
La classe ouvrière est entrée en révolution contre le régime du shah plus tardivement que les intellectuels et la classe moyenne. Par contre, une fois dans le mouvement contre le Shah, leur participation a été décisive pour abattre le régime royal, à l’image des grèves des ouvriers du pétrole, de la sidérurgie et des mineurs …
L’écart de revenus toujours grandissant entre les riches et les pauvres, la baisse du salaire minimum qui aujourd’hui est de 50% en dessous du seuil de pauvreté, la perte d’acquis sociaux par 90 % des travailleurs et la mise en place de lois néo-libérales des gouvernements successifs de Rafsanjani, Khatami et Ahmadinejad, favorisant privatisations et licenciements massifs, entraînent les travailleurs à lutter pour leur survie quotidienne plutôt que pour acquérir de nouveaux droits. Ils n’ont ni le temps ni les moyens de s’investir dans les problèmes politiques, démocratiques et culturels de la société pour défendre le droit à la citoyenneté. De plus, l’interdiction des syndicats, l’anéantissement de toutes organisations professionnelles ou politiques indépendantes, y compris les ONGs, le système policier et sécuritaire sur les lieux de travail, aussi bien au niveau national que régional et le recours aux arrestations, à la torture et à l’emprisonnement des dirigeants syndicaux et associatifs, ne laissent aucune place au combat indépendant de la classe ouvrière pour défendre ses droits. Les travailleurs en sont réduits à se défendre individuellement. Puisqu’ils ne peuvent compter sur aucune représentation sociale, ils sont aussi obligés de manifester à titre individuel plutôt que sous la bannière d’une organisation ou d’un syndicat ou une autre forme de collectivité.
Il faut chercher les racines des évènements actuels, dans le mécontentement et le ras le bol des peuples iraniens, de la classe moyenne aux ouvriers. Les fraudes électorales n’en sont que le révélateur. Les réformateurs du régime islamique essaient de profiter des évènements pour sauver ce régime, économiquement capitaliste ultra libéral et politiquement théocratique moyenâgeux autant que pour sauvegarder leurs privilèges, dans une guerre économico-politique de factions. Les réformateurs essaient de récupérer le mouvement « vert » (symbole du chiisme radical) mais islamique représenté entre autres par Khatami et Moussavi. Ni Moussavi qui pendant les années ou il était premier ministre, les atteintes aux droits de l’Homme étaient à leur apogée, ni Khatami avec son bilan de huit années de la présidence, ne sont pas pour un régime laïc et démocratique, ni pour le droits des travailleurs et des minorités ou la liberté pour les femmes. Au contraire. Les réformateurs craignent autant qu’Ahmadinejad que le mouvement de masse remet en cause l’ensemble du régime islamique et que les mouvements ouvriers puissent arborer les drapeaux anti capitaliste et renverser le régime islamiste comme le régime monarchique l’a été en 1979. Les conservateurs représentés par Khamenei-Ahmadinejad et les réformateurs du mouvement « vert » mènent une guerre au sein de la classe dirigeante, pour s’emparer du pouvoir et de l’économie.
A défaut de partis politiques, de syndicats indépendants et de libertés individuelles et collectives, le peuple est obligé de profiter de ces évènements, non pas pour favoriser une faction ou l’autre, mais pour balayer l’ensemble du régime. Soutenir le mouvement « vert », tant que il n’a pas déclaré une position très nette et clair vis-à-vis des droits de l’Homme, des libertés des femmes, les libertés individuelle et de la laïcité, serait une erreur fatale pour les peuples iraniens, la classe ouvrière, la jeunesse et les femmes. Même si les peuples iraniens peuvent, à terme, se débarrasser de la faction conservatrice représentée par la tyrannie de Khamenei-Ahmadinejad, les dirigeants « verts » et les « réformateurs » sont aussi menaçants et dangereux que leurs rivaux.
Le seul salut pour l’avenir de ces peuples est l’intervention massive de tous les acteurs de la société, surtout de la classe ouvrière dont les revendications économiques et sociales peuvent mettre fin à ce régime.
