Quatre ans d’arbitraire total. De longues années durant lesquelles des prisonniers, à Guantanamo, n’ont bénéficié d’aucune protection juridique et ont subi la torture (dont la privation de sommeil). Le règne du non droit permettant aux militaires US de mener des interrogatoires destructeurs « pouvaient durer 96 heures d’affilée, avec quelques pauses de quatre heures au plus » (Le Monde du 14 mars). L’incarcération sine die et au secret, sans même une inculpation, de personnes sur lesquelles ne pèsent que de vagues soupçons et sont, parfois, victime d’une simple erreur de nom. Un univers kafkaien.
Or, comme le souligne Amnesty International, « Guantánamo Bay n’est que le sommet de l’iceberg ». Les États-Unis ont ouvert des prisons similaires, en Irak notamment, et « sont impliqués dans l’utilisation de centres de détention secrets, surnommés ‘sites noirs’, dans d’autres pays » (communiqué du 16 février 2006). Le système est devenu international et ne peut que faire école. Combien de gouvernements peuvent en effet se prévaloir maintenant du précédent étatsunien pour justifier leurs propres crimes ? Car il s’agit bien de crimes, parmi les plus graves. Au-delà des règles du droit international, ce sont les droits humains fondamentaux qui sont violés au vu et au su de tous.
Grâce à des actions répétées menées en justice par l’agence Associated Press, les noms de 317 prisonniers de Guantanamo sont maintenant connus ; mais ils sont au moins 760 à y avoir été incarcéré. Le règne de l’arbitraire est encore loin d’avoir été brisé. L’action internationale doit s’amplifier pour obtenir la fermeture de tous les centres de détention illégaux, de tous les « sites noirs ».