La décision néerlandaise de retirer les troupes bataves d’Afghanistan n’a pas retenu l’attention qu’elle mérite. Sauf pour le Financial Times qui titre que « le départ hollandais sape les efforts afghans ».
L’attention que le journal de la finance porte à l’affaire est la vraie mesure de son importance. D’après lui, la décision du gouvernement hollandais est « un coup porté à l’idée d‘une cause commune occidentale en Afghanistan ». C’est ça, et c’est salutaire.
Du temps de Bush, ceux des européens qui ne s’associaient pas à sa politique étaient considérés des ennemis. Après le refus de la France de soutenir la guerre d’Irak, aux USA on avait même rebaptisé les french fries en liberty fries.
Vus les résultats catastrophiques de cette politique, la stratégie de l’establishment US a changé au profit d’une plus forte intégration, toujours subordonnée, des européens. Et on a misé sur Obama pour la mettre en pratique.
Jusqu’ici les choses avaient marché. Il y a moins d’un an, le sommet de Strasbourg de l’OTAN avait été le moment central de l’unité retrouvée autour, justement, d’un autre discours que celui de Bush.
Alors que ce dernier défendait l’idée de l’Amérique contre tous, l’idée d’un « 21e siècle américain », c’est « la cause commune occidentale en Afghanistan » qu’avait été mis en avant Obama à Strasbourg. Et elle avait fait mouche : à preuve le retour de la France dans le commandement intégré de l’OTAN.
Ce qu’est cette « cause commune » est vite dit. C’est d’abord une plus forte participation des européens à la guerre étasunienne menée sous le chapeau de l’OTAN en Afghanistan. Pour former l’armée afghane, mais aussi pour participer aux combats. Avec, à la clé, les massacres de femmes et d’enfants perpétrés lors de l’offensive contre les Talibans commencée il y a trois semaines…
L’augmentation systématique des budgets militaires est aussi part de cette « cause commune » alors que les coupes dans les dépenses sociales et d’infrastructures s’approfondissent. Robert Gates, ministre US de la défense, vient d’ailleurs de tancer vertement ceux des européens qui oseraient renâcler.
Et c’est aussi, cette « cause commune », l’intensification de la collaboration sécuritaire. Avec l’installation de scanners corporels dans les aéroports, mais avec aussi la transmission automatique aux autorités étasuniennes des données concernant les voyageurs.
Les derniers accords passés en ce sens par les compagnies aériennes ne concernent pas seulement les données relatives au lieu d’achat des billets et au mode de paiement : elles peuvent également relever de l’appartenance politique ou syndicale des voyageurs, voire de leur orientation sexuelle !
C’est ce consensus-là que la décision hollandaise fissure. Il faut le faire voler en éclats. Notamment par la mobilisation -dès maintenant- pour le Forum Social Européen qui aura lieu à Istanbul du 1er au 5 juillet.
Paolo Gilardi