Les leaders du syndicat indépendant du sucre en Iran désormais emprisonnés
Agissez maintenant
Cinq dirigeants du syndicat indépendant des travailleurs du sucre en Iran sont maintenant en prison, purgeant une peine qui leur a été imposée pour leurs activités syndicales. Dans une mesure visant à détruire le syndicat indépendant constitué l’an dernier par les travailleurs de l’immense complexe de plantation / raffinerie de sucre de Haft Tapeh dans le sud de l’Iran, un tribunal a condamné le 12 octobre dernier cinq leaders syndicaux à des peines de prison immédiates sur la base d’accusations portées en octobre 2007. Les accusations ont été utilisées après qu’un tribunal d’appel eut annulé des condamnations similaires prononcées en 2008.
Cinq dirigeants du syndicat indépendant des travailleurs du sucre en Iran sont maintenant en prison, purgeant une peine qui leur a été imposée pour leurs activités syndicales. Dans une mesure visant à détruire le syndicat indépendant constitué l’an dernier par les travailleurs de l’immense complexe de plantation / raffinerie de sucre de Haft Tapeh dans le sud de l’Iran, un tribunal a condamné le 12 octobre dernier cinq leaders syndicaux à des peines de prison immédiates sur la base d’accusations portées en octobre 2007.
Les accusations ont été utilisées après qu’un tribunal d’appel eut annulé des condamnations similaires prononcées en 2008. Ghorban Alipour, Feridoun Nikoufard, Jalil Ahmadi et Ali Nejati ont tous reçu une peine de six mois d’emprisonnement ferme immédiat, assortie à un sursis de six mois supplémentaires pour les cinq prochaines années ; au cours de cette période, il leur est interdit de se livrer à des activités syndicales.
Mohammmad Heydari Mehr a été condamné une peine de quatre mois d’emprisonnement ferme, assortie d’un sursis de huit mois. Ali Nejati doit purger son sursis en prison, ce qui signifie qu’il pourrait passer un an complet en privation de liberté. Si l’appel de sa condamnation de 2008 est rejeté, sa peine d’emprisonnement pourrait atteindre plus de deux ans.
Au cours des dernières années, les travailleurs de Haft Tapeh ont dû recourir régulièrement à des grèves et à d’autres actions syndicales pour obtenir le paiement d’importants arrérages salariaux et protester contre la détérioration de leurs conditions de travail.
Le régime est clairement déterminé à écraser le syndicat en mettant l’ensemble de sa direction derrière les barreaux.
Le sort réservé aux activistes emprisonnés des syndicats du transport et de l’enseignement montre que les prisonniers de Haft Tapeh risquent d’être victimes de sévices physiques et psychologiques prolongés. La SSTI appelle tous les défenseurs des droits démocratiques et syndicaux à se mobiliser pour les défendre. Ali Nejati n’a pu retrouver un emploi à Haft Tapeh depuis sa libération en avril après un mois en isolement dans un centre de détention des services de renseignement. Nejati a été placé sur une liste noire de l’emploi dans la ville de Shush et la situation de sa famille devient de plus en plus désespérée.
Des milliers de militants/tes des droits syndicaux à travers le monde ont protesté contre la répression qui frappe le syndicat Haft Tapeh et ses dirigeants.
Ali Nejati a été adopté à titre de prisonnier de conscience par Amnesty International après les condamnations prononcées par le tribunal dans le dossier Haft Tapeh. Les protestations internationales semblent avoir joué un rôle et influencé la décision de la cour d’appel, qui a rejeté les accusations ridicules portées contre les défendeurs, notamment celle d’avoir « porté atteinte à la sécurité nationale ».
La solidarité internationale est requise de toute urgence notamment en envoyant un message aux autorités iraniennes afin d’exiger la libération immédiate et inconditionnelle de ces courageux syndicalistes (reportez-vous à notre site internet http://www.echo-iran.com). Certains messages seront transmis, faisant savoir que les syndicalistes persécutés jouissent du soutien de la communauté internationale.
Depuis le 9 septembre, plus de 500 travailleurs sont en grève à Haft Tapeh afin d’exiger la restauration des heures supplémentaires mensuelles, que la direction a ramenées de 120 à 40 heures. Le salaire de base est tellement faible que les travailleurs doivent faire jusqu’à 120 heures supplémentaires par mois uniquement pour assurer leur survie et celle de leur famille. Les coupeurs qui récoltent la canne à sucre à la main dans une chaleur suffocante ne travaillent que six mois par année, sans aucune indemnité de chômage pour le reste de l’année.
[Un article sur une lutte ouvrière manque ici]
Une vie détruite parmi tant d’autres sous le régime de la République Islamique
Soheila Ghadiri a été exécuté par pendaison à la prison d’Evin à Téhéran le 21 oct.2009. Elle avait été accusée du meurtre de son nouveau-né de 5 jours. Son histoire tragique a suscité beaucoup d’émotions chez les intellectuels, les militants des droits de l’Homme et les opposants du régime.
Soheila, âgée de 30 ans (au moment de sa pendaison), est née en même temps que la République Islamique est arrivée au pouvoir en Iran. Pour comprendre mieux l’histoire de cette femme, il faut s’attarder sur son passé.
A la suite d’une fugue à l’âge de 16 ans, elle se trouve dans la rue, le froid, la faim… En bref, la dureté des conditions de vie dans la rue la pousse très vite vers la prostitution et peu du temps après, elle tombe enceinte. Cinq jours après avoir accouché, elle se résigne à tuer son bébé !
Pendant son procès, il y a deux ans, Soheila n’a pas accepté que son avocate la présente comme « malade mentale » ou « déséquilibrée ». En avouant le meurtre de son nouveau-né, elle affirme l’avoir tué car elle ne voulait pas que son enfant connaisse le même sort qu’elle.
Son procès remet, implicitement, en cause le régime de la République Islamique qui est un régime corrompu au bilan plus que catastrophique ; pauvreté grandissante, chômage, enfants des rues, prostitution et toxicomanie…
En somme, c’est un régime qui génère la misère et dont les seules réponses aux maux de la société sont la répression et l’atrocité. L’histoire de Soheila résume bien ce constat.
L’inégalité sociale grandissante engendre des hommes et des femmes qui ne trouvent aucune place dans la société.
La vie Soheila est l’un des milliers d’exemples des vies détruites en Iran. Bien que l’Iran soit riche au niveau des ressources pétrolières, la majorité de la population ne profite pas de cette richesse.
Un des autres aspects catastrophiques du régime est le fonctionnement du système judiciaire : pour démontrer l’extrême violence et l’absurdité du système pénal de la République Islamique une comparaison rapide entre deux affaires judiciaires assez similaires suffit ;
Similaires : l’une est en Iran l’autre en France :
* Soheila Ghadiri, une jeune femme pauvre et sans famille qui a tué son bébé de 5 jours ,a été jugée et condamnée à mort en Iran ;
* Véronique Courjault, une femme de famille aisée soutenue par toute sa famille, jugée pour le meurtre de trois de ses nouveau-nés a été condamnée à 8 ans d’emprisonnement en France.
Pour terminer, à l’approche du 25 novembre, la journée mondiale de lutte contre les violences faites aux femmes, nous demandons à tous les défenseurs des droits de l’Homme et aux forces progressistes de réagir aux crimes et aux violences d’état ( Iranien ) faites aux femmes en général et aux femmes emprisonnées et condamnées en particulier.
La lettre d’adieu d’Ehsan Fattahian, un Kurde militant et réalisateur de film
Le 11 novembre 2009, Ehsan Fattahian, un jeune Kurde militant, réalisateur de film et prisonnier politique a été exécuté dans la ville de Sanandaj, Iran. Il avait été arrêté en juillet 2008 et emprisonné pour son association avec Komalah, un groupe d’opposition Kurde. Ehsan, un poète s’est fait une réputation avec la réalisation d’un film basé sur la célèbre chanson révolutionnaire italienne (Bella Ciao). En dépit de vastes protestations tant à l’intérieur et qu’à l’extérieur de l’Iran, le régime l’a exécuté très rapidement. A présent une quinzaine de prisonniers politiques Kurdes sont dans les couloirs de la mort du régime et attendent leur tour
Nous présentons ci-dessous la traduction en français de la lettre adieu d’Ehsan.
La lettre d’adieu d’Ehsan Fattahian
"Les derniers rayons du coucher du soleil
me montrent le chemin sur lequel je veux écrire
Le bruit des feuilles sous mes pieds
me dit : Laisses-toi tomber
et alors seulement tu trouveras le chemin de la liberté"
Je n’ai jamais eu peur de la mort, même maintenant que je la sens plus proche de moi. Je peux la sentir et je suis familiarisé avec elle, parce qu’elle est une vieille connaissance de cette terre, de ce pays et de ces peuples. Je ne veux pas parler de la mort mais des raisons de la mort, alors qu’ils l’ont traduite comme la récompense de la justice et de la liberté. Peut-on avoir peur de l’avenir, du destin ? « Nous » qui avons été condamnés à mort par « eux », nous nous efforcions de trouver une petite ouverture vers un monde meilleur et juste. Sont-ils conscients de leurs propres actes ?
Ma vie a commencé dans la ville de Kermanshah, une grande ville aux yeux de mes compatriotes, le berceau de notre civilisation. Très tôt, dès mon enfance, j’ai ressenti la discrimination et l’oppression au plus profond de mon existence, envers moi et envers des milliers d’autres comme moi. Cette cruauté, le « pourquoi » de cette cruauté et le « comment » s’en débarrasser occupaient toute ma pensée !
Mais hélas, ils avaient bloqué tous les chemins à la justice et avaient rendu l’atmosphère si répressive que je n’ai trouvé aucune manière de changer des choses de l’intérieur. C’est eux qui m’ont imposé un autre horizon : c’est ainsi que je suis devenu le « peshmerga (partisan) de Koomaleh, ». La quête de l’identité dont on m’a privé et le désir de me retrouver m’ont poussé dans cette voie. Le départ du pays natal a été très difficile mais il ne m’a jamais incité à rompre le lien avec ma ville d’enfance. De temps à autre je retournais à mon premier chez moi pour me rafraichir la mémoire. La dernière visite était plein d’aigreur et « Ils » m’ont arrêté et enfermé dans une cage. Dès le premier contact avec mes geôliers et au travers de leur hospitalité je me suis rendu compte que le destin tragique de mes nombreux compagnons m’attendait également : la torture, les accusations non fondées, la fabrication de fausses pièces à convictions, l’audition à huis clos et finalement un verdict injuste et influencé politiquement, la mort…
Laissez-moi vous raconter au passage : après mon arrestation dans la ville de Kamyaran et je suis resté pendant quelques heures menotté et obligé de porter un bandeau pour m’empêcher de voir, comme « invité » du bureau de renseignement général de la ville, avec interdiction de visite. Une personne qui s’est présentée en tant que procureur a commencé à m’interroger en posant une série de questions insensées qui n’étaient que de fausses accusations (je devrais préciser que, selon la loi, l’interrogation juridique des accusés hors du tribunal est formellement interdite). C’était le premier de mes nombreux interrogatoires. La même nuit j’ai été transféré au bureau de renseignement de la ville de Sanandaj, la capitale de la province du Kurdistan. C’est ici qu’on m’a traité comme invité d’honneur !
Une cellule sale avec une toilette infecte et des couvertures qui n’avaient pas probablement vu l’eau depuis des décennies ! A partir de ce moment mes jours et mes nuits se sont passés entre les bureaux d’interrogatoire et cette cellule subissant des tortures et des sévices extrêmes. Durant trois mois mes interrogateurs, espérant probablement une promotion ou une minable récompense pécuniaire, m’ont accusé de toutes sortes d’accusations étranges et fausses, qu’ils savaient mieux que quiconque fausses et non fondées. Ils ont tout essayé pour démontrer que j’ai été impliqué dans une tentative armée pour renverser le régime. En fait, les seules charges qu’ils pouvaient prouver c’étaient mon adhésion au Komalah et faire de la propagande contre le régime. La première chambre du tribunal de la ville de Sanandaj m’a trouvé coupable de ces charges et m’a condamné à 10 ans de prison à purger dans la prison de Ramhormoz.
La structure politique et administrative du régime souffre toujours de la maladie de centralisation excessive, mais pour mon cas ils ont essayé de réparer ce défaut ! Récemment ils ont transféré tous les pouvoirs juridiques aux tribunaux de province, y compris celui de prononcer la peine capitale, ce qui était jusqu’à maintenant du ressort de la cour suprême.
Cette nouvelle décentralisation a donné l’opportunité au procureur de la petite ville de Kamyaran de faire appel du verdict du premier procès et d’exiger ma tète. Finalement la cour d’appel du Kurdistan a changé le premier verdict de 10 ans d’emprisonnement en peine de mort.
Selon l’Article 258 du Code pénal, une cour d’appel peut renforcer la peine initiale seulement dans le cas où le verdict initial est inférieur à la peine minimale prévue par la loi pour le crime concerné. Dans mon cas, selon la réquisition du procureur général mon crime était « animosité avec Dieu », passible d’un an d’emprisonnement. Même les dix ans prononcés par premier tribunal sont déjà bien loin de la peine prévue par la loi. Je vous laisse de deviner le déroulement de mon procès et le degré de l’impartialité de la justice dans mon pays en comparant le verdict de peine de mort et ce que la loi prévoit.
Je dois ajouter qu’entre deux procès on m’a transféré au bureau de renseignement général de Sanandaj. Juste avant le deuxième procès ils ont demandé à filmer une entrevue dans laquelle je devais reconnaitre les crimes que je n’ai jamais commis, et renoncer à toutes mes idées. Ils ont bien précisé qu’en cas de refus la peine de mort m’attendait. En dépit des tortures physiques et morales et de menaces de mort, je n’ai pas accepté de faire cette confession filmée pour leur future show-télé. La partie était jouée. Peu après, la cour d’appel joue le jeu des hommes du pouvoir : la terreur. Ainsi devraient-ils être blâmés ?
Un juge jure de rester juste et impartial en toutes circonstances, envers tous et de ne regarder le monde qu’a travers la loi. Quel juge, sur cette terre, peut prétendre n’avoir jamais violé son serment et avoir toujours été impartial, équitable et juste ? À mon avis le nombre de tels juges ne dépasse pas de celui des doigts de la main. Dans ce pays où sur un signe d’un simple policier (sans la moindre connaissance du délit et de la loi), le système judiciaire peut faire arrêter, juger, emprisonner et exécuter des gens, peut-on vraiment en vouloir à un misérable juge de province, lui-même toujours réprimé et victime de la discrimination ? A mauvaises fondations, mauvais bâtiment !
Pendant ma dernière confrontation, le procureur a bien admis que la sentence de peine de mort n’avait pas de base légale, on m’a notifié pour la deuxième fois mon exécution. Inutile de dire que cette insistance absurde à appliquer la peine de mort, coûte que coûte, est due à des pressions extérieures au système judiciaire, notamment des forces politiques et de sécurité.
Pour ces gens-là la vie et la mort des prisonniers politiques ne sont qu’un facteur déterminant le montant des primes de fin de mois qu’ils toucheront. À leurs yeux, rien d’autre n’importe que leurs propres intérêts, même s’il s’agit du droit le plus élémentaire des êtres humains : le droit de vivre. Oubliées les lois et les conventions internationales, ils se moquent complètement même de leurs propres lois et procédures.
Voici mes derniers mots : si ces régnants et ces oppresseurs pensent que ma mort les débarrassera de la « question du Kurdistan », qu’ils se disent que ce n’est qu’une illusion. Ni ma mort ni la mort de milliers d’hommes comme moi ne seront le remède à cette blessure incurable et peut-être alimenteront-elles même le feu. Pour un ami qui tombe un autre s’élève !
Ehsan Fattahian
Prison central de Sanandaj, Iran
9 novembre 2009
Lettre des dirigeants Du Syndicat des travailleurs de la Sucrerie « Haft Tapeh, adressée à l’OIT
La traduction en français de la lettre des dirigeants Du Syndicat des travailleurs de la Sucrerie « Haft Tapeh, adressée à l’Organisation Internationale du Travail (OIT), ainsi qu’aux organisations syndicales. Après l’envoie de cette lettre, trois syndicalistes signaleurs de cette lettre ont été condamnés à des lourdes peines d’emprisonnement. Par l’initiative de la S.S.T.I., les syndicaux Français ont envoyé des lettres protestations aux autorités de la République Islamique.
Solidarité avec les Travailleurs en Iran
****
À : L’Organisation internationale du Travail (OIT)
Du Syndicat des travailleurs de la Sucrerie « Haft Tapeh Sugar Company » (Iran)
Cc : les organisations syndicales, les institutions de défense des droits humains et les médias
Objet : Appel en vue d’empêcher le gouvernement iranien de transgresser les Conventions 87 et 98
Nous, travailleurs de la Sucrerie de « Haft Tapeh Sugar Company », subissons la violation continue de nos
droits et de nos revendications, y compris le non-paiement de nos salaires depuis plusieurs mois, en plus des
efforts concertés entrepris par l’employeur de cesser la plantation de canne à sucre dans le but de fermer
l’usine à terme et sa privatisation. Nous prévoyons des licenciements massifs. Ils ont déjà cessé de payer nos
heures de travail supplémentaires.
Entre 2006 et 2009, les travailleurs ont protesté et ont organisé des manifestations et par des moyens
pacifiques se sont plaint aux autorités juridiques au sujet de leur situation, mais tout cela n’a abouti à aucun
résultat, nos salaires en retard n’ont pas été payés, et même certains travailleurs ont été persécutés. Le
Conseil islamique du travail, qui est un pseudo « organisme des travailleurs » affilié au gouvernement et
l’employeur, n’a rien fait pour aider à l’obtention de nos droits. Ailleurs les travailleurs sont confrontés à la
même situation. Cela dit, la raison principale de vous adresser cette lettre est la suivante :
En Octobre 2008, les travailleurs de la sucrerie Haft Tapeh ont organisé leur Assemblée Générale et ont élu
leurs délégués syndicaux pour représenter leur syndicat nommé Syndicat des travailleurs de la sucrerie Haft
Tapeh (Sandikaa-ye Kargaran Sherkat-e- Neyshekar Haft Tapeh). Cette procédure a eu lieu dans le cadre
des lois nationales et internationales et conformément aux conventions 98 et 87 de l’OIT. Nous estimons
avoir parfaitement le droit de former notre organisation syndicale indépendante. Suite à ça, 9 personnes ont
été élues comme représentants des travailleurs de Haft Tapeh au cours d’une élection organisée par les
travailleurs eux-mêmes. C’était la première fois depuis plus de quatre décennies que des milliers de
travailleurs participaient librement et avec enthousiasme à une élection pour choisir leurs propres
représentants.
Malheureusement, à la fois avant et après cette élection, nous, les représentants de quatre mille travailleurs
ainsi que d’autres membres du conseil d’administration du syndicat, avons été arrêtés, emprisonnés et
interrogés. A maintes reprises, nos familles ont été intimidées et persécutées par les forces de sécurité. Nous
avons été déférés devant les tribunaux en étant accusés, de façon récurrente, d’allégations telles que des
« actions contre la sécurité nationale". Le président de notre conseil syndical, Ali Nejati, a été incarcéré dans
une cellule d’isolement pendant 40 jours et a été soumis à des interrogatoires constants et a été maltraité.
Enfin, en Mars 2009 M. Nejati a été licencié par le bureau du renseignement et du département de la sécurité
de l’entreprise.
Le tribunal a condamné les cinq membres du conseil du Syndicale ; Ali Nejati, Jalil Ahmadi, Feridoun
Nikoufard, Ghorban et Mohammad Alipour mehr Heydari, à un an de prison (six mois ferme et six mois
avec sursis) et d’autres amendes et privations des droits civils. Par la suite, ils ont également été interdits de
travailler dans l’entreprise.
La raison suivante a été évoquée comme motif dans l’énonciation des dites peines :
« Agissement contre la sécurité nationale à travers la formation d’un syndicat hors la loi » !
Nous posons à l’Organisation Internationale du Travail les questions suivantes :
– Est-il permis au gouvernement iranien de violer les conventions fondamentales telles que celle de 98 et
de 87 ?
– Le gouvernement iranien est-il un membre permanent de l’OIT ?
– Le gouvernement iranien a-t-il jamais été tenu responsable de ses actes ?
– Pourquoi les travailleurs sont emprisonnés, licenciés, persécutés, interrogé et torturé pour
– La création de leurs propres organisations syndicales indépendantes ?
– Ne faut-il pas que le gouvernement iranien soit responsable de ses actes de répression contre les
représentants du Syndicat des travailleurs Vahed, entre eux Mansour Osanloo et Ebrahim Madadi, ainsi
que les représentants des travailleurs de la sucrerie Haft Tapeh ?
– Ne doit-on dire au gouvernement iranien qu’il ne peut pas emprisonner des travailleurs (plus de 150 à
Téhéran au 1er mai 2009) pour organiser une célébration pacifique en cette Journée internationale des
travailleurs ? Qu’ils ne doivent pas les juger, les fouetter ou les mettre en prison pour célébrer la
Journée du 1er Mai, (par exemple le cas de Mahmoud Salehi qui a été emprisonné pendant un an pour
ce « crime ») ?
– L’OIT est-elle au courant des activités répressives du gouvernement iranien contre les représentants des
enseignants et contre l’Association des Enseignants iraniens ? ... Et ainsi de suite.
Exactement pendant que nous, les travailleurs et les membres du conseil Syndical des travailleurs de Haft
Tapeh, vous adressons cette lettre la police intimide et terrorise nos familles. Les policiers ont agi dans nos
villes de Shoush, Haft Tapeh et Andimeshk, comme si nous étions des criminels et des fugitifs. Nous
attendons d’être arrêtés et envoyés en prison pour lesdites peines injustement prononcées, et alors que nos
noms ont été affichés sur l’entrée de l’entreprise comme des délinquants qui ne sont pas autorisés à entrer
dans le lieu de travail. Si nous allons à notre travail, la police nous arrêtera et cela leur donnera une nouvelle
excuse pour encore nous pénaliser.
Il est très étrange que si nous allons au travail, ils nous arrêtent et si nous ne nous présentons pas au travail
ils nous traiteront comme des absents, ce qui justifiera notre renvoi pur et simple, ce qui conduirait à notre
arrestation et à l’emprisonnement. Ce cercle vicieux a été orchestré de manière telle qu’à la fin de la journée
nous serons à la fois licenciés et emprisonnés. Ainsi, nous ne savons pas au moment où vous lisez cette
lettre si nous serons en prison ou pas.
Néanmoins, nous espérons que vous ferez pression sur le gouvernement iranien pour le forcer à respecter
certains droits les plus élémentaires des travailleurs du Haft Tapeh et des travailleurs iraniens, y compris la
liberté de constituer des organisations indépendantes de travailleurs.
Nous n’avons pas peur des éventuelles conséquences pour nous-mêmes dans la voie que nous avons choisi
pour la réalisation de nos droits, mais nous espérons qu’en prison, nous entendrons que l’OIT a pris toutes
les mesures nécessaires concernant les actions inhumaines du gouvernement iranien et les violations des
conventions 98 et 87. Nous attendons de connaître vos actions dans ce domaine.
Est-ce que les travailleurs peuvent espérer une action de la part de l’OIT ?
Nous, ainsi que de nombreux travailleurs en Iran, attendons avec impatience de voir le résultat réel de votre
effort. Est-ce qu’une action efficace sera entreprise un jour ?
24 Octobre 2009
Ali Nejati, Déléguée Générale
Feridoun Nikoufard, Vice Déléguée Générale Haft Tapeh, Shoush, Iran
Jalil Ahmadi, Déléguée
Reza Rakhshan, Déléguée
* Traduit par SSTI
La lettre de protestation du Syndicat SUD à l’Ambassadeur de la République Islamique d’Iran à Paris
Le 3 novembre 2009
Monsieur l’Ambassadeur
République islamique d’Iran
4 Avenue d’Iéna
75116 PARIS
Monsieur l’Ambassadeur,
L’Union syndicale Solidaires a été informée de l’arrestation, de l’incarcération et de la condamnation à des peines des prison et des amendes de plusieurs militants et responsables du « Syndicat des travailleurs de la sucrerie Haft Tape », notamment Ali Nejati, Jalil Ahmadi, Feridoun Nikoufard, Ghorban, Mohamad Alipour Mehr.
Ahmadi, Feridoun Nikoufard, Ghorban, Mohamad Alipour Mehr. Cette répression vise à empêcher l’expression et la constitution de syndicats de travailleurs indépendants ayant pour objectif la défense des salariés dans votre pays.
L’Union syndicale Solidaires proteste fermement contre cette répression envers ce syndicat et ses militants.
L’Union syndicale Solidaires demande aux plus hautes autorités de la République Islamique d’Iran de faire respecter les droits fondamentaux des travailleurs, en particulier le droit de se syndiquer librement et de faire grève.
Je vous prie de croire, Monsieur l’Ambassadeur, à ma parfaite considération.
Annick Coupé
Déléguée générale
144 Boulevard de la Villette – 75019 Paris – tel : 01 58 39 30 20
www.solidaires.org
La lettre de protestation de la C.G.T. adressée à l’Ambassadeur de l’Iran en France
Monsieur l’Ambassadeur d’Iran en France
Ambassade de la République Islamique d’Iran
4, avenue d’Iena
75116 Paris
Besançon, le 6 novembre 2009
Monsieur l’Ambassadeur,
Une fois de plus les violations des libertés syndicales et les tentatives du gouvernement iranien de réprimer le syndicalisme indépendant constituent un élément inquiétant du paysage des droits fondamentaux en Iran.
Notre syndicat a eu connaissance des pressions sur les militants du Syndicat des travailleurs d’Haft-Tapeh, en particulier à l’encontre d’Ali Nejati, Feridoun Nikoufar, Jalil Ahmadi et Reza Rakhshan, condamnés à des peines de prison ferme pour leur seule activité syndicale. an>
Hier, jeudi 5 novembre, nous avons appris l’arrestation et l’incarcération de Jalil Ahmadi et de Feridoun Nikoufar.
Nous ne pouvons que dénoncer cette nouvelle violation des droits syndicaux et des libertés démocratiques des ouvriers d’Iran et condamnons sans retenue l’attitude du gouvernement qui cherche à asphyxier les activités syndicales indépendantes en utilisant la force étatique.
Nous exigeons l’arrêt de la pression sur les militants syndicaux, la libération et la relaxe immédiates de tous les militants syndicaux. Recevez, Monsieur l’Ambassadeur, nos salutations.
Pour la CGT-ADDSEA
Pascal Descamps, Délégué Syndical
cgt.addsea gmail.com
CGT Addsea - UL CGT - 4B
rue Léonard de Vinci
25000 Besançon
[Il manque un article de solidarité]
Appel à participer à une caisse de solidarité contre la répression syndicale en Iran
Les syndicalistes inculpés et leurs familles ont maintenant besoin de notre soutien !
En Iran la répression est toujours de plus en plus forte. Répondons par la solidarité, qui est un moteur essentiel de la lutte que chaque contribution aidera à faire exister. Une caisse de solidarité vient de se créer et vous pouvez y participer !
Face à la multiplication et accélération des répressions syndicales en Iran par le régime (emprisonnements, licenciements, salaires impayés et également grèves, manifestations, émeutes, occupations et etc.) les familles des militants syndicaux emprisonnés sont les premiers victimes des politiques de régime anti travailleurs de la République Islamique d’Iran. Le pouvoir ne peut répondre que par une répression de plus en plus forte à l’encontre des manifestants ou des militants syndicaux et politiques : provocations, répressions, violences policières, inculpations, procès et condamnations.
Face à cette situation très alarmante il n’est seulement logique mais nos de devoirs de ne pas laisser tomber les personnes qui subissent cette répression et sec conséquences. C’est pourquoi, Solidatité Socialiste avec les Travailleurs en Iran s’est mise en place une Caisse de Solidarité pour aider les syndicalistes iraniens emprisonnés et leurs familles en difficultés.
Son fonctionnement s’effectue, sur le modèle des caisses de grève, de façon mutuelle et transparente avec les collectifs qui se sont déjà coltiné les conséquences de la répression en Iran. Il n’est pas question de supplanter les collectifs, mais de leur apporter une aide matérielle et leur permettre ainsi de consacrer plus de temps à l’organisation d’actions contre la répression.
Un compte spécial « Caisse de Solidarité » vient d’être ouvert sous la responsabilité de l’association SSTI. La SSTI est une association loi 1901 dont le but est de faire écho dans le monde de la lutte de travailleurs en Iran. Ce compte est alimenté par des prélèvements automatiques et des versements occasionnels. Un rapport d’activités et un reçu pour les impôts est envoyé à chaque personne qui en fait la demande.
La répression sera toujours plus forte si la solidarité reste divisée.
La solidarité est un moteur essentiel de la lutte que chaque contribution, aussi petite soit elle, aidera à faire exister.
Pour participer concrètement à la Caisse de Solidarité :
Voir à l’adresse Internet suivante :
http://www.iran-echo.com/caisse_solidarite.html